Chasseur de Monstres


Parmi les plus gros succès au box-office chinois, le film familial Chasseur de monstres (Raman Hui, 2015) et sa suite Chasseur de monstres 2 (Raman Hui, 2018), disponibles sur la plateforme Outbuster, constituent un curieux mélange d’animation 3D, arts martiaux et humour loufoque. Retour sur le premier volet sorti en 2015.

Le mignon bébé monstre Wuba dans les bras d'une femme, il est blanc avec une touffe de cheveux verts, et des oreilles pointues.

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Il faut sauver bébé

À la recherche d’un divertissement familial loin des habituelles créations Disney, Pixar ou Dreamworks ? Pourquoi pas vous tourner vers le blockbuster chinois Chasseur de monstres (Raman Hui, 2015) ? À vrai dire, le réalisateur hong-kongais Raman Hui n’est pas si éloigné des géants américains, ayant fait ses griffes chez Dreamworks pendant plusieurs années. D’abord animateur et storyboardeur pour entre autres la saga Shrek (2001-2010), il a également réalisé plusieurs courts-métrages pour la firme dont Shrek, fais-moi peur (2010) ou Kung Fu Panda : les secrets des cinq cyclones (2008). Son long-métrage Chasseur de monstres (2015) ne cache donc pas ses influences américaines en matière d’animation, sans compter les petites ressemblances avec Les Schtroumpfs (Raja Gosnell, 2011) ou même Arthur et les Minimoys (Luc Besson, 2006). Mais la comparaison s’arrête là car le long-métrage n’a clairement rien à voir avec les divertissements occidentaux comme on les connaît (trop ?) bien. L’histoire en soi est déjà assez particulière. Exilés au fin fond des montagnes par les humains, les monstres mènent une vie tranquille jusqu’à ce que leur roi soit renversé par un coup d’Etat ; la reine enceinte prend la fuite et, pour protéger sa future progéniture, transmet son œuf à un humain, le jeune Tianyin (Jing Boran), qui tombe alors “enceint”. Si, si, je vous assure, un homme enceint d’un bébé monstre. Et ce ne sont que les dix premières minutes du film ! Je vous passe les détails de l’accouchement, mais une fois bébé Wuba mis au monde, Tianyin se prend d’affection pour lui et décide alors de le protéger de toutes les menaces qui planent sur cet héritier royal hors du commun. Aidé par une chasseuse de monstres Xiaonan (Bai Baihe) qui change vite de bord pour elle aussi protéger le bébé, le trio d’enfer s’embarque dans toutes sortes d’aventures pour échapper à la fois aux méchants humains et aux méchants monstres qui convoitent le petit Wuba.

Tianyin et Xiaonan observent un commercant du marché trancher un étrange légume, scène du film Chasseurs de monstres.

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Après un début très précipité, le film s’installe dans un mélange de live action et incrustations 3D où vrais acteurs et monstres numériques cohabitent dans une qualité qui laisse parfois à désirer. Les monstres sont certes attachants – ils portent en effet très mal leur nom de « monstres » – et ne peuvent que ravir les plus jeunes, mais l’humour loufoque, voire carrément lourdingue par moments, pourra surprendre les spectateurs non-initiés à ce jeu d’acteur exagéré propre à certaines productions asiatiques. Entre combats d’arts martiaux aux chorégraphies rigoureuses, chansonnettes et envolées lyriques tout aussi chorégraphiées et sketchs comiques, l’hybridité des genres est totale : on est autant dans une comédie familiale que dans un film d’action ou une comédie musicale. Tout le monde peut y trouver son compte à condition d’avoir l’esprit suffisamment ouvert vis-à-vis des codes cinématographiques orientaux. Trop souvent noyés dans les sorties successives des derniers Disney-Pixar, il fait parfois bon se tourner vers des productions internationales, souvent culturellement plus riches que les longs-métrages américains à vocation universelle.

Tianyin est debout chez lui, une femme est assise face à lui, l'oreille contre le ventre de Tianyin pour écouter les mouvements du bébé qu'il porte, scène du film Chasseur de monstres.

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Chasseurs de monstres insiste particulièrement sur la place du père dans la société chinoise moyenâgeuse (et certainement contemporaine). Tianyin s’attache très rapidement à bébé Wuba, quitte à risquer sa propre vie pour le protéger malgré le fait qu’ils soient tous deux d’espèces différentes. Le jeune homme a aussi en tête de retrouver son propre père, ancien chef de la brigade des chasseurs de monstres ; d’ailleurs dans le second volet, Chasseurs de monstres 2 (Raman Hui, 2018), il devra choisir entre venir encore une fois en aide à Wuba ou poursuivre ses recherches pour trouver son père. La responsabilité de la figure paternelle et l’importance d’une cellule familiale sont donc des thèmes importants du récit, mais il est dommage que la mise en scène hyper-active laisse peu de place au développement des enjeux, y compris la relation tumultueuse humains-monstres au sens large qui est clairement bâclée pour ne se concentrer que sur les aventures des protagonistes. On reste donc à la surface pour privilégier le côté divertissement, ce qui est assez malheureux étant donné le potentiel créatif du film, mais ce qui a finalement très bien fonctionné quand on sait que Chasseurs de monstres se classe en septième plus gros succès de tous les temps au box-office chinois.


A propos de Emma Ben Hadj

Étudiante de doctorat et enseignante à l’université de Pittsburgh, Emma commence actuellement l’écriture de sa thèse sur l’industrie des films d’horreur en France. Étrangement fascinée par les femmes cannibales au cinéma, elle n’a pourtant aucune intention de reproduire ces méfaits dans la vraie vie. Enfin, il ne faut jamais dire jamais.

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