Proposé à l’Etrange Festival 2016 dans le cadre d’un bel hommage rendu à Frank Henenlotter, revenons sur Basket case 2 qui était en soi un défi. Comment renouveler l’exploit du premier tout en renouvelant le propos ? Fais pas genre vous parle de cette suite étonnante mais également très cohérente sur l’évolution de l’étrange relation fraternelle entre Duane et Belial. Cette suite, originale, sexuellement déviante, de surcroit burlesque vous marquera à coup sûr !
Welcome to my freak house
Après Basket case (1982), Brain Damage (Elmer le remue méninge, 1989) et Frankenhooker (1990), Henenlotter continue, avec Basket case 2, d’exploiter des thématiques qui lui sont chères comme la monstruosité du corps, la sexualité, le tout sous une couche d’humour noir ! Si vous en doutiez, le film est bien une comédie horrifique, plus encore que l’original. Dès le début de Basket case 2, nous retrouvons Duane et son monstrueux frère siamois Belial exactement à la suite du premier film et ce qui aurait pu être un problème ne l’est pas pour Henenlotter puisqu’il choisit de faire tout bonnement revivre les deux personnages que nous pensions morts lors de leur chute. Eh bien non, tenez vous bien, ils se sont juste cogné la tête ! Soyons clairs, cette belle trouvaille prouve surtout qu’Henenlotter n’avait jamais pensé à une suite avant qu’un producteur ne la lui commande – par la société Shapiro Glickenhaus Entertainment.
Les frères Bradley sont donc transportés à l’hôpital et s’en échappent. Ces derniers sont reconnus coupables de la mort des médecins responsables de leur séparation génétique. Par conséquent, ils devront faire face à une surveillance accrue de la police et des médias. C’est dans cette atmosphère hostile que les deux frères seront recueillis par Granny Ruth – une vieille tante, amatrice exubérante de créatures difformes – et sa fille Susan dans une grande demeure qui sert de refuges aux monstres en tout genre, sorte de refuge paradisiaque des freaks ! Malheureusement pour eux, une journaliste ambitieuse et zélée va découvrir leur cachette. Face à cette menace, l’ensemble de la communauté n’aura d’autre choix que d’organiser une contre-attaque…
Huit ans après le premier film, Basket case 2 contraste véritablement avec son prédécesseur. Alors que le premier film était davantage centré sur le duo Belial-Duane et la dualité qui existe entre eux, le deuxième explore plutôt l’univers au sein de la communauté que découvrent les deux frères. D’ailleurs, contrairement au premier opus, dans cette suite, on observe la relation entre les deux frères se déliter, chacun osant vivre sa vie de manière indépendante sans compter sur l’autre. Basket case 2 se distingue aussi du côté underground et malsain de Basket case pour proposer quelque chose de beaucoup plus attirant et grand public. Enfin, l’atmosphère sanglante et sale du premier laissera place à une suite beaucoup plus grandguignolesque et comique avec un carnaval délirant de créatures. Ce qui est drôle d’ailleurs, ce n’est pas tant les monstres et leur particularités, c’est la place qui leur est donné par Tata Ruth et ce décalage avec la réalité qui se créé. Ainsi, vous pourrez en voir certains s’accoupler – Belial et sa fiancé morphologiquement semblable – d’autres préparer un barbecue… Difficile de garder son sérieux à la vue de ces créatures propulsées dans des scènes de la vie quotidienne. C’est comme s’ils étaient en colonie de vacances !
Pour confirmer cette impression, lors de sa présentation du film, Henenlotter de son propre aveu dira de lui même qu’il voulait faire quelque chose de très différent avec cette suite. Conscient du fait que, bien souvent, les suites de films sont davantage des remakes qu’autre chose, Henenlotter a choisi de transposer le parcours des deux frères dans un environnement complètement différent. En effet, nous sommes loin de l’hôtel miteux et de l’ambiance urbaine du premier film. Ici, esthétiquement, nous sommes plutôt du côté des films de la Hammer et du Freaks (1932) de Tod Browning. D’autres différences existent aussi sur le plan technique : finie la pellicule 16 millimètres, nous passons ici à du 35. Finalement, des eighties, nous sommes passés aux nineties avec toujours chez Henenlotter ce goût pour le système D. Peu de moyens mais beaucoup d’idées, voilà ce qui caractériserait l’ensemble de sa filmographie ! D’ailleurs, à ce sujet, Henenlotter dira qu’il avait une réelle envie d’intégrer les frères siamois à une communauté de freaks et qu’il ne pouvait pas imaginer tourner un film sur une communauté de freaks sans penser au film de Tod Browning. Pourtant, la différence entre Basket case 2 et Freaks est majeure. Aucun des monstres dans le film d’Henenlotter ne ressemble à des êtres humains qui ont l’air de souffrir comme dans Freaks. Ce sont des formes qui ne ressemblent en rien à ce qu’on ait déjà vu, et n’ont plus rien à voir avec quelque chose d’humain. De vrais monstres tels que les a toujours affectionné Henenlotter tout au long de sa carrière (Elmer dans Brain Damage ou encore la Frankenpute dans Frankenhooker). Le réalisateur dira s’être énormément inspiré de bandes-dessinés horrifiques – série d’Easy Comics – pour Basket case 2.
Le mérite reviendra également à Gabriel Bartalos, technicien aux effets spéciaux déjà à l’œuvre sur Brain Damage et Frankenhooker. Henenlotter le dira également : une bonne partie du budget a été consacrée au maquillage et aux effets spéciaux. Pour notre plus grand bonheur ! Bartalos composera une série de masques complètement déroutants pour chacun des freaks. Nous aurons le droit au freak en tête de demi-lune, le monstre-ver, le monstre-grenouille, celui à tête de rat, celui avec je-ne-sais combien de nez… Et vous n’en avez pas fini avec les présentations. Pour un peu, Belial passerai pour quelqu’un de tout à fait normal. Il serait bon de signaler que Basket case 2 a été tourné dans un entrepôt non loin d’un quai abandonné sur Manhattan dans un contexte très particulier puisque six semaines avant étaient tournés dans les mêmes lieux Frankenhooker ! Enfin, nous ne manquerons pas de préciser que les amateurs du cinéma de Frank Henenlotter ne sont pas en reste chez nous en France, puisque Carlotta a sorti quatre de ces films dont Basket Case et Frankenhooker dont nous vous avons déjà parlé, mais aussi les deux suites de Basket Case. Une bonne occasion pour redécouvrir – en blu-ray s’il vous plait ! – la filmographie du monsieur.
Pingback: Frank Henenlotter, le remue-méninge | Fais pas genre ! : Webzine sur le Cinéma de Genre