The Nice Guys 1


Actuellement présenté en hors compétition à Cannes, The Nice Guys, le dernier film de ce coquin de Shane Black est d’ores et déjà en projection dans nos salles depuis le 14 Mai. Et si ça ne tenait qu’à moi, il y aurait un tapis rouge dans chaque hall de cinéma pour vous y conduire et de la lave en fusion pour vous empêcher de vous en détourner.

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Nice guys finish first

Los Angeles, 1977, le footclan s’empare d’un nouveau mutagène mais les Tortues Ninjas ne comptent pas les laisser fai-attendez non je me suis trompé de fiches. Los Angeles 1977, donc, un dense brouillard jaune surplombe le ciel californien, la pollution ambiante fait passer les tetratonnes de marijuana avec lesquels se défoncent les hippies du coin pour une cargaison de cigarettes en chocolat. Libération des mœurs, sexe, violence, crime, le background idéal pour permettre à Shane Black de faire genre “non mais c’est pas DU TOUT Kiss Kiss Bang Bang 2 hein rien à voir j’vous jure” pendant qu’on y voit que du feu. Misty Mountains, une actrice pornographique renommée (rien à voir avec la chanson des nains dans Le Hobbit, malheureusement) meurt dans un accident de voiture. Ses dernières paroles n’ont rien à envier à un Charles Foster Kane des grands jours puisqu’elles ont ceci de mystérieux qu’elle les adresse à un enfant témoin de la scène : “Tu l’aimes ma grosses voiture ?”. Peu soucieux du développement psychologique de cet enfant de 11 ans qui aurait mieux aimé passer la nuit à reluquer pépouze les Playboy planqués sous le lit de son père, le film embraye sur l’introduction de Jackson Healy, un genre de péteur-de-gueules-à-gages qui 2a perdu sa femme et son fils quelque part en l’an -180. Russel Crowe incarne celui qui était alors habitué à “dissuader” des exs un peu trop collants lorsqu’il est sollicité par Amelia (Margaret Qually) pour intercepter quiconque enquête sur Misty Mountains.

Pas de bol c’est précisément ce qui a été demandé à un détective privé ressemblant à s’y méprendre au mec dans Drive. La particularité de ce détective, c’est qu’il est nul. Et pas nul dans le sens “un peu gaffeur mais il a un bon fond”, non, c’est l’incompétence à son summum, le père de tous les maladroits du monde. Une chose en entraînant une autre, mais sans pouvoir en deviner l’ordre, on ne s’étonne pas à ce qu’il aspire à devenir “détective privé de profession” pour sortir de sa précarité… Même si manifestement, la précarité en Amérique, c’est quand même habiter une baraque sur la colline avec sa fille. D’ailleurs, parlons de sa fille, puisqu’elle est le troisième personnage de ce duo naissant (j’aime les figures de style). Sa caractérisation est celle faite des enfants en général dans le film : malgré leur âge, ils ont tout vu et savent tout “de la vie d’adulte” à l’image de l’enfant de la première séquence. Ce qui est plaisant, c’est que du coup les enfants sont traités comme des personnages “matures”. On ne leur rabâche pas qu’ils sont trop jeunes, que “ceci n’est pas de leur âge” et leur traitement dans le scénario les inclut au même niveau que les personnages adultes. Cela se ressent dans les dialogues, les scènes d’enquête et d’action et cela témoigne d’une volonté des scénaristes (Shane Black et Anthony Bagarozzi) de donner leur meilleur de chaque personnage… Bon, à l’exception des personnages féminins et noirs, on est à Hollywood rappelez-vous. Bref, Holly (Angourie Rice) n’est pas seulement la fille du détective Holland March, elle agit comme son associée malgré elle, pas tant par amour du métier que parce que son père est un zéro.

Un mercenaire low-cost mais rôdé, un détective incompétent notoire, une fille de 13 ans qui fait ce qu’elle peut pour rattraper les gaffes de son père, j’appelle ça une combinaison gagnante. Tous les trois se retrouvent au cœur d’une enquête visant à retrouver Misty Mountains mais qui prendra (évidemment) des proportions inattendues. D’autres meurtres relanceront les soupçons, de nouveaux groupes se mêleront à l’intrigue, du cinéma pornographique au Ministère de la Justice, autrement dit une prise d’ampleur bienvenue et maîtrisée. Et puisque le cadre est solide, les conditions sont réunies pour qu’il ne nous reste qu’à nous délecter des dialogues succulents et de situations qu’on n’imaginerait pas exister dans un autre film que celui-ci. Ryan Gosling est d’une justesse incroyable dans le rôle du détective incapable, il aligne connerie sur connerie avec l’air le plus sérieux du monde et crée plus d’une fois l’embarras à cause de son incompétence sans que Shane Black ait le mauvais goût de prendre le public pour des idiots en insistant sur les gags. Le débit de répliques, de punchlines et d’actions s’écoule le plus naturellement du monde comme s’il avait fait ça toute sa vie… Oui je dis ça car Monsieur n’en est pas à son premier buddy movie, de L’Arme 1Fatale (Richard Donner, 1987) à Last Action Hero (John McTiernan, 1993) et l’inénarrable Kiss Kiss Bang Bang (Shane Black, 2005) on sait un peu comment ça fonctionne à force. Ici, le trio est parfait et le rythme du film ne s’essouffle pas à un seul instant contrairement aux films suscités. Ce n’est pas un reproche, mais force est d’admettre qu’aucun n’a su maintenir pendant toute sa durée le niveau atteint par The Nice Guys.

Le film repousse donc encore de quelques échelons le niveau des buddy movies, un grand 8 de scènes d’actions parfaitement chorégraphiées et de répliques absolument délicieuses, du bon gros film hollywoodien qui tâche et qui devrait donner l’exemple dans son traitement de l’humour. Comme tout film hollywoodien, une fois descendu du wagon on a encore le sourire en banane et ne restent que les scènes marquantes, les répliques les plus cinglantes, mais rien d’autre que ce qui nous a été montré. Je pense que j’aurais moins eu envie de reprocher au film de n’avoir “rien” à raconter, aucun propos à soutenir s’il ne prenait pas un malin plaisir à tourner en dérision les hippies ou ces personnages dénonçant la connivence dans le milieu juridique américain, la génération de réacs au pouvoir et les responsables de la pollution. C’est l’instant du film où je me suis demandé si c’était la direction que pouvait prendre le scénario, puisque les propos de ce personnage étaient justement avérés. Enfin j’imagine que si une quelconque critique des pouvoirs en place doit émerger et prendre de l’importance au cinéma, ce n’est pas de Hollywood que ça partira, et encore moins d’un buddy movie. Seulement, le film est un sans faute donc il n’y a pas vraiment de raison de lui reprocher de n’être “qu’une production hollywoodienne”, après tout, c’est quand même le film le plus drôle qui m’ait été présenté au cinéma depuis quelques années. Bref, vous l’aurez compris à ce stade, je vous recommande chaudement de foncer le voir. Et puis vous savez qui d’autre n’a jamais vu ce film ? Hitler. Alors bon.


A propos de Nicolas Dewit

Maître Pokémon depuis 1999, Nicolas est aussi champion de France du "Comme ta mère" discipline qu'il a lui même inventé. Né le même jour que Jean Rollin, il espère être sa réincarnation. On sait désormais de source sure , qu'il est l'homme qui a inspiré le personnage du Dresseur "Pêcheur Miguel" dans Pokemon Rouge. Son penchant pour les jeux vidéoludiques en fait un peu notre spécialiste des adaptations cinématographiques de cet art du pauvre, tout comme des animés japonaises pré-Jacques Chirac, sans vraiment assumer. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/rNYIu


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