Sortie exclusive Shadowz, In Search of Tomorrow cette épopée documentaire à la dimension monumentale – 305 minutes – nous replonge dans cette époque bénie qu’ont été les années 1980 pour le cinéma de science-fiction. Avis donc aux nostalgiques des premiers VFX, aux fans de créatures futuristes au look grotesque, et surtout aux adeptes du voyage temporel !
A la recherche du passé
Après In Search of Darkness (2019) et In Search of Darkness : Part II (2020) – deux documentaires explorant le cinéma d’horreur des années 1980 – David A. Weiner revient avec un projet similaire, cette fois focalisé sur le cinéma de science-fiction qui fascine petit.es et grand.es depuis l’invention même du 7e art. In Search of Tomorrow (2022) se veut comme étant “the definitive 80s sci-fi documentary” et, on doit l’admettre, il s’agit d’une œuvre plutôt complète. Jusque-là, des documentaires sur les films de science-fiction des années 1980, il en existait quelques-uns, principalement concentrés sur une seule œuvre ou un seul univers, comme Star Wars : l’Empire des rêves (Kevin Burns et Edith Becker, 2004) ou Chaos on the Bridge (William Shatner, 2014) sur la création de Star Trek : La Nouvelle Génération (Gene Roddenberry, 1987). On peut également citer la série-documentaire The Movies That Made Us (Brian Volk-Weiss, 2019-2021), disponible sur Netflix – avec des épisodes notamment consacrés à SOS Fantômes (Ivan Reitman, 1984), Retour vers le futur (Robert Zemeckis, 1985), ou encore Aliens, le retour (James Cameron, 1986). Mais The Movies That Made Us est un concept plutôt réservé à un public large et familial, tandis qu’In Search of Tomorrow parle davantage aux vrai.es cinéphiles – d’ailleurs qui d’autre qu’une personne passionnée pour visionner près de 5 heures de contenu sur le sujet ? En tout cas, le fait est qu’aucun autre documentaire n’avait jamais accompli la lourde tâche de s’intéresser à la décennie dans son ensemble. C’est désormais chose faite !
David A. Weiner nous propose donc une rétrospective année par année, en s’intéressant pour chaque année à trois ou quatre films emblématiques ou ayant révolutionné le genre d’une manière ou d’une autre. Cela n’a pas dû être très simple de faire des choix, mais la sélection présentée est somme toute assez représentative de cette période folle, avec des succès fulgurants qui ont su traverser les âges – mentionnons Blade Runner (Ridley Scott, 1982), Robocop (Paul Verhoeven, 1987), et E.T., l’extra-terrestre (Steven Spielberg, 1982) – et des excentricités restées bloquées dans leur époque – comme Les Aventures de Buckaroo Banzaï à travers la 8e dimension (W.D. Richter, 1984), Objectif Terrienne (Julien Temple, 1988), ou encore Une créature de rêve (John Hughes, 1985). Cette grande variété permet de parcourir une belle panoplie de sous-genres de la SF : space opera, planet opera, dystopie, anticipation, cyberpunk, etc. Autour de chaque film interviennent des membres du casting ou de l’équipe technique, ainsi que des expert.es, et ces dernier.ères sont également mobilisés dans des chapitres externes à la rétrospective par année, qui se concentrent sur des axes bien spécifiques, à savoir les héros et héroïnes de SF, la réalisation des effets spéciaux et animatroniques, la création des décors et costumes, le contexte historico-socio-politique, ou le mélange des genres cinématographiques. Tous ces éléments sont en effet indissociables du succès du cinéma de science-fiction dans les années 1980, et c’est particulièrement intéressant d’avoir accès aux coulisses et d’en apprendre plus sur le développement de certaines techniques ou l’écriture de certains personnages. Point bonus pour avoir abordé – même si cela aurait pu durer plus longtemps – la question des personnages féminins dans cette myriade d’univers hautement masculins. Rappelons tout de même que les années 1980 nous ont apporté Ellen Ripley et Sarah Connor, et ont ouvert la porte aux suivantes… Enfin, un dernier chapitre s’intéresse quant à lui à l’héritage de la SF des années 1980, et rappelle que l’on en serait sans doute pas là aujourd’hui sans le travail acharné de toutes ces personnes qui ont cru en leurs rêves et en leurs histoires farfelues.
Rien à dire donc sur le fond, qui brosse un portrait plutôt exhaustif de la décennie. Par contre, en ce qui concerne la forme, on reste très fort dans les codes du documentaire classique, avec une compilation d’extraits de films, d’images d’archives, et de séquences d’interviews. On aurait peut-être aimé l’introduction d’une narration qui nous aurait fait voyager d’un bout à l’autre de la ligne du temps… Cela dit, l’idée du découpage en épisodes aide déjà à mieux appréhender le projet dans sa globalité. Dommage que ce dernier semble un peu aléatoire, avec deux épisodes d’une heure vingt, deux épisodes d’une heure, et un épisode de cinquante minutes dont la moitié est en réalité le générique de fin. Mais on ne va pas s’en plaindre car devoir se concentrer cinq fois une heure vaut mieux que de devoir se concentrer une seule fois pendant cinq heures. Ne négligeons d’ailleurs pas que la galerie d’intervenant.es est très impressionnante : John Carpenter, Paul Verhoeven, Joe Dante, Jenette Goldstein, Dee Wallace, et pas moins d’une trentaine d’autres noms ! L’identité visuelle et sonore du projet sont aussi très appréciables, avec une vibe évidemment tout droit sortie des années 1980 – du bleu, du violet, du motif galaxie et du synthé en veux-tu en voilà. Bref, In Search of Tomorrow nous offre une immersion quasi totale au temps où tout le monde rêvait de mondes lointains, de monstres, et de robots, et on n’en ressort qu’avec un sourire nostalgique aux lèvres, la tête pleine d’étoiles et d’anecdotes à raconter à qui veut bien les entendre.