Les super-héros sont partout ! Depuis plus de dix ans, le box-office mondial ainsi que nos salles de cinéma sont envahies par les films Marvel. Hormis Warner/DC qui peine à faire front, il n’existe que très peu d’alternatives à ces deux “cinematic universe”. C’est dans ce contexte que James Gunn nous propose Brightburn, L’Enfant du mal. Une relecture horrifique de l’une des plus célèbres origin story d’un super-héros que le réalisateur de Horribilis (2006) et Les Gardiens de la Galaxie (2014) produit. Fais pas Genre ! se demande pour vous si Brightburn a ce qu’il faut pour être une vraie surprise ou bien une occasion ratée dans un genre (bientôt ?) à bout de souffle.
Les Origines du Mal
Le genre super-héroïque est partout et domine. Si une telle déclaration revient à enfoncer un très grand nombre de portes déjà ouvertes, difficile de nier que le genre semble souffrir d’un manque évident de diversité. Si M. Night Shyamalan nous a offert une lecture plus terre à terre du film de super-héros avec la trilogie formée par Incassable (2000), Split (2016) et Glass (2019) et que d’autres propositions, plus déjantées, lorgnant du côté de la parodie et porteur à quelques occasions d’une critique acerbe du genre comme Kick-Ass (Matthew Vaughn ,2010) ou encore Super (James Gunn, 2010) se sont distinguées, les propositions “différentes” restent assez restreintes. Sur un scénario de Brian et Mark Gunn, James Gunn et le réalisateur David Yarovesky – révélé par le film The Hive (2014) – nous propose une hybridation assez inhabituelle du genre ainsi qu’une relecture d’un des mythes fondateurs d’une des plus célèbres figures de la pop culture : Superman. Que se passerait-il si Superman arrivait sur Terre dans le but de nous détruire ? Si la question a déjà été abordée à de nombreuses reprises dans le comic book – entre autre via l’excellent Kingdom Come de Mark Waid, imaginant un Superman autoritaire qui use de la force pour imposer l’ordre ou bien Irrécupérable du même auteur, ou un ersatz de l’Homme d’Acier répondant au nom du Plutonien devient la plus grande menace pour la Terre et ses habitants après avoir été le plus grand héros – c’est la première fois que cette formule est mise en scène dans un film, se dévoilant aux spectateurs via un spectacle relativement efficace et parfois sanglant.
Brightburn commence par l’image d’un couple incarné par Elizabeth Banks et David Denman, amoureux, unis et cherchant à avoir un enfant… jusqu’à ce qu’un objet s’écrase dans la forêt avoisinante. Et puis plus rien. On retrouve la petite famille quelques années plus tard, heureuse et composée de trois membres désormais. On touche ici au premier problème du long-métrage. Gunn et Yarovesky décident de concentrer leur récit sur le jeune Brandon et son futur en tant que cauchemar de l’humanité, plutôt que sur l’arrivée de l’enfant et son éducation. Si on est en terrain connu et que quelques clichés ne peuvent être évités, c’est le rythme du film qui en prend un sacré coup, victime d’une certaine lenteur jusqu’à l’apparition des pouvoirs de Brandon et ses premiers méfaits. A partir de ce moment, le récit part dans un crescendo de violence, de destruction qui s’enchaîne jusqu’au final qui ne laisse que peu d’espoir. Si les personnages ne sont pas mal écrits, on reste néanmoins assez loin de l’exemplarité et plutôt dans une recherche d’efficacité. De nombreuses zones d’ombres demeurent même lorsque le générique défile sous nos yeux – quelle est l’étendue des pouvoirs de Brandon ? De sa soif de sang ? Le film laisse le sentiment qu’il a été partiellement pensé en vue de suites, comme si un nouvel univers étendu de films de super-héros, plus noir et porté sur l’horreur, attendait, tapis dans l’ombre. Face à cette version maléfique de Superman, rien n’est vraiment surprenant mais on peut saluer la grande maîtrise de Yarovesky à mettre en scène ce jeu de massacre avec un budget aussi faible. A travers une iconographie soignée et un vrai sens du gore (sans qu’il soit pour autant outrancier), le réalisateur parvient à générer un vrai souffle dans sa deuxième partie ; le récit évoluant à la même allure que la curiosité de Brandon pour l’anatomie. Yarovesky va jusqu’à reprendre les codes du slasher au détour d’une scène dans les bois ou lors d’une scène de rêve pour le moins énigmatique mais néanmoins assez belle. Sans être une œuvre révolutionnaire ou une vraie bouffée d’air frais pour le genre qu’il tente de dynamiter, Brightburn est un divertissement sympathique. Série B efficace et maîtrisée, le film offre une hybridation intéressante mais qui ne parvient malheureusement pas à faire décoller son concept.