The End 2


« Hey, ce serait bien de clore la compétition par un film qui s’appelle The End ». Cela a dû certainement commencer comme une blague, et puis nous voilà arrivés à la fin. FIN. C’est comme ça que l’on dit « fin » en espagnol, et vous savez comment je le sais ? Pas parce que j’étais fort en espagnol, j’étais tellement nul que je ne connaissais même pas les mots identiques au français, non, je le sais parce que c’est le titre original de ce film espagnol. Et je peux vous citer des tas de compétitions des années précédentes qui se sont terminées bien plus glorieusement.

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Destination finale

Trois sur neuf : c’est le nombre de premiers films sélectionnés en compétition officielle cette année. Un tiers. C’est vraiment pas mal, mais sur ces trois films, The Crack était insoutenable de vide et de nullité et Mamá n’était réussi qu’à moitié. Ce sont des premiers films, me direz-vous, mais j’espérais vraiment tomber sur un film qui me surprendrait comme Mamá m’a surpris, et pour cause : Jorge Torregrossa, réalisateur inconnu, signe un film coécrit par messieurs Sergio G. Sanchez et Jorge Guerricaechevarria, LE PANARD ! Pour ceux qui n’auraient rien compris à mon charabia ibérique, le premier a écrit L’Orphelinat et The Impossible et le second a scénarisé les neuf premiers films de ce génie d’Alex de la Iglesia, depuis Action Mutante jusqu’à Crimes à Oxford, au total seize ans de bons et loyaux services, et il se paye même le luxe de signer le script d’En chair et en os d’Almodóvar. Vous l’aurez compris, ces deux-là ont de la bouteille et ça en jette clairement plus que les tocards qu’on voit ramassés à droite et à gauche pour écrire un film d’horreur de merde. Alors cette idée de les mettre ensemble aurait pu donner quelque chose d’explosif, je dirais même de dynamital, si je peux me permettre un petit néologisme. De toute façon je me permets, je suis chez moi ici.

Avec The End, Sanchez et Guerricaechevarria adaptent à l’écran un roman, paraît-il l’un des best-sellers de 2009 dans la péninsule theend2ibérique, écrit par un certain David Monteagudo. Il y raconte l’histoire d’un groupe d’amis (parmi lesquels l’excellente mais trop peu présente Maribel Verdú et la jolie Clara Lago qui persiste dans la faute de goût cinématographique) qui se retrouve après de nombreuses années dans un chalet en montagne pour un weekend. Les années ont passé, cinq hivers cinq étés, t’as pas changé, qu’ess’ tu deviens, mais ces quelques amis semblent toujours être soudés, malgré un sombre épisode qui soulève encore quelques mystères. Ils sont, pendant ce weekend, témoins d’un grave accident, et se retrouvent coupés du monde extérieur, puisque même toute vie humaine semble avoir disparu.

Essayer de résumer The End est à peu près aussi compliqué que d’essayer de comprendre ce qu’a voulu faire le trio Torregrossa/Sanchez/Guerricaechevarria dans ce film. Ne connaissant absolument pas l’existence du roman avant d’avoir découvert la película, comme on dit au pays de Quini, je ne peux donc juger ni de la fidélité de l’adaptation, ni de ce qu’il en était déjà du roman au moment de sa publication. Mais je peux déjà m’avancer en disant WHAT THE FUCK LE PRIX SPECIAL DU JURY ? Le donner à Berberian Sound Studio me paraissait la moindre des choses, tant je n’aurai jamais assez de mots pour parler de cette merveille, mais ex-aequo avec The End, ça fait un peu mal là où je pense, et sachez que je ne pense qu’au cul. Sincèrement, ce film est un mystère à part entière pour moi ; les spectateurs qui ressortent de là avec leur bordereau de vote pour le prix du public, ne sachant pas quelle note lui donner (moi, je n’en menais pas large non plus avec le mien). The End n’a pas ennuyé comme The Crack l’a fait, il a plutôt fasciné. Un certain temps. Voir un film dont on ne sait rien auparavant surprend toujours, c’est un fait, mais alors celui-là, il est très fort !theend3

Impossible même de lui donner un genre, tant il mêle des éléments provenant d’un peu partout : thriller, film fantastique, drame… Plus j’y réfléchis et plus je le prends clairement comme un film expérimental, et c’est probablement ce qu’il est en réalité, une œuvre dans laquelle le cinéaste et les scénaristes ont tenté d’expérimenter des choses, car si on ne comprend pas bien le sens du titre durant une grosse partie du film, on devine dans le dernier tiers qu’il s’agit d’un film sur la fin… du monde. Mais ne vous attendez pas à une fin du monde à la Emmerich, non, ici, tout semble avoir un sens tellement philosophique que même les disparitions des membres du groupe sont montrées de façon fantomatique. Et c’est peut-être ça, le problème du film : un film faussement philosophique qui, sous ses airs d’œuvre un peu trop réfléchie, ne trouve absolument plus rien à dire. Et lorsqu’on ressort de la salle, on a l’impression d’avoir été violés, bafoués, au moins autant que pour la saison 6 de Lost. En fait, The End, c’est la saison 6 de Lost, mais en espagnol. Du pur gâchis.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.


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2 commentaires sur “The End

  • kemkub57

    Ben tiens, trouver une critique de ce film que j’ai gagné en BD et qui était une

    Très bonne surprise.
    Si pour 2-3 séquences on devance ce qui peut arriver (parce que c’est ce qui arrive dans les films dans ce cas là, parce qu’un détail est un poil appuyé, le film intrigue jusqu’au delà de son générique. Pas d’explication à ce qui est arrivé, pas besoin et c’est tant mieux.
    Un peu moins de dispute entres amis auraient profité a ce film pour ce consacré au  fantastique tant celui-ci qui est brillamment emmené, du moins dans cette durée de 1h29 qui semble trop courte pour toutes les réelles possibilités de cette production qui apporte également de belles et fortes émotions.
    Par son ambiance ou par certains de ses plans le film évoque P. Weir époque Australienne, Spielberg, T. Gilliam… (édit: depuis sa vision et l’écriture de cette critique je ne me rappelle pas de ce que j’ai voulu dire par là – ha,d’après le dos de la jaquette certainement (la carcasse de l’avion dans) La guerre des mondes pour Spilgy) ce qui constitue un atout de plus. Pour finir la photographie superbe magnifie des paysages qui le sont tout autant.
    BD excellent. Pourtant un 50hz, mais jamais les défauts aperçus sur d’autres titres 50i ne mettent en défaut ce disque au top.