« Je vous invite à revisiter un conte ». Voilà par quelle phrase débute le long métrage Maléfique. Premier degré, j’oublie tout le reste (enfin presque) et je me laisse divertir, car c’est là l’adjectif adéquat, par le film. Certains parlent de « géniale hérésie », moi je n’irai pas jusque là car ce n’est ni génial, ni hérétique.
Tout Conte fait
Pas hérétique, non, car le conte originel – celui de Perrault comme le très court des frères Grimm, issu, je le rappelle, de la culture orale – n’avait que servi de base pour le dessin animé de Walt Disney réalisé en 1959. Ce qu’il en reste, en fait, ce sont les fées – réduites au nombre de trois au lieu de douze chez Grimm et sept chez Perrault – le fuseau, le sommeil de cent ans… et bien sûr, la méchante fée. Dans la version de Perrault, cette même fée maléfique ne fut pas conviée car inaperçue depuis plus de cinquante ans donc tout le monde la pensait morte. Chez Grimm, treize à table ça porte malheur… Dans les deux cas, donc, elle n’était pas invitée, par oubli ou simple superstition ! Chez Disney, elle gagne en potentiel, la raison de sa non-invitation étant qu’elle est jugée foncièrement mauvaise – et qu’elle l’est ! Mais soit, l’hérésie concerne peut être la version de Disney et dans ce cas, oui… oui c’est hérétique, car Maléfique est LA méchante de Disney par excellence. La plus mauvaise sans aucun doute, car sa méchanceté est purement gratuite, là où les autres Disney villains ont pour la plupart des (mauvaises) raisons. Dans ce nouveau film, Maléfique devient… – attention spoiler car, contrairement à ce que nous vend la bande annonce – gentille ! De fait, le film n’est absolument pas noir, hormis quelques brèves scènes. Et d’ailleurs, au passage, depuis quand une gentille fée porte un prénom aussi peu encourageant ?
Étant une très grande fan de la série ABC d’Adam Horowitz, Once Upon A Time (2011-en cours) j’ai pris plaisir à retrouver des traits de scénario commun. Le baiser d’amour sincère salvateur, qui n’est pas donné par un prince. La méchante en fait gentille, etc., sont autant d’éléments scénaristiques qu’on aurait pu trouver dans la série. Si j’apprécie par ailleurs la réécriture des classiques, c’est que je prends beaucoup de plaisir à voir triompher l’antihéros et que j’ai appris, avec le temps, à ne plus être puriste. Alors oui, ce Maléfique est souvent niais, d’accord, mais comme j’aime beaucoup la guimauve en règle générale, vous me pardonnerez ma faiblesse. Passons aux bémols, ils sont nombreux. Même si la voix-off insiste dès la première minute sur la relecture du conte, on ne peut pas s’empêcher de comparer le film à la première adaptation signée Walt Disney et sortie en 1959. De ce point de vue, sans être puriste, on peut regretter quelques écarts. Pour exemple, une correspondance entre les prénoms des fées et d’Aurore elle même aurait été bienvenue. De même pour les quelques répliques qui ne respectent pas mot pour mot celles, devenues cultes, du dessin animé – ne pas entendre Maléfique conclure le début de son pitch par le fameux “et… la racaille !” m’a particulièrement peinée. De même, alors que j’attendais le dragon avec une certaine impatience – j’adore les dragons autant que la guimauve -, celui ci n’a eu que deux pauvres minutes et, pire encore, n’est pas une transformation de Maléfique elle même, mais de son corbeau !
Enfin, puisqu’il faut aussi dévoiler les points positifs, parlons justement de ce corbeau, qui est l’une des meilleures – peut être en fait la seule ? – bonne idée du film. Corbeau interprété avec une certaine justesse par Sam Riley, et qui devient dans cette relecture plus que le petit animal de compagnie de la méchante fée, mais plutôt son meilleur ami qu’elle transforme en humain la plupart du temps, ou bien en d’autres spécimens pour peu que ça lui rende service sur le moment. Autre point positif, les costumes, signés Anna B. Sheppard, qui sont parfaitement réussis. Voir Angelina Jolie incarner une Maléfique en pantalon de cuir est une image plutôt badass. L’actrice, d’ailleurs, est l’un des points positifs du film, elle incarne parfaitement la méchante fée mais ne mérite pas l’Oscar pour autant – soyons sérieux Internet – quant à la jeune Elle Fanning, elle perd de plus en plus de sa fraîcheur au fil de sa filmographie mais interprète une princesse mièvre bien comme il faut. Pour les autres personnages, ils sont malheureusement quasi inexistants. Dommage, car le roi Stéphane – le vrai Disney villain du film – interprété par Sharlto Copley (District 9), avait un bon potentiel de base. On passera sur les trois bonnes fées, elles sont affreuses, aussi bien dans leur comportement que dans leur physique même : grosse tête sur petit corps, l’effet est absolument raté et de surcroît ridicule.
Alors, même si je commence à être assez lassée des « relectures sur fond vert » à outrance des classiques au cinéma, et des petites bestioles à grosse tête – c’est exécrable mais généralisé depuis l’horrible Alice au pays des merveilles de Tim Burton – ce film a été plutôt une surprise, dans le bon comme dans le mauvais sens, mais au final, le principal défaut de Maléfique n’est-il pas d’être un film franchisé Disney ? On peut se questionner sur l’héritage et le bafouement du classique de 1959 mais aurait-on été aussi critique s’il avait été signé par un autre studio ?
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