C’est la fin 2


L’année 2013 est placée sous le signe de l’apocalypse ! C’est après la date fatidique du 21 décembre 2012 que le cinéma s’intéresse de plus près à la fin du monde et tout ce qui s’y rapporte : Pacific Rim, World War Z, After Earth, Oblivion, l’extinction de la planète Terre fascine beaucoup en ce moment. Et alors que The World’s End, le nouvel opus de Simon Pegg et Nick Frost qui parodie cette fois les films catastrophe débarque dans nos salles, c’est de l’autre côté de l’Atlantique, tellement de l’autre côté que c’est même plutôt au bord du Pacifique, qu’une autre comédie catastrophe nous vient, mettant elle aussi en scène la fin du monde, de la part de Seth Rogen et sa fidèle bande de cinglés.

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Projet †

Seth Rogen, Jonah Hill, Jay Baruchel, Aziz Ansari, Craig Robinson… Tous ces noms évoquent la génération Apatow, signe de la renaissance du comique américain, en chute libre depuis les 90s et pendant une période de dix bonnes années et qui, petit à petit, prend depuis le milieu de la décennie précédente la relève des grands noms du comique (Jim Carrey, Eddie Murphy, Adam Sandler, Robin Williams…) en continuant toujours à leur vouer un culte immense. Toute cette grande famille, de Seth Rogen à Paul Rudd, de Jason Segel à Michael Cera, en passant par Aubrey Plaza et Bill Hader, provient du stand up, et tous ou presque sont passés à l’Improv, la légendaire salle de Hollywood qui a justement vu débuter Adam Sandler, Robin Williams, Jamie Foxx, Chris Rock… Et elle est toujours unie, cette famille, ne s’arrête jamais de travailler et s’améliore de film en film. Cet été, on retrouve le groupe pour une petite perle intitulée This is the end (C’est la fin en VF, titre affreux, pour une fois qu’il est traduit correctement) et qui les met tous en scène dans leur propre rôle : invités à la pendaison de crémaillère de James Franco, Seth Rogen, Jay Baruchel et tous leurs amis acteurs devront faire face à un tremblement de terre qui conduira inéluctablement à la fin du monde…

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Après le très drôle Délire Express, James Franco rejoint à nouveau la joyeuse équipe pour la déclinaison en long métrage d’un court intitulé Jay & Seth vs. The Apocalypse (le trailer a été posté sur YouTube en 2007 et compte aujourd’hui près de 670 000 vues), je pense que tout est dit dans le titre. Et le long métrage qui en résulte est bien meilleur que tout ce que l’on pouvait espérer ; il faut quand même bien reconnaître que ces trois dernières années n’ont pas été très brillantes pour toutes la bande, qui s’est perdue dans des productions largement en-dessous du talent de chacun de ses membres (Votre majesté, Voisins du troisième type, Baby-sitter malgré lui, Maman j’ai raté ma vie, 30 minutes maximum, pour ne citer que ceux-là…), et les premières minutes de This is the end font clairement état d’une énergie dans précédent au sein du groupe, et très vite, la crainte qui se faisait tellement ressentir avant d’entrer dans la salle se dissipe. Cette énergie ne cesse de monter en puissance au fil du film : on comprend vite qu’il ne s’agit pas là de l’habituelle comédie blagues-un-peu-crades-et-références-geek, non, This is the end peut être aussi puéril que subtil, mais on retrouve bien la patte de Seth Rogen dans les situations et les dialogues, bien qu’il s’agisse là d’un projet largement plus ambitieux que tout ce qu’il a pu écrire jusque-là.

Avec son comparse Evan Goldberg, Seth Rogen est bien sûr aux commandes du scénario mais ils signent tous les deux leur premier passage derrière la caméra. Assez ambitieux, comme projet, de se dépuceler de la réalisation en mettant en scène d’emblée leur Armageddon, et ils y arrivent pourtant merveilleusement bien. Leur secret ? Ils vont au bout de tout ce qu’ils ont entrepris, que ce soit dans l’humour comme dans leur représentation de la fin du monde. A ce propos, si l’on a vu et l’on continue de voir beaucoup de films post-apocalyptiques depuis quelques années, il est assez rare que l’on nous donne à voir des (bons) films apocalyptiques, qui sont une réelle représentation de la fin du monde, le dernier exemple en date étant peut-être l’excellent Kaboom (Gregg Araki, 2010), mais pour un budget et un ton très différent. En cela, This is the end nous régale : en plus d’être extrêmement drôle, il est un VRAI film apocalyptique, mais je ne révèlerai pas un mot de plus sur ce sujet pour mieux vous laisser le plaisir de le découvrir en salles.

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En dosant très bien la catastrophe et le comique, les 110 minutes du film ne laissent aucun temps mort, et j’aimerais justement vous parler maintenant de l’humour à la fois singulier et très « Rogenien » du film. Qui dit casting de stars dans un tel film dit forcément autodérision, d’autant plus que chaque comédien joue son propre rôle, mais ici, ils ne sont pas eux-mêmes, du moins c’est ce que l’on espère : chacun d’entre eux est égocentrique, immature et joue à la diva, qu’il s’agisse de Jonah Hill, qui n’en a plus que pour Hollywood depuis sa nomination aux Oscars pour Le Stratège, Michael Cera que la gloire a rendu ultra-cocaïnomane et obsédé sexuel, Danny McBride qui est insupportable tout le long du film ou James Franco, considéré comme un homosexuel refoulé et pseudo-artiste dont les propres œuvres servent de déco à la maison. Mais ils sont surtout tous très lâches et hypocrites, comme le prouve par exemple la haine que Jonah Hill porte à Jay Baruchel en se servant toujours de Seth Rogen comme intermédiaire. On rit de tout cela pendant tout le film, mais on ne peut s’empêcher de se demander s’il existe de réelles tensions entre eux, tant les propos vont parfois loin. Et puis il y a l’humour auquel l’équipe nous a plus souvent habitués, mélange de blagues tantôt absurdes, tantôt lourdes du niveau d’un Police Academy ou d’un Porky’s, et références geek. Et croyez-moi, on est servis en moments d’anthologie : des séquences qui parodient L’Exorciste, 127 heures et Rosemary’s Baby, une engueulade violente et mémorable entre Franco et McBride autour de la masturbation et de vieux magazines porno (qui en dit long sur l’état de désespoir de l’humanité à l’approche de la fin du monde), un running gag impliquant Jonah Hill et un Milky Way ou encore les hilarantes dix dernières minutes qui, entre Whitney Houston et les Backstreet Boys, nous offrent une fin du monde en chansons.

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Gros pari que ce This is the end (désolé, je n’y arrive VRAIMENT pas avec le titre français), accepté avec audace par Rogen et Goldberg et brillamment réussi, puisqu’il est sans doute la meilleure comédie de l’année, pour l’instant. En mettant en scène une Apocalypse inspirée de la Bible (fait déjà assez rare dans les films apocalyptiques), le duo s’offre surtout le plaisir de tourner Hollywood et tout ce qui s’y rapporte (les soirées mondaines en particulier) en ridicule, et fait aussi un film aussi hilarant que personnel. Car oui, il y a bien eu des tensions dans le groupe, et d’après Rogen, si elles ont été amplifiées de sorte à ce qu’elles deviennent drôles dans le film, elles se rapprochaient assez de ce que l’on voit à l’écran. This is the end, espérons-le, a exorcisé toutes ces tensions, car il est tellement bon de voir toute cette équipe réunie et plus drôle que jamais que l’on attend avec impatience de voir l’hypothétique suite de Délire Express, développée dans ce film dans une autre scène à mourir de rire.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.


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