La fournée Universal Monsters chez Elephant Films se soutient toujours, et cette fois c’est avec une femme quelque peu poilue et virulente, She Wolf of London.
She-mâle
Comme tous les autres charmants monstres créés ou remis au goût du jour (du jour des années 30), le Loup-Garou, initialement porté à l’écran en 1941 par George Waggner avec le célèbre Lon Chaney dans le rôle-titre a eu plusieurs autres rejetons pondus par la Universal. Pas moins de quatre, exploitant tous le filon initial par des moyens à l’intégrité artistique contestable lorsque l’on songe à des bandes racoleuses comme Frankenstein rencontre le Loup-garou (Roy William Neill, 1943) ou Deux nigauds contre Frankenstein (Charles Barton, 1948). Elephant Films, parmi tous les autres titres de son imposante collection Universal Monsters que nous avons déjà chroniquée à plusieurs reprises, nous propose de découvrir aujourd’hui She-Wolf of London, sur lequel les traducteurs devaient être en pause-déj puisque c’est aussi sous ce titre-là qu’on le connaît dans l’Hexagone. Réalisé en 1946 par Jean Yarbrough, un touche-à-tout de seconde classe qui avait alors déjà plus d’une trentaine de tournages à son actif (!), She-Wolf of London est une petite déclinaison du mythe lycanthrope (ou pas, c’est ce que nous verrons tout à l’heure) qui remplit tout juste les 60 minutes dont elle est composée.
Phyllis Allenby est une jeune première assez favorisée par le porte-feuille familial qui s’apprête à se marier. Elle vit avec ce qu’elle appelle sa tante et la fille de cette dernière, une petite coloc dans un manoir cool et à l’ambiance chaleureuse au cœur de Londres…Mais à côté d’un parc où sont éviscérées, par ce que d’aucuns nomment un loup-garou, deux, trois personnes qui auraient mieux fait d’emprunter un autre itinéraire. Descendante d’une famille que la légende urbaine assimile à une malédiction de lycanthropie, Phyllis se persuade peu à peu que c’est peut-être elle le loup-garou féminin en question…Au risque de casser un début d’érection, je dois vous dire au plus tôt que c’est sur ce point précis que tout le film se construit : Phyllis est-elle ou non le loup-garou ? D’un esprit un peu whodunit, le scénario prend donc un malin plaisir à jouer sur les ellipses, sur qui rentre dans le parc ou en sort, et à masquer les attaques afin d’en savoir le moins possible mais d’avoir toujours un doute sur qui est ce virulent mammifère une fois la nuit tombée. Le bon côté, c’est que le film maintient bien ce suspense et sa bonne idée (en une heure de film, manquerait plus qu’on s’ennuie complètement) mais de manière quand même assez bavarde et répétitive, et aussi que c’est étonnant, une réelle surprise même si on s’attend à visionner un énième film estampillé Universal Monster. Le mauvais côté sautera aux yeux de tous ceux qui, à la base, pensaient quand même voir un film de loup-garou : on ne le voit pas beaucoup. Pas beaucoup du tout…Voire jamais. She-Wolf of London, malgré les promesses de son titre, n’est qu’un film à intrigue où l’argument fantastique ne semble que flotter, et n’être justement, qu’un argument.
L’habitué Jean-Pierre Dionnet nous offre en bonus d’une copie irréprochable (permettant d’apprécier la qualité formelle, bien qu’impersonnelle, du film) deux présentations : l’une sur le mythe du loup-garou, qui remonte sur les origines folkloriques puis littéraires du monstre, une analyse d’ailleurs un peu courte mais qui a le mérite de balancer quelques noms pour qui voudra creuser ; l’autre sur le film en lui-même, son réalisateur, et sur ses comédiens une bonne partie, sur lesquels le père Dionnet ne tarit pas d’éloges. Sinon pour ceux qui s’en foutent de se cultiver, ils peuvent juste regarder la bande-annonce originale et aller se coucher.