Hell Night


Quand on évoque les films d’horreur de la fin des années 70 au début des années 80, le mot slasher vient très vite à l’esprit. Dans cette avalanche de tueurs patibulaires, de morts sanglantes et d’adolescents courant dans tous les sens, Hell Night, (Tom DeSimone, 1981) se situe pile au milieu de la tempête. Et si ce film tout juste sorti en Blu-Ray chez Rimini était un cas d’école pour évoquer le slasher 80’s ?

Un jeune homme tient des bougies dans un décor d'époque, à côté de l'actrice Linda Blair en robe victorienne, scène du film Hell Night pour notre critique.

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Linda Blair Witch Project

Une patte de monstre sur la bouche d'une jeune femme blonde apeurée, scène du film Hell Night.

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D’emblée, Hell Night (Tom DeSimone, 1981) semble avoir quelque chose de familier. A commencer par « Hell » et « Night », qui sont peut-être les deux mots les plus utilisés de l’histoire des titres de film d’horreur. Les noms qui défilent au générique participent également de cette impression de nous retrouver en terrain connu. On n’y trouve rien de moins qu’une Scream Queen culte, en la présence de Linda Blair, connue principalement pour son interprétation devenue mythique de Regan, l’enfant possédée de L’Exorciste (William Friedkin, 1973), ainsi que l’héroïne de sa suite L’Exorciste II : L’hérétique (John Boorman, 1977), avant de tourner dans un grand nombre de productions d’exploitations, comme Roller Boogie (Mark L. Lester, 1979), Savage Streets (Danny Steinmann, 1984), ou encore la nuit d’enfer qui nous intéresse présentement. On trouve également à la production Chuck Russell, qui deviendra quelques années plus tard le réalisateur des iconiques Freddy 3 : Les Griffes du Cauchemar (1987) ou The Mask (1994). Du monde fort sympathique devant et derrière la caméra donc, rappelant nos meilleures heures de visionnages nocturnes de film de genres et d’exploitation. Cette familiarité que suscite Hell Night dès son premier plan, se poursuit par ailleurs tout au long de sa durée.

Un fantôme squelettique effrayant, en costume de ville du XVIIIème siècle, devant une fenêtre que l'on voit à travers son corps transparent, scène du film Hell Night.

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Il est probablement inutile de faire ici un exposé sur un sous-genre aussi populaire du cinéma d’horreur que le slasher. Rien qu’en entendant ce doux mot vient à l’esprit une ribambelle de méchants iconiques reconnus uniquement à leur prénom (Dur dur, d’appeler son enfant Freddy ou Jason de nos jours), souvent équipés d’une arme blanche plus ou moins imposante, presque toujours en train de pourchasser de jeunes ados inconséquents. De Halloween (John Carpenter, 1977) aux Griffes de la Nuit (Wes Craven, 1984), l’âge d’or du slasher a établi des codes, des règles, et des archétypes, plus ou moins par les films s’inscrivant dans le genre. Et Hell Night, à ce petit jeu, pourrait cocher virtuellement toutes les cases du « Slasher Bingo ». A commencer par les protagonistes, répondant aussi bien collectivement qu’individuellement aux critères de base. Ce sont donc bien évidemment des adolescents qui seront le centre de l’action. Cette bande de jeunes font par ailleurs partie – ou essayent – d’intégrer une fraternité d’université, autre grand classique à la fois du film d’horreur et de la comédie américaine. Au sein du gang se discerne aussi plusieurs personnalités bien connues : un garçon rigolard, une fille aux mœurs légères, alors que notre héroïne principale campée par Linda Blair, ainsi que le jeune homme qui lui servira d’intérêt amoureux sont deux bons gentils ados américains, embarqués dans cette folie de fête et de stupre un peu par hasard. Que doivent ces quatre modèles d’originalité pour accéder à l’honneur suprême d’entrer dans la fraternité Alpha-Sigma-Ro ? Ingurgiter bêtement de l’alcool ? Gagner un concours de karaoké ? Battre ses adversaires à Question pour un Champion ? Non, non, passer la nuit dans un vieux manoir hanté semble une épreuve bien plus raisonnable. Le cliché est même poussé dans ses retranchements : des meurtres brutaux ont eu lieu sur place, l’ancien propriétaire du manoir ayant assassiné sa famille dans un accès de folie, il y a douze ans jours pour jours. Evidemment donc, un type patibulaire rescapé/traumatisé du massacre, va traquer et probablement tuer la plupart de nos jeunes étudiants en pleine épreuve potache. C’est un petit spoiler, mais vous comprendrez qu’à la suite de cette addition d’éléments très classiques du slasher, la surprise n’est pas très grande. En effet, comme beaucoup de ses cousins, le long métrage se termine avec une Final Girl, cette ultime survivante au massacre.

Blu-Ray du film Hell Night édité chez Rimini.Pour autant si Hell Night, dans sa trame générale comme dans la mise en scène de la plupart des séquences ne brille pas d’originalité, il n’en reste pas moins un slasher assez réjouissant et attachant. Tout archétypal qu’il soit, le long-métrage déploie quelques idées séduisantes. Le contexte de « l’épreuve » de fraternité permet d’avoir parallèlement la véritable menace – incarnée par l’habitant monstrueux du manoir – et la menace de pacotille – avec les stratagèmes et pièges que les étudiants seniors mettent en place pour mettre la trouille à leurs jeunes recrues. Il est regrettable cependant que la confusion entre véritable danger et fausses terreurs ne soient pas plus exploitée tant il est rapidement clair que quelque chose cloche. L’histoire du manoir hanté et de sa famille maudite expliquée en détail par le chef de la bande est plutôt sympathique également, peignant joyeusement le portrait d’une famille de monstres, donnant une petite touche Freaks à l’univers, malheureusement, là aussi, trop peu mise en avant dans le reste du long-métrage. Malgré ces défauts de scénario et de rythme, pour une série B, la production est de bonne facture et permet à l’ensemble de demeurer à la fois assez crédible et charmant. Les différents décors néo-gothiques, en intérieurs comme en extérieurs, utilisant en grande partie des lieux réels, ne font jamais trop factices. Le moins réussi dans l’ensemble reste finalement l’apparence du boogeyman hantant les lieux. Par ailleurs, comme on l’apprend dans les bonus du Blu-Ray, les scènes à l’intérieur du manoir ont été entièrement tournées en utilisant la lumière des bougies plantées un peu partout (à se demander comment les étudiants en pleine épreuve ont pu allumer tant de bougies en si peu de temps) comme source de lumière, convenant bien à l’ambiance et l’esthétique globale des lieux. Additionnellement les adolescents viennent directement d’une fête de fraternité en déguisement, petite astuce scénaristique qui justifie leurs accoutrements en adéquation avec le manoir, tout particulièrement Linda Blair, jeune américaine des 80’s qui se balade naturellement en robe victorienne, option camée en collier ras du cou, alors qu’un tueur mystérieux la poursuit. Alors non, Hell Night n’est certainement pas le film de votre vie, mais pour les amoureux de l’horreur, il est peut-être le film de votre nuit.


A propos de Martin Courgeon

Un beau jour de projection de "The Room", après avoir reçu une petite cuillère en plastique de plein fouet, Martin eu l'illumination et se décida enfin à écrire sur sa plus grande passion, le cinéma. Il est fan absolu des films "coming of age movies" des années 80, notamment ceux de son saint patron John Hughes, du cinéma japonais, et de Scooby Doo, le Film. Il rêve d'une résidence secondaire à Twin Peaks ou à Hill Valley, c'est au choix. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/riwIY

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