Présenté au Festival de Gerardmer dans le cadre de sa fameuse Nuit Décalée, Zombeavers est ce genre de film dont l’on juge souvent la qualité au regard de l’incongruité de son pitch. Plus qu’un simple nanar, cette histoire de zombie castors (beavers en anglais) est avant tout un petit défouloir réalisé – et donc à voir – au second degré.
Père castor of the dead
Qu’on se le dise, il y’a de ces films dont la simple lecture du synopsis suffit à les placer dans la catégorie des navets. Et pourtant, dans bien des cas, si le film en possède en effet tous les ingrédients, le second degré évident avec lequel il est réalisé en fait plutôt des petites pochades un peu burlesques. Historiquement parlant, c’est surement chez Peter Jackson (Braindead, 1994) que l’on trouve ce plaisir à rigoler de l’absurdité des situations et de l’histoire en même temps que son réalisateur. Sur le papier, Zombeavers a tout d’une production de bas étage qui s’embourberait dans son intrigue en n’en assumant pas le ridicule. Et pourtant, ce qui lui donne son charme est justement qu’il joue la carte de la comédie d’horreur pendant une heure trente.
L’histoire commence comme 85% des films d’animaux tueurs et mutants, à savoir qu’un produit toxique est malencontreusement déversé dans le fleuve et que de pauvres petits castors en subissent les dommages collatéraux (ndlr : c’est d’ailleurs comme ça qu’est né l’auteur de cet article). Ce petit prologue, déjà grotesque, s’amuse à singer ce lieu commun du film d’animaux tueurs et se termine par un générique qui finit de nous convaincre que tout ce que nous allons voir n’est qu’une vaste blague. On retrouve par la suite d’autres ingrédients incontournables du film d’horreur : une bande de jeunes étudiants dépravés qui se retrouvent dans une baraque en bois au bord d’un lac. Manque de bol, dans le coin, un barrage de castors particulièrement énervés vont leur pourrir leur petit dimanche à la campagne.
La suite du film n’est donc qu’un enchaînement de séquences drôles, gores et ridicules, mettant en scène ces fameux castors zombies – des animatronics et/ou marionnettes rudimentaires rappelant les grandes heures du film d’animaux tueurs des années 80. Avec son humour graveleux, l’utilisation à de multiples reprises du point de vue sous-marin des castors, ses effets gores outranciers, et ce plaisir malsain à voir de jeunes américains se faire massacrer : le film rappelle, à bien des égards, le Piranhas 3D d’Alexandre Aja (2010) ou encore Killer Crocodile (Fabrizio de Angelis, 1989) dont nous vous avions déjà parlé dans un article.
On retrouve par ailleurs dans le film, une autre figure récurrente dans ce genre de film: le vieux roublard chasseur, ersatz d’Indiana Jones ou de Crocodile Dundee – au choix – qui, s’il n’arrive pas tout à fait aux chevilles du génial chasseur Joe de Killer Crocodile, réussit quand même à se placer assez haut dans le classement des chasseurs badass des films d’animaux tueurs. Le bonhomme débarque de on ne-sait-où pour aider les jeunes à lutter contre l’invasion castor, et leur expliquer qu’il y’a quelques années, la fièvre du castor avait touché la région, donnant la chiasse à tous les habitants aux alentours. Ses saillies sont tellement cultes qu’on finit même par se demander si le personnage n’est pas un hommage direct au mythique Joe précédemment cité. Découvrant que la ligne téléphonique de la maison a été sectionnée, il analyse la situation un instant avant de déclamer : « Les castors mangent des tas de putains de trucs, comme des troncs d’arbre et des branches, et même de l’herbe ou d’autres conneries du genre, alors… pourquoi pas des câbles électriques ! » ou encore de les insulter, fusil en main, de « putain d’enfoirés de gros poilus ».
Humour largement en dessous de la ceinture, à la limite du scatophile, le film dégage un vrai plaisir malsain à faire se côtoyer le sang et le cul. A ce titre, l’une des séquences les plus marquantes, commence comme une scène érotique et lesbienne, qui tourne au vinaigre quand l’une des deux filles, légèrement blessée par un castor quelques heures auparavant, se transforme littéralement en fille-castor. Ces monstres, hybrides d’hommes et de rongeurs, marque le summum du tournant what-the-fuck du film. Dans ce dernier élan, les scènes d’attaques succèdent aux séquences de transformations. En plein ébats sexuels – encore une fois – deux des protagonistes sont stoppés net par l’irruption soudaine d’une femme hybride castor qui sciera littéralement la branche du mec.
Alors bien sûr, comme toute les mauvaises blagues, Zombeavers s’essouffle sur la longueur. Fort heureusement, le film coupe court pile poil au moment où l’on commençait à trouver la blague un peu trop poussive. Et pour tous ceux qui en doutait encore, le bêtisier proposé au générique de fin est là pour nous convaincre que ce que l’on vient de voir n’était résolument pas à prendre au sérieux. Proposé par Zylo, le film est sorti directement en DVD et Bluray le 17 Février. Proposé avec sa version originale sous-titrée et une version française au doublage mythique – comme souvent pour ce genre de film – on y retrouve aussi quelques petits bonus dans les coulisses du film, présentant très (trop) brièvement la transformation par le maquillage d’un homme en zombeaver, ou le mécanisme de fabrication des animatronics des fameux castors tueurs. Le plus intéressant des bonus reste toutefois le making-of qui revient sur la fabrication de certaines séquences emblématiques, mais qui une fois encore, est beaucoup trop court !