La 9ème Vie de Louis Drax 1


N’ayant pas eu les honneurs d’une sortie en salles sur le territoire français, le nouveau film d’Alexandre Aja intitulé La 9ème vie de Louis Drax sort directement en vidéo chez nous grâce à Carlotta, toujours aussi parfait dans ses choix éditoriaux.

La 9ème vie de Alexandre Aja

Le désamour du système cinématographique français pour Alexandre Aja (voir notre article Alexandre Aja, l’américain) est criant. Si l’on se rappelle que ses premiers films français Furia (1999) et Haute Tension (2002) avait été timidement accueillis, aussi bien par la critique que par les spectateurs – la faute, plus particulièrement à une distribution timide – le réalisateur finit par trouver reconnaissance aux Etats-Unis où il s’est vite imposé en réalisateur de remake de luxe de grands classiques de l’horreur : La Colline à des Yeux (2006), Mirrors (2008), Piranhas 3D (2010) et en tant que producteur avec le remake de Maniac (Franck Khalfoun, 2012) et quelques petits films d’horreur un peu bas-de-gamme tels que Pyramide (Grégory Levasseur, 2014) ou The Door (Johannes Roberts, 2016). Rarement synonyme de succès public en France, le nom d’Alexandre Aja n’est plus tout à fait devenu une marque forte sur laquelle vendre des billets dans l’Hexagone. Preuve en est encore de ce désamour, puisqu’aujourd’hui son nouveau film La 9ème vie de Louis Drax (2016) sort directement en vidéo chez nous. Premier véritable film de commande réalisé par Aja – puisque jusqu’alors il a toujours pu écrire ou ré-écrire les scénarios qu’il tournait, bien aidé par son compère Grégory Levasseur – le film est aussi un pas de côté dans la filmographie du réalisateur, lorgnant moins cette fois-ci du côté de l’horreur explicite que du thriller fantastique sobrement horrifique. L’histoire démarre par un portrait d’un jeune garçon, Louis Drax, qui de ses neuf vies en a déjà perdues huit des suites de multiples accidents et qui se retrouve cette fois plongé dans le coma suite à un énième incident survenu le jour de son anniversaire, durant lequel il est tombé d’une falaise. Son médecin, le docteur Allan Pascal (Jamie Dornan) souhaite comprendre les circonstances du drame. En essayant de trouver des réponses à ses questions en interrogeant les parents de l’enfant, un père alcoolique et violent (Aaron Paul) et une mère protectrice et fragile psychologiquement (Sarah Gadon). Une investigation qui l’amener progressivement vers des horizons qu’il ne pouvait soupçonner, aux frontières du réel.

A bien des égards, le film rappelle un sous-genre bien connu des amateurs du fantastique que l’on pourrait appeler le biopic fantasmé. Adapté (comme souvent) d’un best-seller, l’histoire de La 9ème vie de Louis Drax raconte donc le parcours de vie étonnant d’un jeune garçon qui narre son histoire à la première personne. On y reconnaît là les ingrédients déjà utilisés dans des films comme le magnifique Big Fish (Tim Burton, 2002) ou le récent L’Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S Spivet (Jean-Pierre Jeunet, 2013). Cette parenté étonne venant d’un long-métrage estampillé « a film by Alexandre Aja » et affirme un virage considérable dans la carrière du réalisateur. Néanmoins, on comprend pourquoi la réalisation de ce projet ait pu l’intéresser, tant il distille ça et là quelques idées de cinéma fantastique – dialogue avec les morts, créature fantastique rappelant La Créature du Lac Noir – avec lesquelles Aja semble s’amuser. Sans être le film de l’année – il souffre fortement de la comparaison évidente avec l’un des grands films de 2017 qu’est le sublime Quelques minutes après minuit (J.A Bayona, 2017) – le film surprend d’abord par la multiplicité des genres qu’il parvient à faire cohabiter. Prenant le risque du gloubi-boulga, le réalisateur parvient à slalomer entre les registres et à créer l’émotion en usant des contrepoints dramatiques ainsi créés. S’il manque parfois légèrement d’incarnation – la faute, principalement, au casting masculin – et de rythme, La 9ème vie de Louis Drax reste un joli film qu’il convient de regarder sans espérer « le nouveau film choc de Alexandre Aja » comme le vend la jaquette du Blu-Ray qui sort ce mois-ci chez Carlotta.

Si l’on remerciera l’éditeur, une fois n’est pas coutume, de continuer à faire de son catalogue le meilleur et le plus exigeant du marché, on ne manquera pas toutefois de préciser que cette édition du film de Aja aurait mérité un peu plus de soin, notamment du côté des suppléments qui se limitent aux featurettes promotionnelles américaines, dans lesquelles, par ailleurs, le réalisateur ne s’exprime quasiment pas ! Une entrevue avec le metteur en scène français, plus fouillée, pour comprendre ce qui l’a intéressé dans cette histoire dont le scénario lui a été proposé par Max Minghella – le fils de Anthony, acteur par ailleurs et notamment dans l’avant-dernier film de Aja, le bancal Horns (2014) – n’aurait pas été de trop. Pour le reste, la qualité est bien évidemment au rendez-vous, autant du côté de l’image que du son – Carlotta fait figure d’exemple sur ce rayon – et permet de découvrir de la meilleure des façons, outre une projection en salle, un film qui aurait mérité une autre vie.


A propos de Joris Laquittant

Sorti diplômé du département Montage de la Fémis en 2017, Joris monte et réalise des films en parallèle de son activité de Rédacteur en Chef tyrannique sur Fais pas Genre (ou inversement). A noter aussi qu'il est éleveur d'un Mogwaï depuis 2021 et qu'il a été témoin du Rayon Bleu. Ses spécialités sont le cinéma de genre populaire des années 80/90 et tout spécialement la filmographie de Joe Dante, le cinéma de genre français et les films de monstres. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/sJxKY


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