Pour son quart de siècle, l’Étrange Festival choisit d’ouvrir les festivités avec Nekrotronic, le dernier délire des fréros geeks Roache-Turner, qui persévèrent dans le film de zombies. Départ sur des chapeaux de roue ou pétard mouillé pour cet étrange anniversaire ?
Démon Bidon
On les a connus à l’Étrange en 2014 avec Wyrmwood, ils reviennent cette année en l’honneur de la 25ème édition. Si on ne peut aisément les comparer à leurs confrères australiens Spierig (Undead, La Malédiction des Winchester), les frères Roache-Turner restent en terrain conquis avec leur second long-métrage Nekrotronic. Avec Kiah à la réalisation et Tristant au scénario et à la production, les frangins tentent de dépoussiérer le film de zombie en alliant un dérivé de Pokemon Go et des pactes démoniaques. Car oui, à présent les zombies (ou plutôt démons) se transmettent grâce à une application des plus infernales orchestrée par la diabolique Monica Bellucci. Le postulat de départ promettait sur le papier une production qu’on espérait barrée mais qui offre au final un résultat quelque peu raté.
L’histoire, on nous l’a ressassée à toutes les sauces : un élu, des démons à détruire, une équipe de pseudo-ghostbusters et en clou du spectacle, un gros démon méchant à détruire. Inutile de s’être gavés d’œuvres du genre pour deviner le dénouement de ce script en tout point téléphoné. Plus que dans son concept, c’est dans son scénario que l’objet trouve ses plus grandes tares : climax et dénouement convenus, héroïnes relayées au second plan au dépit d’un héros masculin insignifiant, sidekick plus lourd que drôle, etc. Mais plus que tout, c’est dans le fonctionnement du jeu vidéo que le flou demeure total. Rien n’est vraiment expliqué, et les quelques monologues faussement dramatiques nous embrouillent plus qu’ils ne clarifient le fonctionnement de cette application mortelle. On regrettera également le manque de tact des frères Roache-Turner, qui dégainent par centaines les références satanistes et les pentagrammes sans aucune raison valable.
Le long-métrage se rattrape néanmoins sur sa direction artistique et son univers visuel qui frôle l’imaginaire intra-gaming façon Tron (Steven Lisberger, 1982) ou Nerve (Henry Joost & Ariel Schulman, 2016). On appréciera en ce sens le détail porté aux décors et costumes, ainsi que le très sympathique final make-up sur la badass Tess Haubrich. Si Nekrotronic transpire d’amour pour un univers geek et référencé, il n’outrepasse jamais la simple fan attitude, ce qui pèse lourdement sur l’ensemble du métrage. On ajoutera le surjeu d’acteurs en roue libre plombés par des dialogues jetés au hasard, où même la sensuelle Monica Bellucci ne parvient pas à se détacher du cabotinage pour interpréter son rôle de mère démoniaque un peu trop colérique.
Les Roache-Turner avaient mis un peu de leur folie dans un Wyrmwood certes imparfait, mais qui n’augurait que du bon s’ils réussissaient à surpasser les codes qui plombaient ce premier essai. C’est un raté pour ce second effort aussitôt vu, aussitôt oublié. Que reste-t-il alors de cette ouverture d’anniversaire ? L’hommage émouvant au réalisateur et musicien Rosto, décédé au début de l’année, laissant pour dernière œuvre le court-métrage Reruns qui clôt sa The Wretchers Tetralogy. S’il laisse derrière lui de nombreux projets, son épouse devrait reprendre son travail pour la réalisation du séquel de son projet culte Le Monstre de Nix. Affaire à suivre de très près, faute d’être satisfait devant le film qu’il a précédé.