Dans la vie, il y a deux types de jeux vidéo. Ceux qui sont adaptés au cinéma et les autres. L’exploit de porter à l’écran Tetris n’ayant encore été atteint par personne (pas même par les russes, et Dieu sait que ces gens-là sont prêts à tout), les réalisateurs les plus prestigieux privilégient les jeux de combat parce qu’écrire un scénario ficelé, cohérent qui prend le spectateur par les tripes, c’est plutôt chiant, par contre composer un film avec 70% de baston, ça on sait faire.
Finish him
C’est encore plus facile quand le synopsis est déjà pré-mâché au dos de la boîte de Mortal Kombat II que notre cher Paul W.S. Anderson a dû trouver dans la chambre de son gosse. Peu désireux de se contenter de Shopping (1994), notre homme décide alors d’adapter à l’écran ces combats qui faisaient hurler Familles de France qui trouvaient limite qu’on permette à des bambins de livrer des joutes sanglantes sur leurs postes cathodiques. Vivement intéressé par les jeux vidéo, je me sens bien pour vous toucher quelques mots au sujet de Mortal Kombat. Cette série plutôt prolifique de jeux de baston (oui, c’est surprenant, on était plutôt en droit de s’attendre à un jeu de puzzle) créée par Midway en 1992 pour les salles d’arcade proposait à deux personnages de se violenter le groin mais genre beaucoup, à des lieues d’un très politiquement correct Street Fighter II. En effet, la plupart des coups occasionnaient des geysers de sang, et à défaut de proposer un gameplay en profondeur, les Mortal Kombat se sont démarqués par le système de Fatality, autrement dit, 3 secondes à la fin du match durant lesquels après avoir validé une manipulation précise, votre combattant achèvera son opposant plutôt brutalement. En lui arrachant la colonne vertébrale par la gorge, en lui retirant la peau, en lui bouffant la partie supérieur du corps, en le balançant dans un ventilateur géant, etc. Le pied total. De plus, les sprites des personnages étaient basés sur des images digitalisées. On avait du coup l’impression d’incarner des personnages plutôt réalistes.
Je n’aurais pas mentionné ces détails si il n’était pas possible d’effectuer une analogie avec le cinéma: en effet, les Mortal Kombat sont au jeu vidéo ce que Les Guerriers du Bronx sont au septième art : du gros nanar qui tâche ayant rapidement atteint le statut de culte. Si avec ça l’ami Paul nous sortait un thriller, on aurait pu crier au scandale, sauf que non. En plus de nous pondre un film plutôt correct par rapport au jeu vidéo, monsieur fait plaisir aux fans en livrant une œuvre vraiment fidèle et pleine de références à Mortal Kombat (du coup on ne peut s’empêcher de jeter un regard chargé de regrets à Steven E. de Souza et son Street Fighter tout aussi nanar et efficace mais moins emprunt de la magie du jeu dont il était tiré, bref). Passons au film, voulez-vous. En fait non, avant de passer au film, commençons par le générique puisque celui-ci lâche claque une grosse techno des familles, pleine de voix digitalisées qui disent « fight » et tout. Autrement dit, dès cet instant, on sent qu’on va assister à la naissance d’un mythe et qu’on ne s’est pas trompé de cassette. Ce thème sera repris lors de grosses bastonnades pour notre plus grand plaisir.
Le pitch, Shang Tsung (le magicien polymorphe super chiant à battre, rappelez-vous) promet à Shao Kahn, l’empereur diabolique, le contrôle de la Terre pour y foutre sa merde. Pour ça, il faut remporter le Mortal Kombat. Du coup, 3 gentils accourent, Liu Kang (prononcez [Lou Ken]), Sonya et Johnny Cage sont coachés par Raiden et ils sont pas là pour beurrer les sandwichs d’un empereur du mal pour l’éternité. Les personnages étant issus du jeu vidéo avec la même trombine et la même histoire, on ne peut que s’attendre à du lourd. En effet au cours du film, on retrouvera les coups spéciaux issus du jeu et même les fatalités. D’ailleurs les chanceux du pays de Shakespeare bénéficient des voix originales et par extension, des « COME HERE » ou « FATALITY » propres au jeu vidéo. Nous sommes donc totalement immergés dans l’univers édulcoré (à notre grand regret, mais on ne peut pas tout avoir, allons) de Mortal Kombat. Les acteurs étant aussi convaincants que ceux du jeu vidéo, c’est tout bonheur, surtout quand notre ami Christophe Lambert nous gratifie de son rire lors de ses apparitions (mais si, la scène où tous les personnages se marrent, Raiden fait alors de même puis s’excuse minablement de son « hin hin hin » culte).
Comme dans tout nanar qui se respecte, les répliques cultes et clins d’œil au fan averti s’enchaînent, on commencera par esquisser des sourires polis lorsque l’ont reconnaîtra la fameuse balayette cheatée du jeu (arrière + A), que l’on entendra des répliques intemporelles comme « La vie en Amérique, ça lui a affaiblit l’esprit, c’est sans doute à cause de la télévision », mais on se mettra à sourire niaisement voire lâcher un rire bien gras lorsque l’on entendra le mythique « TOASTYYY » ou lorsque Sonya fera une blague « Ta mère qui… ». Comme je pourrais vite devenir chiant à énumérer les détails qui font que ce film est presque indissociable du jeu vidéo, je préfère m’arrêter là et conclure de la façon suivante : Oui, le film a vieilli (comme 99% des nanars, ayez l’amabilité d’en convenir) cependant il l’assume en livrant là un produit de qualité pour tout fan de Mortal Kombat qui se respecte (je parle du jeu, là, suivez un peu, moi j’m’en fous je l’ai déjà mon bac) et j’ai l’intime conviction qu’il pourrait ne pas déplaire à tout amateur de nanars n’ayant pas eu la chance de sortir une seule fois dans sa vie une fatality. Mon cher Paul, on aurait préféré que tu continues comme ça.
Pingback: Headshot | Fais pas genre !