Toujours prompt à dénicher des raretés, Elephant Films conclut son édition pionnière de la série Les Monstres (1964-1966) avec deux coffrets : l’un regroupant l’intégralité de la saison 2, l’autre proposant des inédits en nombre, dont deux adaptations longue durée. Notre avis séduit par un travail éditorial exemplaire.
La mode des reboots
Je vous avais déjà parlé de cette série inconnue en France, concurrente de La Famille Addams outre-Atlantique qui, si elle n’a pas rencontré un succès d’audience assez durable (deux ans de diffusion), a fortement imprégné la culture populaire US. Elephant Films avait, dans sa politique salutaire de dénicher des raretés, sorti la saison 1 des Monstres permettant à l’Hexagone de jouir à domicile (la phrase porte à confusion et j’en suis fier) de cette très sympathique sitcom jouant sur les mêmes ressorts que les Addams, sans des personnages originaux mais une tite famille directement héritée du catalogue Universal Monsters (Dracula, Frankenstein, le Loup-Garou etc). C’est en cette rentrée l’heure de clôturer la série avec deux coffrets de l’éditeur : le premier, proposant la saison 2 en intégralité. Toujours aussi attachante, délicieusement rétro, cette saison 2 est dans la droite lignée de la précédente, mais marque déjà des signes d’essoufflement comiques, comme la reprise de gags déjà vus ou entendus. Certains épisodes se permettent une satire de la Guerre Froide étonnante dans l’esprit du show mais la fraîcheur s’est un peu estompée et on peut comprendre le spectateur de l’époque qui a dû avoir l’impression de revoir la première saison (c’est le même cas pour les saisons 2 et 3 de la série originale Star Trek, certainement la faute au système de la construction en série bouclée, soit une histoire par épisode, les épisodes indépendants les uns des autres et aucun arc narratif étalé sur toute une saison).
Pas dupe sur la qualité objective de cette saison 2, Elephant Films propose un second coffret comme une cerise sur le gâteau qui donne autant envie que le gâteau. En effet, il regroupe tout d’abord des suppléments fabuleux pour découvrir l’histoire de la série : des documentaires sur chacun des trois acteurs principaux (Yvonne de Carlo, Al Lewis, Fred Gwynne), un sur la série elle-même, avec des interviews des comédiens et autres parties-prenantes. Diffusés à la télévision américaine, ces documents ont le sacré mérite de nous en apprendre non seulement sur Les Monstres, mais sont aussi des tranches de vie liées au système qu’était la télévision des 60’s, à la célébrité, à l’enfermement dans un seul rôle pour toute une vie pour les acteurs…Une aubaine pour une sitcom aussi peu connue en France. Dans le même esprit, et là on applaudit carrément pour le travail éditorial, Elephant est allé nous dénicher deux des adaptations longue durée : le long-métrage cinéma Munsters, go home ! tourné en 1966, échec en salles (et on peut le comprendre, tant l’objet n’est qu’une espèce de long épisode filmé comme à la télévision, au moins le dynamisme propre au show est présent) et le téléfilm The Munster’s Revenge diffusé en 1981 dans le but de raviver la franchise sauf que les acteurs ont pris vingt ans dans les dents, et que de curieux choix de montage (très peu de musique) plombent le dynamisme. Reste que ces deux longues adaptations sont des incontournables pour les amateurs des Monstres et une façon inouïe de voir ces inédits !
La vision de The Munster’s Revenge permet de faire un peu le lien (même si Elephant s’est visiblement mis comme objectif de sortir l’intégralité des Monstres uniquement avec les acteurs originels) avec l’avenir de la série, pas éteint. Figure importante de la télé américaine consolidée par un merchandising en continu depuis 1964, la sitcom n’a pas cessé de titiller les velléités des producteurs jusqu’à créer un curieux itinéraire de reboots. En 1973, un pilote de série animée avait déjà vu le jour (ils ont fait idem pour Star Trek à peu près à la même époque, décidément !) The Mini-Munsters, sans aller plus loin. Par contre en 1988, une nouvelle série est lancée avec un changement de casting, Les nouveaux Monstres arrivent et tient quand même trois ans à l’antenne…Mais ce n’est même pas tout puisque deux téléfilms, avec un casting changé à chaque fois, seront également diffusés durant la décennie 90…Mais ce n’est toujours pas tout, puisque Bryan Fuller (Dead Like Me, mais aussi scénariste de…Star Trek : Deep Space Nine et Star Trek : Voyager, on arrête plus les coïncidences) a en 2012 fait le pari fou de rebooter la série en mode plus sérieux avec Mockinbird Lane, restée elle aussi à l’étape du pilote non retenu. Signe que Les Monstres continent de chatouiller, NBC a annoncé en août 2017 qu’une nouvelle version serait en développement…Quelqu’un a dit originalité ?