Rêves Productions – Saison 1


Avec Vice-versa (Pete Docter & Ronnie Del Carmen, 2015), Pixar nous a ébloui et ouvert la voie à une désormais saga. Saga agrémentée d’une suite, Vice-Versa 2 (Kelsey Mann, 2024), et de la série spin-off qui nous intéresse aujourd’hui – Rêves Productions (Mike Jones, depuis 2024) – et qui confirme, à nouveau, tout le bien que l’on pense du studio.

Un plateau de cinéma désert, dont seule un élément de décor, un faux paysage de montagnes aux couleurs fluo, est éclairé ; plan d'ensemble issu de la série d'animation de Pixar Rêves Productions - Saison 1.

© Disney Pixar

Dream Scenario

L'équipe de tournage de Rêves Productions, des petits êtres de couleur, sont sur le plateau et tout autour d'une boule dorée, tous émerveillés.

© Disney Pixar

Nous ne sommes pas dupes, les plateformes – en particulier Disney – mettent toujours le paquet lorsqu’il s’agit de capitaliser sur leurs propriétés intellectuelles, histoire de ne pas faire mourir inutilement un fruit dont on n’aurait pas pressé jusqu’à la dernière goutte. Nombres de franchises sont allées remplir les catalogues SVOD pour de mauvaises raisons et le public est de moins en moins candide devant tant d’opportunisme comme en témoignent les déroutes financières de quelques séries Marvel. Pourtant, à l’annonce d’un spin-off de Vice-versa, nous avons voulu croire en la capacité de Pixar à transcender un cahier des charges mercantile : le studio, même s’il n’a plus l’aura légendaire de ses quinze premières années, est toujours une valeur sûre et un gage de qualité voire de sincérité. De plus, l’idée de s’écarter des figures phares des deux longs-métrages, les émotions, et d’aller s’intéresser à la fabrique des rêves de Riley est excellente. Nous avions déjà croisé ces équipes de joyeux drilles, parodie revendiquée des studios hollywoodiens, quand Joie et Tristesse vadrouillaient, mais le format de la série propose un angle original. En effet, les quatre épisodes reprennent à leur compte le mockumentaire dont The Office (Ricky Gervais & Stephen Merchant, 2005-2013) semble être la référence principale.

Dans le monde de Vice-versa, les rêves sont scénarisés, tournés et diffusés par des équipes dédiées aux nuits de Riley. Les rêves les plus fameux deviennent aussi cultes que les films dans notre monde, et les cinéastes sont adulés ou rejetés par le studio. On suit donc une réalisatrice old school nommée Paula qui n’arrive plus à s’adapter au fait que Riley grandisse. Ses scénarios à base de licornes et de paillettes conviennent de moins en moins à l’adolescente en devenir. Alors Paula est mise en compétition avec d’autres jeunes réalisateur.ice.s… En alternant les séquences narratives, les passages où les personnages s’adressent à la caméra et les éléments de la vie de Riley, le tout en seulement quatre épisodes, la saison 1 de Rêves Productions prenait le risque d’un trop plein et d’un numéro d’équilibriste mal embarqué. Pourtant, pourvu que l’on connaisse et apprécie les codes de Vice-versa et que l’on aime les making-of de cinéma, la magie méta opère immédiatement : impossible de ne pas tomber sous le charme de Paula, de ses maladresses et de sa figure rassurante, et force est de reconnaitre que la série reprend avec précision tous les mécanismes d’un tournage et de l’industrie cinématographique. Mieux, la série déploie tout le savoir-faire du Pixar des bons jours pour nous faire vivre cette pastille rafraichissante.

Une ombre de monstre se dessine sur une petite fille effrayée dans la série d'animation Rêves Productions - Saison 1.

© Disney Pixar

Ainsi l’humour si caractéristique du studio à la lampe sautillante est bien présent et fonctionne toujours autant, tout en mêlant ce qu’il faut de gravité pour prolonger les affres de la croissance de Riley. Comme une extension des films et plus précisément de Vice-versa 2 qui abordait l’adolescence, Rêves Productions se veut aussi ludique que fidèle à cette étape ô combien importante dans la construction d’un individu. Si la question des rêves peut paraitre plus dérisoire que celle traitant des émotions, plus directement intelligible, la série prend le parti de rendre ces phases de songes nocturnes révélateurs d’un état d’esprit chez Riley et de là où elle se situe. Pas si anecdotiques donc, les rêves doivent illustrer, traduire et guider la jeune héroïne. Tant pis si cette saison 1 de Rêves Productions n’aborde pas, ou trop peu, les changements hormonaux et tout ce qui a trait au corps – élément crucial de l’adolescence qui sera peut-être approché dans un Vice-versa 3 déjà annoncé et qui pourrait prendre plus de temps et de profondeur pour ces questions – le plaisir côtoie toujours l’émotion chez Pixar, et les doubles lectures arrivent encore à s’adresser à toutes les couches de générations, peut-être même plus aux parents. Si elle ne pousse pas assez le bouchon pour cacher totalement sa fonction mercantile – quoique quelques tacles aux nababs hollywoodiens laissent penser que les showrunneurs croquent les têtes pensantes de chez Disney – Rêves Productions est un prolongement idéal pour perdurer le plaisir réflexif des deux films.


A propos de Kévin Robic

Kevin a décidé de ne plus se laver la main depuis qu’il lui a serré celle de son idole Martin Scorsese, un beau matin d’août 2010. Spectateur compulsif de nouveautés comme de vieux films, sa vie est rythmée autour de ces sessions de visionnage. Et de ses enfants, accessoirement. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/rNJuC

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

cinq × trois =

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.