Music by John Williams


Il aura fallu du temps pour que John Williams, l’illustre compositeur hollywoodien, ait le droit à son documentaire consacré. C’est aujourd’hui chose faite avec Music by John Williams (Laurent Bouzereau, 2024), disponible sur Disney+ depuis le 1er novembre, qui risque de surprendre et d’émouvoir, même les plus calés sur l’immense carrière du maestro !

John Williams baguette de chef d'orchestre à la main, vu de profil, en noir et blanc, pour le documentaire Music by John Williams.

© Tous Droits Réservés

The Imperial Maestro

John Williams et Steven Spielberg dans les années 70, à une soirée.

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Qu’il est cocasse de constater que parmi les meilleures productions LucasFilm depuis le rachat par Disney se trouvent deux documentaires sur les coulisses de l’œuvre ou sur les collaborateurs les plus importants de la saga. On avait déjà adoré la série-doc Light & Magic (Lawrence Kasdan, 2022) qui revenait sur les origines d’ILM. Puis dans le marasme des déconvenues diverses – Star Wars : L’Ascension de Skywalker (J.J. Abrams, 2019) a mis du plomb dans l’aile de la franchise au cinéma – et le calendrier délirant des séries Star Wars, la compagnie fondée par George Lucas prend le temps de produire un documentaire réjouissant sur l’un des artisans les plus déterminants du cinéma : John Williams. C’est un lieu commun de dire que le compositeur a fait naître parmi les thèmes musicaux les plus emblématiques du septième art, mais tout de même, qu’il est bon de rappeler Les Dents de la mer (Steven Spielberg, 1975), Les Aventuriers de l’Arche perdue (S. Spielberg, 1981), E.T. L’Extraterrestre (S. Spielberg, 1982), Jurassic Park (S. Spielberg, 1993), Harry Potter à l’école des sorciers (Chris Columbus, 2001) et bien d’autres… Tant de morceaux de bravoure auditifs, souvent pour Spielberg donc, qui nous ramènent forcément à un endroit précis de notre enfance.

Le documentaire de Laurent Bouzereau joue habilement sur l’idée que l’on a tous de John Williams, celle d’un honorable musicien de génie au sens aigu de la composition orchestrale. Mais le réalisateur revient sur le parcours de Williams en montrant aussi comment, dans un milieu hautement musical, il acquiert un savoir infini sur le jazz. Oui le jazz. Nous l’avions oublié, mais le compositeur, avant sa première partition pour Daddy-O (Lou Place, 1958) et 48 nominations aux Oscars, était un jazzman respecté. Il suffit de réécouter – et le documentaire a l’intelligence de les mettre en parallèle – le thème d’ouverture d’Arrête-moi si tu peux (Steven Spielberg, 2002) pour s’en rappeler ! Sans langue de bois, John Williams revient également sur sa prise de fonction mouvementée comme chef d’orchestre du Boston Pops Orchestra qui a révélé en creux les tensions entre différents milieux : celui, élitiste, de la musique classique et celui, plus populaire, du cinéma d’où venait le compositeur. En définitive, on comprend comment, au bout de 72 ans de carrière, il a réussi à faire consensus dans la profession, réconciliant tous les mondes musicaux. C’est brillamment illustré par Music by John Williams qui, grâce aux différents interlocuteurs – de Thomas et David Newman à Itzhak Perlman, en passant par Alan Silvestri – arrive à rendre ludique le récit de ce long parcours.

Scène de Music by John Williams où le compositeur dirige une session d'enregistrement en studio, baguette à la main.

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Alors le documentaire n’évite pas quelques écueils puisque nous avons le droit aux légendaires anecdotes que Spielberg aime raconter avec la gourmandise d’un grand-père narrant ses vieux exploits. La présentation du thème des Dents de la mer par Williams au réalisateur est archi connue et le discours est bien rôdé, toutefois malgré ses quelques petits défauts et une réalisation un poil trop attendue, entre interviews récentes et images d’archives, le travail de Laurent Bouzereau a le mérite d’être d’une sincérité à toute épreuve et exhaustif – même si on aurait aimé qu’il traite davantage des années 2000 où le compositeur avait beaucoup expérimenté, de la prélogie Star Wars (George Lucas, 1999-2005) à Minority Report (Steven Spielberg, 2002). Les intervenants sortent tout de même parfois des sentiers battus car on sent une vraie sincérité quand les souvenirs remontent à la mémoire : Kate Capshaw ne peut, par exemple, se retenir de verser une larme en repensant aux notes de La Liste de Schindler (S. Spielberg, 1993), John Williams évoque sans détour la mort de son épouse dans les années 70, et même le mono expressif George Lucas fend l’armure… Il faut préciser que Laurent Bouzereau n’est pas le premier venu. On doit au français certains des meilleurs documentaires présents sur les DVD de grands classiques, consacrés à Taxi Driver (Martin Scorsese, 1976) ou aux Oiseaux (Alfred Hitchcock, 1963), et qu’il connait sur le bout des doigts la galaxie spielbergienne pour avoir couvert quasiment toutes les sorties vidéos du grands Steven. On retrouve ici le même amour communicatif pour les personnes qu’il filme, en premier lieu John Williams, qui, à bientôt quatre-vingt-treize ans, nous rappelle avec émotion que sans ses notes, tous les films de notre enfance n’auraient pas eu la même saveur…


A propos de Kévin Robic

Kevin a décidé de ne plus se laver la main depuis qu’il lui a serré celle de son idole Martin Scorsese, un beau matin d’août 2010. Spectateur compulsif de nouveautés comme de vieux films, sa vie est rythmée autour de ces sessions de visionnage. Et de ses enfants, accessoirement. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/rNJuC

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