Universal Soldier


Studio Canal sort un des films phares de la carrière de Jean-Claude Van Damne, et en Blu-Ray Ultra-HD. Critique du film de Roland Emmerich Universal Soldier, ersatz entre Terminator et une séance de psychanalyse post-traumatique.

L'Universal Soldier Luce Devereaux, joué par Jean-Claude Van Damne se remémore en pleine opération un trauma passé.

La Répétition

Aujourd’hui, Roland Emmerich fait plutôt rigoler. La décennie 2010 lui aura fait aligner les blockbusters pachydermiques à croutade (néologisme, ne cherchez pas votre Larousse de toute façon il sert de cale-pied au canapé) critique et aux résultats box-office pas aussi probants que sa période dorée. Parce que le bonhomme – ou le Herr devrais-je dire puisqu’il est allemand – a connu des années sur le toit du monde hollywoodien. L’auteur-réalisateur et auteur à part entière selon la définition initiale du cinéma d’auteur théorisée par nos sérieux Cahiers du Cinéma (en gros, un cinéaste qui choisit voire écrit ses sujets) a connu un succès mirobolant avec Independance Day (1996) ou encore Le Jour d’Après (2004) sur lesquels il est co-scénariste soit dit en passant. Comme beaucoup de réalisateurs de blockbusters, tout a commencé par la production indépendante, notamment auprès de la célèbre firme Carolco qui a produit des trucs mineurs dans la culture populaire tels que les trois premiers Rambo (1982-1988) ou Terminator 2 (James Cameron, 1991) sans oublier des projets plus sérieux et Oscarisés comme L’Échelle de Jacob (Adrian Lyne, 1990) ou le biopic Chaplin avec Iron Man (Richard Attenborough, 1992). Tout commence en particulier, pour Emmerich, avec le succès dantesque en salles – 100 millions de recette pour un budget riquiqui de 23 millions de dollars –  d’un actionner depuis devenu culte et que Studio Canal a eu la bonne idée de ré-éditer en haute définition, Universal Soldier (1992). Pour la petite histoire, c’est ce succès qui ouvrira grand les portes de Roland Emmerich aux comptes en banque de la Carolco pour tourner son nom moins culte Stargate, la porte des étoiles (1994)…

Vietnam, 1969, sous la pluie torrentielle de la jungle le soldat Luc Deveraux découvre horrifié un massacre de civils. Le responsable, c’est un de ses camarades d’armes, Andrew Scott, qui a pété un câble de paranoïa et de sadisme au point de collectionner les oreilles de Viet Cong pour s’en faire des colliers. Deveraux essaie de stopper la déraison de son acolyte, mais la confrontation tourne au drame et les deux hommes s’entre-tuent. Deux décennies plus tard, ils ont été récupérés par un projet clandestin de l’armée américaine et améliorés génétiquement pour devenir des Universal Soldier, soit des hommes de guerre aux capacités inhumaines en termes d’endurance, d’effort physique, de tolérance à la douleur. Programmés pour obéir à la faveur d’un sérum qui les rend amnésiques, c’est lors d’une mission de sauvetage d’otages que le passé va refaire surface et « réveiller » les Universal Soldier Deveraux et Scott, ainsi que leurs inimitiés… Universal Soldier est un rappel que même le blockbuster le plus musclé des 90’s prenait toujours moins le spectateur pour un con que tout le MCU, pour ne citer encore et toujours que lui. Si l’on peut émettre des réserves sur les emprunts à peine voilés à Terminator 2 – les Universal Soldier sont clairement des « robots » et la relation entre Deveraux joué par Van Damne et la journaliste joue sur les mêmes ressorts que ceux entre Schwarzy et John Connor dans le film de Cameron – après la réussite de ce dernier, on peut déjà noter le goût du spectacle qui ravira le spectateur amateur. Avec si peu de budget, l’inventivité et la rigueur de Roland Emmerich a bien fait vieillir le long-métrage dont les scènes de baston et d’action sont toujours convaincantes. Mais c’est surtout au niveau du scénario qu’Universal Soldier peut se targuer d’être un actionner avec un peu de fond de par sa façon de traiter le trauma de guerre : toutes proportions gardées, le scénario joue le jeu psychanalytique, en travaillant le motif du souvenir traumatique de la séquence inaugurale, le répétant de-ci de-là comme le circuit scientifique de la névrose,  jusqu’à une ultime répétition finale, la plus symétrique – femme innocente et victime, pluie… –  celle de la résolution pour le patient/protagoniste du film. Bien des blockbusters contemporains ne font pas même pas ce genre d’efforts, c’est à dire écrire un script qui veut dire quelque chose.

Studio Canal propose une édition très honnête, en Blu-Ray « normal » mais aussi en Ultra-HD pour ceux qui veulent du détail dans le détail. Donc évidemment inutile d’ajouter qu’on a jamais vu Universal Soldier dans ces conditions de restauration, ce qui pousserait un fan de Van Damne à acheter les yeux fermés et il aurait raison. Les bonus méritent par ailleurs le coup d’œil avec un making-of et deux featurettes d’un quart d’heure sur la production du film et l’itinéraire croisé des stars Dolph Lundgren et Jean-Claude Van Damne qui confient leur parcours face caméra (voir notre article Jean-Claude Van Damne l’insubmersible). On n’oublie pas l’artwork vintage qui fleure bon les 1990’s et on remercie Studio Canal de renouer une fibre nostalgique qui n’en finit plus d’être flattée.

 

 

 

 


A propos de Alexandre Santos

En parallèle d'écrire des scénarios et des pièces de théâtre, Alexandre prend aussi la plume pour dire du mal (et du bien parfois) de ce que font les autres. Considérant "Cannibal Holocaust", Annie Girardot et Yasujiro Ozu comme trois des plus beaux cadeaux offerts par les Dieux du Cinéma, il a un certain mal à avoir des goûts cohérents mais suit pour ça un traitement à l'Institut Gérard Jugnot de Jouy-le-Moutiers. Spécialiste des westerns et films noirs des années 50, il peut parfois surprendre son monde en défendant un cinéma "indéfendable" et trash. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/s2uTM

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