Avec Naomi Watts, Charlie Heaton et Jacob Tremblay à l’affiche, Oppression pouvait se targuer d’un casting alléchant à la hauteur de ses ambitions : un retour aux sources reprenant les grands codes des thrillers classiques des années 20 à aujourd’hui. Un pari ambitieux ? Trop ? Oppression était tout de même présent sur la Black List des meilleurs scénarios en attente de production depuis 2012 !
Toc Toc ! Qui est là ? Le 0% de Rotten Tomatoes !
Sors de ta cachette Naomi !
Oppression, c’est l’histoire de Mary Portman, psychologue clinicienne vivant dans une grande maison isolée au milieu de la forêt – oui parce que c’est toujours une bonne idée d’aller vivre en plein milieu d’une fichue forêt ! Son mari est mort 6 mois plus tôt dans un accident de voiture provoqué – accidentellement ou intentionnellement ? – par son beau-fils, Steven Portman, désormais paralysé, tout du moins coincé dans son propre corps – le scénario ne précise jamais réellement la nature exacte de son handicap – et dont elle doit s’occuper au quotidien. Puis un jour tout bascule. Tom, son jeune patient malentendant, débarque chez elle en pleine nuit pour y chercher refuge. Mais alors qu’elle a le dos tourné, le jeune garçon disparaît mystérieusement dans la nature. Démarre alors une succession de cauchemars et de visions aussi étranges qu’effrayants pour le personnage interprété par Naomi Watts. Mais sont-ce vraiment juste des rêves et des hallucinations ? La réalité pourrait être beaucoup plus troublante… Voilà, en gros, le postulat de base. Rien de bien extraordinaire mais tout de même prometteur, jusqu’au nom – français comme anglais – du film.
Oppression, nom féminin : Malaise psychique sourd, un peu angoissant, qui étreint. Un titre de film qui en disait donc long et surtout, qui promettait beaucoup de choses. Même l’affiche officielle du film où l’on découvre une Naomi Watts en noir et blanc, cachée dans un placard et apparemment apeurée laissait envisager un potentiel classique dans le petit monde des thrillers. Car un bon film du genre démarre en effet par son poster. Tous les meilleurs films d’angoisse ont des visuels qui sont restés dans la mémoire collective. De Fight Club (David Fincher, 1999) au Silence des Agneaux (Jonathan Demme, 1991) en passant par Shining (Stanley Kubrick, 1980), qui ne se souvient pas de ces affiches mythiques. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’affiche d’un thriller est si importante. En effet, l’identité d’un film d’angoisse passe avant tout par son imagerie, et la capacité de cette dernière à transmettre des émotions toutes particulières au spectateur : peur, stress, angoisse, inquiétude etc… Et c’est à mon avis la principale – peut-être seule – qualité de ce film réalisé par Farren Blackburn – plutôt connu pour la réalisation d’épisodes de Dr. Who ou encore le Dardevil de chez Netflix. En effet, le réalisateur britannique parvient efficacement à produire une ambiance générale stimulant chez le spectateur ces différents sentiments négatifs qu’un thriller est censé générer. On a peur, on s’inquiète, on est angoissé et parfois même, on sursaute.
Malheureusement, ces différents sentiments n’interviennent qu’à certains moments bien précis du film. Car Blackburn ne réussit jamais vraiment à faire décoller ce dernier – pas aidé par un scénario franchement pas novateur et complètement téléphoné. Surtout, il use de tous les clichés possibles du genre pour tenter – forcer – d’en faire un classique. Musique aux sonorités suraiguës, la maison isolée au cœur de la forêt, le gamin qui a une tête qui fait peur, l’animal qui te fait sursauter en plein milieu du film et deux secondes après la vraie menace qui te fait elle aussi sursauter, la tempête de neige, la ligne téléphonique et l’électricité qui ne fonctionnent plus, etc…Je pourrai continuer encore longtemps tellement Oppression est truffé de ces clichés. D’ailleurs, certains ne vous font-il pas penser à un VRAI classique du cinéma ? Et oui…C’est fou le nombre de ressemblances que l’on peut trouver dans ce film avec le Shining de Stanley Kubrick, le film des années 80, devenu cultissime depuis. On remplace l’hôtel par une grande maison et l’on retrouve la tempête de neige qui plonge notre héroïne dans l’isolement le plus total, la technique des pas dans la neige reprise à Danny, la porte défoncée par le psychopathe de service ou encore le corps retrouvé congelé qui n’est pas sans rappeler cette scène finale et mythique de la dépouille de Jack. Alors j’ai d’abord cru à un espèce d’hommage à l’œuvre de Kubrick. Mais avec le recul, et surtout le résultat final du film, je me demande s’il ne s’agit pas purement et simplement d’une pâle copie.
La déception qu’est ce film vient peut-être finalement du simple fait qu’il aurait pu proposer bien plus. Le potentiel scénaristique était bien présent. J’y ai d’ailleurs cru pendant toute la première demi-heure qui laissait imaginer une lecture multiple du titre « Oppression » très intéressante. Toute d’abord avec ce personnage handicapé de Steven Portman, coincé dans son propre corps. On peut aussi ressentir cette oppression dans le personnage de Tom Patterson, ce jeune patient de Naomi Watts, malentendant. Enfin, on retrouve cette notion dans l’isolement de tous les personnages les uns par rapport aux autres et le sentiment d’oppression que cela peut générer chez chacun d’eux. Il y avait vraiment bien plus à faire qu’une mauvaise copie de Shining, surtout avec un tel casting. On ne présente plus Naomi Watts bien sûr. Nommée à 2 reprises aux Academy Awards, l’actrice n’est pas totalement étrangère au genre. Elle le prouve avec ce rôle de psychologue clinicienne qui doit s’occuper tout à la fois de son beau-fils et de ses patients, enfants coincés dans leur propre tête. Watts est très juste, impeccable même du début à la fin. Quant aux deux autres rôles principaux, ils sont interprétés par Charlie Heaton – révélé par la série Netflix, Stranger Things – et Jacob Tremblay découvert pour son rôle dans Room. L’adolescent comme le jeune garçon sont tous les deux très bons dans leurs rôles respectifs : Heaton dans le rôle de cet adolescent paralysé et Tremblay dans celui du jeune malentendant dont la disparition devient le déclencheur de cauchemars plus vrais que nature chez Naomi Watts. Un casting finalement très restreint – le nombre de personnages apparaissant à l’écran doit être d’une petite dizaine seulement – qui n’est pas sans rappeler à cet égard, et à nouveau, le film de Stanley Kubrick.
Je fais partie de ceux qui pensent qu’il est très difficile de faire un bon thriller en 2016 et encore plus de révolutionner le genre. En effet, il se produit des films de ce genre depuis aussi loin que les années 20 avec le cinéma d’Alfred Hitchcock. Depuis, des légendes du cinéma comme Stanley Kubrick, Clint Eastwood ou encore David Fincher y ont fait leurs armes et réalisé de véritables chef-d’œuvres. Bien sûr, je ne demandais pas à Farren Blackburn de faire de son Oppression un chef-d’œuvre – car tous les films n’ont pas à l’être – mais au moins de ne pas me resservir la même soupe depuis longtemps refroidie. Cependant, la faute revient peut-être finalement surtout à Christina Hodson qui est à l’origine de ce scénario peu inspiré. Ce dernier propose une caractérisation des personnages tellement mal écrite qu’il ne laisse aucune chance à des acteurs pourtant excellents de rattraper le coup. Je pense notamment à ce personnage souffrant d’une espèce de maladie mentale hybride entre hystérie, schizophrénie et délire passionnel/érotomaniaque. On n’y croit jamais vraiment tant sa mise en scène et son introduction dans le scénario est manquée et surfaite. A mille lieux du Jack Terrance de Shining… A vouloir voler trop près du soleil…