Plutôt que de vous parler d’un remake qui ne mérite pas qu’on lui consacre plus qu’une micro-critique sur Vodkaster, on a décidé de remonter le temps et de vous parler du premier film adapté de la série-télévisée so-90’s : Mighty Morphin Power Rangers.
C’était mieux avant
Je dois bien vous l’avouer, j’avais normalement à charge de vous parler du fabuleux remake cinématographique de la saga Power Rangers, mais comme le film est pas tout à fait fabuleux, au mieux dispensable, au pire franchement dégueulasse, je suis ressorti de la salle un peu embêté. Non pas que nous ayons particulièrement l’habitude de ne parler que des films que l’on a adoré – parcourir de clic en clic nos pages devrait suffire à vous en convaincre – mais l’optique de dézinguer une franchise qui a fait mon enfance ne m’enchantait pas plus que ça. Une chose est sûre, si j’avais quand même décidé de tirer à boulet rouge dans une ribambelle de paragraphe sur cet odieux remake, cela aurait été pour vous rappeler ô combien le premier film sorti en 1995 était bien mieux réussi. Alors, au risque de jouer à nouveau la carte du vieux con, qui ne fait que dire que « c’était mieux avant », autant assumer pleinement et vous parler directement de ce film qui, entre autres, a fait mon enfance.
On a tous quelques films fétiches hérités de l’enfance, des films qui ne sont pas forcément des chefs-d’oeuvres mais qu’on chérit plus que tout parce qu’on les a plus vus que les autres, dont on a usé la VHS plus que de raison à la rembobiner des dizaines voire des centaines de fois. Dans mon panthéon personnel, cohabitent Gremlins (Joe Dante, 1984), Chérie j’ai rétréci les gosses (Joe Johnston, 1989), Jurassic Park (Steven Spielberg, 1993) comme tout le monde, Le Livre de la Jungle (Stephen Sommers, 1995), Jumanji (Joe Johnston, 1996) et le trop méconnu Dinosaures (Adventures in Dinosaur City, Brett Thompson, 1992). Enfin, vous l’aurez compris, le premier film adapté de la série télévisée à succès international Power Rangers, sobrement intitulé Power Rangers, le film (Bryan Spicer, 1995) tient sûrement le haut du pavé. Franchise créée par le producteur américano-israëlien Haim Saban – producteur de séries cultes comme Alf (1987) il est aussi connu pour être le compositeur d’une grande partie des chansons de générique de dessins animés et séries tout aussi cultes des années 80 et 90 telles que Inspecteur Gadget (1983), Les Maîtres de l’Univers (1983), Les Minipouss (1983) ou encore Les Mystérieuses Cités d’Or (1982) – et largement inspirée des nombreuses séries japonaises que l’on nomme communément les super sentais dont Bioman (1987), certainement la plus connue chez nous. Je vous entends chantonner dans vos têtes les génériques, arrêtez tout de suite. Merci.
Plutôt que d’importer l’une des séries japonaises sur les territoires américains et européens, Saban a l’idée géniale de racheter à la Toei les droits de trois d’entre elles – connues au Japon sous les noms Kyoryu Sentai Zyuranger, Gosei Sentai Dairanger et Ninja Sentai Kakuranger – et fait retourner toutes les séquences dans lesquelles les Rangers ne sont pas en armure avec des acteurs américains. Les frais de production de la série sont donc largement abaissés dès lors que la majeure partie des séquences – les scènes de combats, notamment avec les robots géants – sont récupérées directement dans les épisodes de la série japonaise. Si aujourd’hui la série-télévisée continue d’exister et en est déjà à sa vingt-troisième saison – ce qui signifie plus de 830 épisodes à ce jour – les bifurcations scénaristiques et le souhait parfois ridicule des producteurs de vouloir continuellement rénover cette franchise ont largement épuisé son concept – malgré tout un tas de variantes avec des Power Rangers samouraïs, des Power Rangers aliens, des Power Rangers aliens samouraïs, des Power Rangers de la jungle, des Power Rangers aliens samouraïs de la jungle, et j’en passe… – si bien que seuls les vrais savent que les trois premières saisons de l’arc narratif Mighty Morphin (1993-1996) mérite le coup d’œil. Le film dont il est question ici, surfe donc sur le succès phénoménal des trois premières saisons de la série télévisée que la nouvelle adaptation adapte par ailleurs et que vous pouvez revoir sur Netflix s’il vous en (re)vient l’envie.
On y retrouve donc la quasi-totalité du casting et les Rangers stars du petit écran que sont Rocky le beau gosse du lycée qui est le Ranger rouge, Adam le Ranger noir la caution asiatique du casting, Billy l’intello aux lunettes qui est le Ranger bleu, Aisha la Ranger jaune caution minorité noire, Kimberley qui comme son nom l’indique est la Ranger rose caution minorité girly, et enfin Tommy, le héros de toute une époque, d’abord Ranger vert et devenu par la force des choses le Ranger blanc trop classe, auquel on vouait tous un culte malgré sa queue de cheval ni faite, ni à faire. Dans ce film réalisé par Bryan Spicer – un réalisateur d’épisodes de séries dont le film est l’unique excursion sur grand écran – point donc, heureusement, d’origin story laborieuse comme dans le remake actuellement en salles – une heure et demie avant que les Rangers aient leurs pouvoirs… Vous êtes sérieux ? – mais un bref résumé pour ceux qui n’auraient pas vu la série télévisée auparavant, ce qui, à l’époque de la sortie en salles du film, représentait seulement 1,5% de la population occidentale des moins de 12 ans, soit, ceux qui n’avaient pas la télévision. Aussi, pilotés par leur mentor, Zordon, un être surpuissant âgé de plus de 10.000 ans qui leur a attribué leurs pouvoirs, les Power Rangers ont déjà botté le cul d’une tripotée de méchants en latex, de sbires tous plus ridicules les uns que les autres, dégommé du robot géant grâce à leur imbattable Mégazord et repoussé toutes les tentatives de destruction du monde de Rita Repulsa et son mari démoniaque, le Seigneur Zedd. Quand démarre le film, une nouvelle menace vient bousculer le train-train des étudiants apprentis-justiciers lorsque l’un des plus puissants ennemis de Zordon, un certain Ivan Ooze – best méchant ever des années 90 et membre de mon panthéon personnel des meilleurs méchants de l’histoire du cinéma, ouais… – est libéré d’une prison-oeuf dans laquelle Zordon l’avait enfermé il y a quelques milliers d’années. Désireux de se venger, ce dernier se rend au poste de contrôle créé par Zordon et lui met sa race sévère. Les Rangers perdent instantanément leurs pouvoirs et sont envoyés par l’assistant robotique de Zordon, le fameux Alpha 5 – dont les petits cris aigües « Aïe, Aïe, Aïe, Aïe ! » sont devenus cultes – sur une autre planète pour y retrouver les pouvoirs originaux des Rangers, les pouvoirs ninjas, et ainsi sauver Zordon et se débarrasser une bonne fois pour toute de l’infâme Ivan Ooze.
En le revoyant pour me décider une bonne fois pour toute de la nécessité de lui faire l’honneur d’un article en lieu et place de la nouvelle version actuellement en salles, m’est apparu ô combien ce film, que je n’avais pas revu depuis au moins, j’imagine, quinze ans, m’était largement resté précisément en tête. Beaucoup plus fun que la version de 2017, le film amuse notamment lors de ses séquences de combats fun aux possibles – quand elles sont vraiment très pauvres et peu nombreuses dans le remake dont je ne devais pas parler, mais bon, un peu quand même… – usant de ses indémodables chorégraphies et cabrioles et bien sûr de punchlines cultes en renfort à chaque coups de poing ou coups de pied du genre : « Retour à l’envoyeur ! », « C’est moi qui vous invite dans mon cauchemar ! », « A plus les minus ! », « T’es du genre gluant ! », « Je t’ai manqué ? », « On se les fait à saute-mouton ? » et j’en passe… Le film déploie dans ses séquences de combats une réelle inventivité de cartoon, un vrai plaisir à inventer des façons inédites et parfois spectaculaires de faire éclater des tronches de méchants gluants par nos amis Rangers. Qui plus est, lorsqu’après un premier tiers assez semblable à un épisode de la série télévisée dans sa structure – même si il y a quand même beaucoup plus d’argent dans ce film co-produit par la 20th Century Fox et que ça se voit, par comparaison avec l’aspect relativement cheap de la version pour petit écran – les Rangers sont envoyés sur une autre planète, le film bénéficie un souffle nouveau qu’est celui du space-opera. Aussi, on pense très souvent à la saga Star Wars bien sûr, à son bestiaire d’aliens et à ses méchants célèbres tant Ivan Ooze, puissant magicien alien violacé, jetant des éclairs du bout de ses doigts, nous évoque l’Empereur Palpatine. L’ADN des productions typiques des années 80 et 90, de Lucas à Spielberg, pointe dès lors le bout de son nez à peu près partout. Pour devenir des soldats en tenue ninjas maniant des pouvoirs ancestraux d’animaux sacrés – le singe, l’ours, la grue, le loup, le faucon et la… grenouille – les jeunes gens doivent s’aventurer dans une jungle à la recherche d’un temple sacré. Sur leur route, semée d’embuches et bardée de pièges, ils affronteront entre autres un squelette de tricératops qui prend vie – une scène aux effets spéciaux magistraux pour l’époque – et des statues antiques prenant elles aussi vie dans un décors rappelant à bien des égards la direction artistique de la saga Indiana Jones.
Si l’on devrait, quand même, s’aventurer à faire un match éliminatoire avec la nouvelle version, cette première adaptation gagnerait sûrement par K.O. Même si ses effets spéciaux peuvent paraître désuets au regard de ceux déployés dans cette nouvelle mouture, pour l’époque, remplacer les Zords, les robots géants des Rangers, par des versions entièrement réalisés en 3D – quand, dans la série, le plus souvent il s’agissait de la méthode « japonaise » : à savoir, des mecs dans des costumes écrasant des maquettes de villes – était une véritable révolution. Le dernier tiers, en cela, lorsqu’il sortit en 1995, impressionna par la quantité d’effets numériques qu’il osait déployer. Disons-le, si aujourd’hui ces effets nous font un petit peu rire, le film dans son entier accuse le même type de réaction rigolarde. Mais c’est là, sûrement, toute la force des films des années 1980-1990, qui ont su vieillir en conservant leur patine particulière tout en influençant tout un pan de la pop culture si bien qu’il se regarde à nouveau comme des petites œuvres de nostalgie hype. Nul doute que les enfants d’aujourd’hui regarderont dans quelques années la version de 2017 avec le même regard amusé, avec ce même plaisir de retomber une heure trente durant en enfance. Admettons simplement, avec toute la mauvaise foi du monde, que certains auront eu une meilleure enfance que les autres…
Excellent article, enfin une personne qui réhabilite le film pour ce qui l’est: c’est à dire un film pour enfant qui divertit du début à la fin, sans prétention, ni prise de tête. Comparé à celui de 2017, celui-là passe pour un chef-d’œuvre. bonne continuation.
Bonjour ! Merci à vous, si vous êtes vous même traumatisé par Ivan Hoose je connais un très bon hypnotiseur qui règle les soucis de cauchemars