Hôtel Transylvanie 3


Dans la grande fosse aux lions de l’animation, le studio Sony Pictures Animation peine toujours à se faire une place de choix. Aucun de leurs précédents films n’aura su marquer les esprits, contrairement aux films de Pixar et Dreamworks. Avec Hôtel Transylvanie, le studio tente de faire revivre le gratin de la Hammer dans une comédie animée déjantée. Raté.

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Ennui Mortel

Affirmer que les grands studios que sont Pixar et Dreamworks n’ont jamais été bousculés par de petits – le mot reste relatif – studios d’animation serait mentir. Quand les films sont bons, le public répond présent. La preuve avec son premier film d’animation, Moi, Moche et Méchant (2010) : le studio Universal a fait un carton mondial, frais, inventif, drôle. La recette du succès avait été effleurée de près par Sony Pictures Animation en 2009 avec le régressif Tempête de Boulettes Géantes qui ne manquait pas d’idées et de fun, mais pêchait par un manque scénaristique évident. Avec Hôtel Transylvanie, le studio ambitionne de ressusciter les monstres mythiques de la Hammer dans une comédie familiale animée, renforcée d’une pléiade de bons sentiments. En utilisant comme façade dans sa bande-annonce l’aspect gothique et terrifiants de ses personnages et l’humour noir et grinçant, le studio s’assurait de voir débarquer dans les salles la foule d’aficionados du cinéma de genre, filmsanimation.com-hotel-transylvanie07ou les trois gothiques du fond de la classe de 4èmeC de Madame Maboub, professeur d’Histoire au Collège Gaston Vasseur de Feuquières-en-Vimeu.

Le film nous raconte l’histoire du fameux Comte Dracula – il n’est pour une fois pas joué par Christopher Lee – qui pour préserver ses copains les monstres des terrifiants et violents humains, leur a créé un domaine particulier : l’Hôtel Transylvanie. Alors que sa jeune fille prénommée Mavis s’apprête à fêter son 118ème anniversaire et s’échapper enfin du joug surprotecteur de son père, tout tourne mal quand un humain facétieux, le jeune Jonathan, débarque dans l’hôtel et tombe sous le charme de la vampirette. Vous l’aurez compris, nous sommes bien loin de l’hommage décalés aux films d’horreurs de la Hammer, à peine dans la farce, et avant toute chose en plein dans une énième leçon de morale sur les différences. Aimons-nous différents. Faisons-nous confiance. Incapable d’assumer des références cinéphiles qu’il n’a apparemment pas, le réalisateur russe Genndy Tartakovsky (comme son nom l’indique, un Tarkovsky en plus tarte), préfère enchaîner des gags potaches d’une simplicité déconcertante avec des séquences d’émotion un brin emmerdantes. Certes, le film parvient parfois à quelques éclats visionnaires – la révélation sur le passé de Dracula, ou bien encore, la poursuite avec des tables volantes – mais tout est affaire de rythme, et sur ce créneau, Tartakovsky peine clairement à embarquer son spectateur durant une heure et demie. C’est d’autant plus dommage qu’on perçoit dans les choix d’animation, une réelle aptitude du bonhomme pour la 111chorégraphie des personnages. Il faut dire qu’il n’est pas non plus le dernier des mickey, on lui doit des séries d’animation cultes comme Le Laboratoire de Dexter, Samouraï Jack ou Clone Wars.

La faiblesse du film est donc clairement à chercher du côté de son scénario. Plutôt que de jouer sur les références cinématographiques et la parodie, le parti-pris est d’utiliser un maximum de personnages reconnaissables sans leur donner grande consistance. Frankenstein, La Momie, L’homme invisible, Quasimodo, le Loup-Garou, les Gremlins, le cyclope, la Mouche… – la galerie est deux fois plus grande mais je vous épargnerai une énumération plus longue par peur de vous perdre – tous sont présents dans des rôles de sidekicks sans aucune autre utilité scénaristique que leur simple présence à l’image ou quelques gags épisodiques. La faiblesse des personnages secondaires déteint fortement sur les personnages principaux, à commencer par celui du Comte Dracula, transformé en papa-poule protégeant son petit poussin de fille des affreux humains. Quant au couple d’amoureux transis, ils sont à la lisière de l’insupportable et dépassent plusieurs fois les limites du ridicule gnan-gnan que le bon sens moral se doit de cautionner. En bref, si sur le papier, les promesses pouvaient en de nombreux points nous faire espérer, ce Hôtel Transylvanie est une belle déception d’un ennui… mortel.


A propos de Joris Laquittant

Sorti diplômé du département Montage de la Fémis en 2017, Joris monte et réalise des films en parallèle de son activité de Rédacteur en Chef tyrannique sur Fais pas Genre (ou inversement). A noter aussi qu'il est éleveur d'un Mogwaï depuis 2021 et qu'il a été témoin du Rayon Bleu. Ses spécialités sont le cinéma de genre populaire des années 80/90 et tout spécialement la filmographie de Joe Dante, le cinéma de genre français et les films de monstres. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/sJxKY


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3 commentaires sur “Hôtel Transylvanie