Troisième épisode de la saga à succès du studio Sony Pictures Animation, Hôtel Transylvanie 3 : Des vacances monstrueuses a tenté de se faire une place cet été à côté du mastodonte Les Indestructibles 2. Malheureusement, le film de Genndy Tartakovsky est battu à plate couture.
La croisière s’amuse
L’été prend fin et on ne peut que s’attrister devant la pauvreté de ses propositions cinématographiques, même en animation. Pourtant période propice aux produits familiaux et à destination des plus jeunes (afin d’échapper à la chaleur des plages ou aux orages du mois d’août), la période estivale n’a vu débarquer dans les salles françaises que peu ou prou trois opus de franchises : Les Indestructibles 2 (Brad Bird) par les studios Pixar, Maya l’abeille 2 (Noel Cleary, Sergio Delfino et Alexs Stadermann) par la Paramount et enfin Hôtel Transylvanie 3 : des vacances monstrueuses chez Sony (précisons pour leur rendre honneur les sorties plus confidentielles d’animation asiatique d’Happiness Road de Hsin-Yin Sung et Silent Voice de Naoko Yamada).
Si on n’avait déjà pas beaucoup apprécié le premier film de la série Hôtel Transylvanie (Genndy Tartakovsky, 2012), le troisième rebute tout autant. On peut imaginer toute la difficulté de produire et réaliser un énième volet d’une saga à succès : jongler entre le renouveau et la surprise tout en conservant l’identité des premiers épisodes relève parfois de la quadrature du cercle sur laquelle bon nombre d’équipes ont butée. Rappelez-vous, pêle-mêle, vos réactions horrifiées devant Shrek le troisième (Chris Miller et Raman Hui, 2007), L’Âge de glace 3 : Le Temps des dinosaures (Carlos Saldanha, 2009), Le Roi Lion 3 : Hakuna Matata (Bradley Raymond, 2004), Cars 3 (Brian Fee, 2017), Moi, moche et méchant 3 (Pierre Coffin et Kyle Balda, 2017)… Sans compter Dragons 3 : Le Monde caché de Dean DeBlois, prévu pour février 2019, dont la bande-annonce a dû en faire frémir plus d’un !*
Las de résider dans un hôtel étrange, dans lequel les personnages et les animateurs semblent s’ennuyer, l’idée de ce troisième opus de la saga faussement horrifique est de déplacer l’action à bord d’une croisière de vacances pour monstres surmenés, afin de changer d’air et renouveler un peu les décors. Le prétexte est simple : la fille de Dracula souhaite changer les idées de son père célibataire en l’emmenant pour des vacances familiales. À bord, il aura le coup de foudre pour la capitaine du navire, Erika, qui n’est autre que la descendante de la famille Van Helsing, qui a juré la perte de Dracula. Vous voyez venir la suite…La croisière s’amuse, mais elle s’use surtout rapidement. Elle s’avère être monstrueuse, non pas parce que l’idée scénaristique permet de faire défiler tout un bestiaire de monstres et de nouveaux personnages avec trop peu d’aspérités (même tendance regrettable à signaler du côté des Indestructibles 2) mais parce que le spectateur s’enfonce petit à petit dans une paresse imaginative qui désole. Les seuls éclats de rire entendus dans la salle viendront d’une réplique douteuse : « Il est trop mignon ton prout ! »… L’humour scatophile a de beaux jours devant lui.
Erika retourne sa veste aussi rapidement qu’une girouette tourne au gré du vent, lors d’un climax qui tente de parodier les scènes finales musicales dégoulinant de bons sentiments mais se prend les pieds dans le tapis et en devient ridicule. Le méchant n’était finalement pas si méchant que ça, tout le monde est content et rentre bien sagement à la maison. On a vu plus novateur et surtout plus crédible. Restent les multiples personnages qui viennent de temps à autre faire leur numéro au travers de gags visuels inégaux, mais dont on peut louer l’effort d’inventivité. C’est sûrement cela qui a intéressé Genndy Tartakovsky dans cet opus dont il ne voulait pas au départ : un jeu de pure animation, héritée du cartoon d’avant-guerre et de ses invraisemblances physiques. Ça tombe, ça se cogne, ça rentre en collision, ça s’évite, ça danse… On est loin du réalisme animé à la Pixar ou de l’élégance des mouvements des premiers Disney. Ici, les stewards Gremlins sont à mourir de rire le temps d’une scène et les parents-loups accompagnés de leur meute de louveteaux méritent le détour. C’est ainsi que la démarche dansante de Dracula sur le ponton du navire, qui s’étire au point de devenir une parenthèse dans le film, est une manière de montrer le désintérêt des créateurs de l’histoire au profit de mouvements animés quasi-abstraits, pour la beauté du geste. Les amateurs sensibles à l’animation apprécieront. Mais pas sûr que cela intéresse les autres…
*Saluons cependant le magnifique Toy Story 3 (Lee Unkrich, 2010), dont on peut dire qu’il est l’exception qui confirme la règle.
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