Blood


Avis aux amateurs de bambins maléfiques assoiffés de sang : Blood, signé Brad Anderson, sort ce 19 Juillet directement en VOD et vidéo ! Après les Esther (Jaume Collet-Serra, 2009), La Malédiction (Richard Donner, 1976) et autres Village des Damnés (John Carpenter, 1995), l’idée est encore une fois de nous montrer à quel point les enfants peuvent être terrorisants dès lors qu’il est l’heure de manger ! 

Un enfant pâle, éclairé en contre-jour, a du sang sur toute la joue dans le film Blood.

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There will be no Blood

Plan rapproché-épaule sur Michelle Monaghan, avec un sourire d'apaisement, dans l'embrasure d'une porte, baignée dans une lumière chaude douce dans le film Blood.

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Drôle de carrière que celle de Brad Anderson qui a exploré à peu près tous les aspects du cinéma de genres au travers de ses films, et qu’on a cru voir exploser au début des années 2000 avec deux longs-métrages aux succès d’estime importants : Session 9 (2001) et The Machinist (2005). Ce dernier, surtout, porté par la géniale partition de Christian Bale en impressionna plus d’un pour sa noirceur et sa radicalité. Alors qu’on s’attendait à ce que le tout Hollywood ne le courtise et qu’il puisse assoir son style, Brad Anderson choisit de tracer sa route, concentrant ses efforts sur des productions la plupart du temps fauchées comme les blés. Tout juste peut-on retenir The Call (2013) avec Halle Berry, qui proposait un concept malin et La Fracture (2019) distribué sur Netflix sans grand bruit. Un petit sentiment de gâchis compte tenu des espoirs placés en lui… Alors le voir revenir aujourd’hui à l’horreur pure est aussi engageant que peu rassurant. Le casting du film intègre de jeunes comédiens débutants chargés, donc, de créer le malaise et la peur chez le spectateur, et est interprété par deux acteurs revenants des années 90/2000 : Michelle Monaghan et Skeet Ulrich. En tant que fan absolu de Scream (Wes Craven, 1996), ce qu’est l’auteur de ces lignes, la promesse de revoir l’éternel Billy Loomis est toujours alléchante ! Blood raconte les difficultés de Jess à s’occuper de ses deux enfants Tyler et Owen, ayant traversé quelques années de dépendance aux médicaments. En plein divorce, elle veut tout faire pour (se) prouver qu’elle est une mère à la hauteur, pouvant jongler entre sa vie personnelle et son travail d’infirmière. Un jour son fils Owen est mordu par son chien et commence à développer un appétit insatiable pour le sang frais humain. Jess, qui refuse d’en parler à son ex-mari, décide de se compromettre et de voler du sang à l’hôpital avant de franchir d’autres totems moraux…

Contre-plongée sur un enfant, dans la lumière un peu jaune de sa chambre, qui semble s'essuyer la bouche, les yeux grands ouverts ; plan issu du film Blood.

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On le voit, le scénario ne mise pas véritablement sur l’originalité et se pare de tous les clichés inhérents au sous-genre du film de maison isolée/enfant possédé. Rien de bien grave, du moment que le moment soit sympa ! Le problème majeur de Blood est que Brad Anderson oublie trop souvent de rendre son film un tant soit peu intéressant et prenant. Déjà que chaque action peut être anticipée quatre scènes avant, le manque d’enjeu – au-delà cette quête un peu simpliste de sang – rend le long-métrage très pénible à suivre ! On comprend très vite que rien n’arrêtera Jess dans sa volonté de protéger son fils, les limites légales et morales étant très vite franchies. Dès lors, que reste-t-il au film à raconter ? Eh bien plus grand-chose. Les questions relatives au divorce sont vite évacuées et la seule chose restant à conclure, c’est le sort réservé à Owen qui assez artificiellement devient tout à coup l’antagoniste lambda et WTF du film… En fait, les rares bonnes idées de départ – la cellule familiale resserrant l’intrigue au quasi huis clos, la lutte contre ses pulsions, franchir la ligne rouge, etc. – sont toutes résolues ou trahies après le premier tiers du récit. Blood tente alors de rendre divers hommages à plusieurs pans du cinéma d’horreur, en premier lieu, bien sûr, la figure du vampire, mais aussi celui du folk horror avec ce concept de cimetière indien tout droit sorti de Simetierre (Stephen King, 1983). Tout cela est soit survolé, soit bien trop caricatural pour surprendre encore. D’où le sentiment que le film s’abandonne en cours de route. Trop petit face à ses références, il préfère s’écrouler plutôt que de s’assumer.

Et ce n’est pas le casting qui y pourra quoi que ce soit… Le jeune Finlay Wojtak-Hissong fait bien ce qu’il peut avec ce rôle « à la Damien » mais la gêne l’emporte le plus souvent face à l’inquiétude. Peu aidé par la mise en scène et une direction artistique totalement impersonnelles, le comédien se débat mais emporte dans sa chute tout l’intérêt qu’aurait dû avoir Blood, à savoir faire flipper… Michelle Monaghan surnage légèrement dans son rôle de femme à bout, forte mais sur la corde raide. Très loin des abysses dans lesquelles plongeait en son temps Christian Bale pour The Machinist, elle propose un jeu assez sobre et solide pour rendre compréhensibles ses actions les plus sordides. Bon, le pauvre Skeet Ulrich devra lui se contenter finalement d’un caméo de luxe, car mise à part deux ou trois scènes, très répétitives, d’échanges procéduraux avec son ex-femme, ce n’est pas avec ce film qu’il pourra revenir sur le devant de la scène ! Comme pour The Call ou La Fracture, Brad Anderson livre donc une production complètement dénué de personnalité et vidé de toute ambition formelle et narrative. Plus sa filmographie avance et plus on se dit qu’il ne pourrait être, au final, que le réalisateur d’un seul film. Où est donc passé le talent du cinéaste qui fit perdre quarante kilos à Christian Bale et le traina dans des ténèbres magnifiquement angoissantes ? Rechercher désespérément la peur devant Blood, voire même juste un peu de la violence que suggérait le titre, c’est finalement l’énigme la plus inquiétante du long-métrage…


A propos de Kévin Robic

Kevin a décidé de ne plus se laver la main depuis qu’il lui a serré celle de son idole Martin Scorsese, un beau matin d’août 2010. Spectateur compulsif de nouveautés comme de vieux films, sa vie est rythmée autour de ces sessions de visionnage. Et de ses enfants, accessoirement. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/rNJuC

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