Hangman


Un an avant de revoir sa figure dans les salles obscures à l’occasion du all-star movie que sera Once Upon a Time in Hollywood de Quentin Tarantino ou sur nos plus petits écrans pour The Irishman de Martin Scorsese – qui sort directement sur Netflix – un des plus grands parrains du cinéma, Al Pacino s’offre un retour de vétéran dans ce petit policier direct-to-dvd intitulé Hangman. Retour aux armes en bonne et due forme, ou navet impertinent se servant du visage d’un acteur en dilettante ? On vous donne notre avis.

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Marié ou pendu ?

Dirigé sous la houlette de Johnny Martin, ancien acteur troisième couteau devenu producteur/réalisateur de films conçus pour les marchés des DVD/Blu-Ray – son dernier, Vengeance, n’ayant a priori pas fait l’unanimité en mettant en scène un Nicolas Cage sur-coutumier des rôles de gunslayer sans cervelle – Hangman narre l’enquête de deux lieutenants de police et d’une journaliste, pris en tenailles par un serial-killer s’amusant à interpréter une version plutôt macabre du célèbre jeu du pendu. Images aux lumières tamisées, sourcils froncés et meurtres à la mise en scène gore – dont on notera d’ailleurs certaines originalités – tout y est pour nous emmener dans un polar choc aux atours assez lustrés. Un Karl Urban en flic propre sur lui mais à la psychologie incertaine, Al Pacino en vétéran désœuvré que la sortie de retraite revigore et une Brittany Snow en journaliste intriguée dont l’utilité n’est jamais vraiment démontrée tout au long du film. De quoi nous embarquer durant 98 minutes au plein coeur d’une enquête tellement patinante qu’elle n’aurait pas déplu à Phillipe Candeloro.

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Car bien malgré l’accumulation de preuves d’une évidence assez déconcertante, l’enquête de nos trois protagonistes ne prend malheureusement jamais le virage et la forme qu’on lui aurait prédits, l’idée de départ étant assez vite abandonnée. Lorgnant d’un peu trop près sur les traces d’un Seven (David Fincher, 1996) ou d’un Zodiac (David Fincher, 2007) le film ne parvient jamais à arriver à la cheville de ses aînés et le mystère sondé par la mise en scène ne décolle jamais vraiment. La faute surtout à des astuces tirées d’un chapeau de magicien et à des facilités scénaristiques assez consternantes qui ne parviennent jamais à prendre le spectateur au dépourvu – ce qui pourtant semble être l’objectif initial. Ce qui est d’autant plus dommage car certaines idées et ficelles en demeurent néanmoins assez intéressantes. Tout le parcours de nos enquêteurs se voit être cousu de fil blanc, et à la fin c’est à une belle pelote impossible à dénouer à laquelle nous avons le droit. Aucun doute n’est jamais posé quant à la participation du policier retraité – en la personne d’Al Pacino – à cette enquête, admis le fait que son matricule soit gravé sur un pupitre d’une scène de crime, et jamais sa participation – qui n’est pas la plus louable, jouant un vétéran assez pataud et à l’humour cynique, ayant seulement quelques petits éclairs lucidement inopinés – n’est remis en question par une hiérarchie inutilement autoritaire et cliché, bien qu’une femme commissaire et handicapée, il faut avouer que l’on n’en a pas vraiment l’habitude. On regrettera aussi que la seule activité du principal personnage féminin est d’être limitée à suivre naïvement et subir les événements sans jamais montrer un pouce d’intérêt dans le script – l’actrice l’avouera d’ailleurs elle-même dans l’interview bonus de cinq petites minutes du DVD, qu’elle a accepté le rôle surtout pour avoir l’opportunité de côtoyer Michael Corleone/Tony Montana.

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Bien que se serait mentir que de ne pas avouer que mes attentes autour de l’objet n’étaient pas particulièrement énormes, l’intérêt se vouait avant tout à la prestation d’Al Pacino. Et c’est bien là que la déception est la plus forte. Simplement, il n’apporte rien du tout au film, et l’acting de Karl Urban – que l’on connaît aujourd’hui pour ses prestations dans les nouveaux Star Trek (J.J Abrams, 2013, Justin Lin 2016) ainsi que pour ses rôles remarqués dans Les Chroniques de Riddick (David Twohy, 2004) ou encore du valeureux cavalier du Rohan Eomer dans deux films de la trilogie du Seigneur des Anneaux (Peter Jackson, 2002, 2003) – est beaucoup plus intéressant. Ce dernier étant celui ayant peut-être mis le plus d’entrain à incarner et croire en ce film, ces personnages et cette histoire. Pacino, malheureusement, ne se révèle que par son teint blafard et terne, ainsi que par son jeu livide et sans expression. A l’instar de son compagnon de route Robert de Niro à la carrière lui aussi très en berne ces dernières années, a-t-on véritablement aussi perdu le grand Al ? Dans les méandres des direct-to-dvd et autres productions disponibles uniquement sur le marché de la vidéo, l’ancienne gloire des films de mafia des années 70 semble bien loin de ses premiers faits d’armes. Mais cette histoire sera peut-être le sujet d’un billet d’humeur prochaine ? Pour en revenir au film de Johnny Martin – réalisateur que je ne suivrai certainement pas plus que ça, je vous l’avoue – si vous êtes en résumé un amateur de petites productions et de polars barbants, vous êtes le public ciblé. Pour les autres, et d’autant plus si vous êtes des fanatiques acharnés de Pacino, vous ne méritez certainement pas de vous infliger ça. 


A propos de Willys Carpentier

Son prénom n’est pas une référence cinéphile au Bruce que l’on connait tous, même s’il partage son nom avec son idole absolue, John. Sa passion pour le cinéma qui fait pas genre découle de celle qu’il a pour le Death Metal, elle fait peur et est pleine de saturation et d’hémoglobine et ce même si plus jeune, il ne décrochait pas de Peter Pan. Enfin, fait intéressant, il porte une haine sans égards pour Woody Allen.

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