Pour son neuvième film, John Landis propose avec Three Amigos (1986) une parodie de western loufoque qui démontre son amour pour le cinéma qui fait travailler les zygomatiques.
The Ballad of the three amigos !
Mexique, 1916. Une jeune femme répondant au nom de Carmen cherche des hommes assez braves pour délivrer le petit village de Santo Poco du cruel El Guapo. C’est dans une église que la jeune femme découvre les exploits de trois justiciers Lucky, Ned et Dusty – connus sous le nom des Trois amigos – et décide de les contacter. Seul hic ; nos trois gaillards ne sont pas de grands défenseurs des oppressés mais des acteurs de western.
De ce point de départ, Landis en tire une œuvre singulière et burlesque, offrant à son trio d’acteurs Steve Martin, Chevy Chase et Martin Short un terrain de jeu intéressant leur offrant la possibilité d’exercer leur talent comique. L’ambiance du film est assez similaire à l’émission Saturday Night Live – dont Chase et Short font partie – fort agréable et propice au rire. Les scènes avec le buisson chantant, l’invocation de l’épéiste invisible – je vous garantis que son nom sonne mieux en version originale ! – ou encore ces passages où nos trois héros poussent la chansonnette comme « My Little Buttercup » ou encore « Blue Shadows » avec toute la faune locale ainsi que leurs montures – et quel chœur mes amis !
Landis se lâche avec un sens du kitch et de l’absurde qui flirte avec la démesure – le décor en carton-pâte saturé et les faux cactus de la chanson « Blue Shadow » en sont la preuve, exploitant de manière éhontée la mythologie de l’Ouest américain et sauvage ainsi que les codes cinématographiques du western. Mais au-delà de tous ces gags et situations comiques, j’aime y voir l’interrogation d’un réalisateur sur son medium : le cinéma. Lucky, Ned et Dusty ; trois personnages complètement abrutis se retrouvent confrontés à la dure réalité et la violence qui l’accompagne mais aussi à leur propre image et leur stature d’acteurs. Comme le montre le duel entre le personnage de Short et celui de l’Allemand incarné par Kai Wulff . Le motif ? Ce vendeur d’armes déclare être l’homme/le tueur qu’il est aujourd’hui grâce à l’avatar de Short à l’écran – décrit comme la plus fine et rapide des gâchettes – et que ce dernier est devenu un véritable modèle. La raison qui pousse Carmen a les contacter – pensant que les films du cinématographe étaient en fait des documentaires et non des fictions – est un autre exemple. De simples acteurs, les amigos vont devoir devenir ce qu’ils ne sont pas et inspirer un courage qu’ils sont très loin de posséder. Si cette évolution, en soi est très classique, Landis la traite avec un côté irrévérencieux, lorgnant du côté des Monty Python.
Et c’est là que l’on touche au problème du film. Monty Python : Sacré Graal (Terry Jones et Terry Gilliam – 1975) est un film qui fait office de définition du nonsense. Une œuvre absurde mais « jusqu’au boutiste » dans sa démarche, ne laissant aucun répit au spectateur. Dans Three Amigos, Landis fait preuve d’un côté moins subversif, le film ne cherchant à être rien d’autre qu’un divertissement. Il laisse, par exemple, planer le doute quant à l’origine du surréalisme dans le film : est ce le résultat de la déshydratation et de la chaleur sur notre trio qui font qu’ils hallucinent ? Venant du réalisateur de The Blues Brothers (1980), il est vrai que l’on aurait pu s’attendre à un résultat bien plus « barré » et mordant.
Sans être un chef-d’œuvre absolu, le film est une indéniable réussite qui continue de faire rire et de nous divertir. C’est un savant mélange de mauvais goût assumé et un hommage au cinéma américain – le western pour être plus précis – dont seul Landis a la recette.