Dans la famille des enfants de Jurassic Park (Steven Spielberg, 1993) je voudrais le petit frère, c’est ainsi que l’on pourrait présenter Komodo unique film de Michael Lantieri qui hérite grâce à ESC d’une nouvelle exploitation en Blu-Ray enrichie de bonus inédits.

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Thérapie de choc

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Outre son sujet et son cadre, le lien de Komodo avec la saga Jurassic Park (1993 – en cours) s’explique aussi et surtout par le CV de son réalisateur, Michael Lantieri qui passe pour la première et dernière fois derrière la caméra et qui auparavant a justement travaillé sur les effets spéciaux de Jurassic Park. Il continuera d’ailleurs à travailler sur chaque film de la franchise par la suite. Le long-métrage de Lantieri qui nous occupe aujourd’hui s’inscrit parfaitement dans la dinosaure mania ayant sévi après le succès de la saga inaugurée par Spielberg et qui aura, grâce aux possibilités nouvelles offertes par les effets spéciaux numériques, redonné un coup de fouet au films d’animaux tueurs persistant depuis avec des productions récentes telles que Dangerous animals (Sean Byrne, 2025). Et pour surfer du mieux possible sur cette vague, autant réunir une équipe de choc avec d’un côté, le responsable des effets spéciaux de Jurassic Park et de l’autre le duo de scénaristes Hans Bauer et Craig Mitchell déjà responsables du culte Anaconda (Luis Llosa, 1997), autre récit de reptile tueur. Mais là où Anaconda proposait une galerie de personnages hautes en couleur, quitte à friser le ridicule – ce qui donnera d’ailleurs une certaine aura au film héritant d’ailleurs d’un remake meta cette année -, Komodo tout en se reposant sur des archétypes, semble avoir à cœur de raconter son histoire sans cynisme ou dérision.
Car Komodo parle d’un trauma, à savoir la mort violente des parents du personnage principal Patrick Connelly, si violente qu’elle lui causera une totale amnésie de l’événement, ce qui motivera sa psychiatre à le ramener sur les lieux du trauma pour que les souvenirs lui reviennent. Sans atteindre des sommets de psychologie ou de caractérisation, Michael Lantieri fait malgré tout preuve de sobriété dans la teneur de son récit, il est également bien aidé par un casting impliqué qui applique une partition solide toujours sans le moindre second degré. Même dans l’utilisation de ces créatures, le film ne s’autorise aucune surenchère et privilégie le réalisme, pas de mutation qui rendrait les varans de Komodo plus gros ou plus rapides, bien au contraire, ils peuvent même paraître assez lents par instants. Une impression de lenteur notamment renforcée par l’œil torve des animatroniques. C’est bien le seul défaut de la véritable qualité du long-métrage : ses effets spéciaux. Cela aurait été un comble étant donné le savoir-faire du réalisateur, mais, en plus de proposer des effets spéciaux réussis, cette nouvelle édition d’ESC nous permet en plus de constater qu’il résiste plus que bien au passage du temps. Que ce soit dans les mouvements des animaux ou dans les effets de lumière, les doublures numériques fonctionnent à merveille tout comme l’alternance avec les animatroniques. Une belle réussite signée du studio de Phil Tippet, déjà à l’œuvre sur Jurassic Park.

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Côté mise en scène en revanche, Lantieri ne fait pas de miracles et l’influence du Monde Perdu (Steven Spielberg,1997) se fait bien trop souvent ressentir, que ce soit dès le plan d’ouverture ou encore via un plan montrant des herbes hautes qui rappelle évidemment la scène d’attaque par les vélociraptors dans le film sus-cité. Se trouve malgré tout ici et là des chouettes idées, comme lors du climax dans lequel le personnage incarné par Jill Hennessy n’a d’autre choix que de s’agripper à un Komodo embroché pour échapper à un autre, chouette moment de tension qui est décuplé par le réveil inattendu de l’animal embroché. Toujours dans le climax, une fusée de détresse envoyée dans la gueule d’un dragon de Komodo donne lieu à un effet spécial de toute beauté… En somme, Komodo n’a pas la flamboyance ni la folie d’un Anaconda, ni la maîtrise d’un Jurassic Park, mais il mérite qu’on s’y attarde pour ce qu’il est : un pur produit de son époque, sincère dans ses ambitions, appliqué dans sa fabrication et bien plus solide que nombre de ses congénères pondus à la même période. Redécouvert aujourd’hui grâce à ESC, le film gagne même en charme – celui d’un modeste artisanat numérique d’avant l’ère du tout-CGI, où les monstres gardaient encore quelque chose de tangible, de lent, presque mélancolique.
