Après le succès de Shaun of The Dead, le cinéma d’horreur anglais a connu une seconde révolution avec plusieurs films qui abordaient l’horreur sous l’angle de la comédie. Sans être le meilleur film de Christopher Smith – ni le meilleur film que l’on vous présentera dans ce dossier – Severance est intéressant parce qu’il aborde les deux pans de la Brit Horror, et fait véritablement office de film de transition.
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Après un premier film instantanément culte (voir l’article sur Creep), Christopher Smith s’est imposé d’emblée comme l’un des jeunes réalisateurs anglais à suivre. Avec Severance, son deuxième film, il s’attaque cette fois à la comédie horrifique, bien inspiré par le succès planétaire de Shaun of the Dead d’Edgar Wright deux années plus tôt. Severance suit six employés d’une société de vente d’armes chargés de se rendre à un week-end paintball organisé par l’entreprise pour consolider l’esprit de groupe. Ils sont envoyés loin de leur Angleterre natale, plus à l’Est de l’Europe en Hongrie, dans une auberge au milieu des bois. Abandonnés par leur chauffeur, ils finiront la route à pied et s’installeront au milieu des bois dans un lieu bien austère qu’ils pensent être la fameuse auberge. Ils vont très vite se rendre compte qu’ils sont épiés, et que le week-end paintball va tourner au vinaigre.
Une maison austère perdue au milieu des bois, encerclée d’assaillants décidés à en découdre, on n’est pas très loin du scénario de Dog Soldiers, me direz-vous. En réalité, on n’est pas très loin du scénario de pas mal de films d’horreur. Dès le début de son film, Christopher Smith s’amuse avec les lieux communs du slasher : il remplace les habituels adolescents décérébrés par des adultes qui le sont tout autant. En choisissant de faire de ses personnages des employés en week-end de détente professionnelle, Smith s’offre la possibilité de s’amuser avec les clichés des différents personnages que l’on peut retrouver en entreprise. C’est un peu comme si les personnages de Caméra Café se retrouvaient à batailler sec dans un film gore. Mais voilà, le fait est qu’ils ne sont pas des employés de bureau chargés de la vente d’électroménager, mais bel et bien des concepteurs et vendeurs d’armes. Christopher Smith s’amuse alors à familiariser d’abord les spectateurs avec cette bande de sympathiques personnages avant de rappeler qu’après tout, si les soldats soviétiques dégénérés leur déquillent la gueule, qui plus est avec les armes qui sortent de leur usine, ils ne sont pas à plaindre. Le film porte donc un regard ricaneur sur le monde du travail tout en n’hésitant pas à tirer à boulets rouges sur l’industrie de l’armement.
Vous l’aurez compris, la première partie du film s’installe donc comme une comédie satirique et politique, une parodie de genre, avant de basculer brutalement vers un survival très gore et horrifique. Comme aime le dire Christopher Smith lui-même, Severance n’est pas une comédie horrifique à part entière, c’est plutôt un film d’horreur contaminé à petites doses par un humour grinçant. Le scénario brouille en fait les pistes, et par son basculement soudain d’un genre à l’autre, agrippe son spectateur à son siège avec efficacité. Sous ses aspects de prime abord parodique, le film se révèle donc particulièrement malin. Smith aborde au sein d’un seul film les deux pans majeurs du cinéma d’horreur britannique. D’une part, la comédie qui se joue du genre, et de l’autre le film d’horreur social.
Severance n’est donc peut-être pas le meilleur film de son réalisateur, mais est irrémédiablement important dans la chronologie de cette nouvelle vague du cinéma d’horreur anglais, tant il marque vraiment une transition naturelle. Après lui, des films tels que Eden Lake ou The Children choisiront définitivement de se débarrasser de l’humour ricaneur ou référencé omniprésent dans la plupart des films qui les ont précédés, et on peut clairement dire que Christopher Smith, dans la deuxième partie de son Severance, leur aura ouvert bien des portes.
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