Film-concept entre teen movie et horreur-scifi, Starfish (A.T White, 2019) débarque en exclusivité française sur la plateforme Shadowz : nous avons pu nous y plonger avant tout le monde.
Plus hybride, tu meurs
Les synopsis du film sur internet ne lui font pas justice, certainement par peur de trop en révéler. Les critiques quant à elles – principalement américaines – gâchent l’effet de surprise en spoilant sans préavis. Ici chez Fais Pas Genre ! on va tenter de vous expliquer pourquoi vous devriez donner une petite chance à Starfish (A.T White, 2019) même si le film présente quelques lacunes. Le premier long-métrage du réalisateur-scénariste-compositeur anglais A.T. White met en scène presque toujours seule à l’écran l’impressionnante Virginia Gardner – déjà vue dans le dernier Halloween (David Gordon Green, 2018) – dans le rôle d’Aubrey qui pleure la mort de sa meilleure amie Grace. Après l’enterrement, Aubrey décide de passer la nuit dans l’appartement de Grace. Le début du récit s’étire ainsi sur les moindres recoins de l’appartement qu’Aubrey explore nostalgiquement, une séquence peut-être un peu trop longue mais qui met en place le thème principal que le cinéaste va travailler : le deuil. On pourrait penser que le métrage va donc prendre la direction d’un teen movie mélodramatique où la jeune fille se remémore à coups de flashbacks les bons et mauvais moments passés avec son amie défunte, mais Starfish prend un tournant inattendu quand Aubrey se réveille et découvre la ville en mode post-apocalypse, neige à perte de vue mais personne à l’horizon. Aubrey comprend ensuite que Grace était au courant de cette apocalypse à venir et qu’elle lui a même confié la mission de sauver le monde à travers des indices éparpillés aux quatre coins de la ville.
La force de l’objet n’est pas son scénario. Les incohérences soulèvent un nombre incalculable de questions et l’intrigue part littéralement dans tous les sens – d’où le terme utilisé plus haut de film-concept. Si la comparaison avec des séries comme Stranger Things (2016 – en production) ou 13 Reasons Why (2017-2020) est inévitable, le film s’apparente plutôt à un slow-burn à la manière de It Comes at Night (Trey Edward Shults, 2017) où quelques moments d’horreur ponctuent un mélodrame sur les rapports humains. Starfish est la définition même de l’hybridité, on y trouve autant de l’horreur que de la science-fiction, du survival post-apocalyptique, du teen movie, du drame humain et même de l’animation. Cet éclectisme de genres et de styles laisserait penser que le long-métrage peut tenir en haleine, ce qui n’est « malheureusement » pas le cas. On a plutôt affaire à un film d’art/film d’auteur qui mise tout sur l’esthétique – la cinématographie est à couper le souffle, on l’avoue – et surtout centré sur l’étude de caractère au détriment d’une narration suffisamment solide pour conquérir un public plus large. Le film semble très, très, très long, au point de penser qu’il aurait peut-être pu faire un excellent court-métrage mais que laisser durer cette ambiance introspective sur 1h40 risque de perdre pas mal de spectateurs en cours de chemin.
Pour réellement apprécier Starfish, il est préférable d’opter pour la contemplation plutôt que la quête d’action. Chaque plan est tout simplement beau, que ce soit le cadre, le ton, la lumière, tout est intelligemment calculé pour faire du métrage un objet de réflexion. La musique originale composée par le réalisateur lui-même et les titres indies de la bande son finissent de compléter cette ambiance aérienne où il suffit de se laisser flotter, à la manière d’Aubrey qui, malgré sa mission pressante, prend le temps de réfléchir à sa place dans le monde maintenant qu’elle fait face à la solitude la plus profonde. Le film a fait un flop monumental au box-office américain, mais s’est fait remarquer dans divers festivals internationaux, dont le Fantastic Fest d’Austin au Texas ou le Festival international du cinéma fantastique de Sitges en Espagne. Espérons que Starfish saura trouver son public en France car, malgré son scénario rocambolesque, c’est indéniablement une expérience à part entière.