Succès surprise de l’année 2019, c’est très rapidement que Amazon Prime donna le feu vert à la mise en chantier d’une saison 2 de The Boys, série super-héroïque adaptée des bandes-dessinées de Garth Ennis et Darick Robertson, et toujours produite par le duo formé par Seth Rogen et Evan Goldberg. L’année dernière, on vous disait tout le bien qu’on pensait de la première saison, et on récidive pour la deuxième. Il faut dire que les curseurs sont montés d’un cran !
The Boys are back in town !
Prenez les mêmes et on recommence ? Alors oui, on pourrait croire que cette saison 2 de The Boys tournerait en rond après les huit épisodes, très fournis, de la première. Et on ne cachera pas que le doute nous a un temps envahis au visionnage des premières minutes de cette nouvelle fournée. Néanmoins, si la série s’attarde un peu trop à recontextualiser les personnages et les enjeux, elle va bien heureusement très rapidement affirmer sa volonté d’aller encore plus loin, aussi bien dans la forme que dans le fond. En soi, il y a un exemple assez flagrant de cette voie de la surenchère puissance dix mille que la deuxième saison emprunte joyeusement. Dans la première salve d’épisodes, une scène avait fait parler d’elle par son aspect aussi drôle que cruel autour d’un pauvre dauphin qui n’avait rien demandé à personne et qui passait de la banquette arrière d’une voiture jusqu’à fracasser le pare-brise avant, décédant sur le coup. Ici, dans la saison qui nous intéresse, ce n’est pas un petit dauphin innocent qui trouve la mort mais une énorme baleine, tout aussi innocente certes, lorsque nos héros la transpercent avec leur embarcation en plein dans l’abdomen. Le ton est donné, les curseurs sont montés, cette deuxième saison va être celle du trop, celle du plus, celle du super ! Alors oui, on peut rire de cette volonté des personnages de dire « fuck off » à tout et n’importe qui, de l’hémoglobine qui, lorsqu’elle est versée, l’est de manière déraisonnable. On peut penser que la série accumule ces éléments dans le seul seul but de paraître cool… Et pourtant non, vous n’êtes pas devant un énième épisode de la saga Kingsman – prends ça Matthew ! La violence dans l’extrême, qu’elle soit physique ou verbale, contribue à la création d’une esthétique bien particulière et qui deviendra la marque de fabrique de la série. Sa force étant peut-être celle de ne pas vouloir à tout prix faire comic book tant elle assume sa forme télévisuelle en puisant davantage ses références esthétiques dans des œuvres cinématographiques, tout en enrichissant ses thématiques des grandes travaux de la bande-dessinée. Le tout est toujours saupoudré d’une critique assez jouissive de la mode super-héroïque qui régnait en monarchie sur le système hollywoodien avant d’être infectée par un virus.
Au cœur de cette démonstration de surenchère, les grandes thématiques de la série trouvent une résonance encore plus particulière. Bien qu’elles soient majoritairement les mêmes, elles sont amenées à des niveaux de réflexions plus profonds, poussées dans de tels retranchements qu’elles n’en sont que plus intéressantes. Alors qu’on pensait avoir fait le tour, l’arrivée d’un seul nouveau personnage – Stormfront – permet de re-dynamiser l’ensemble des personnages, même ceux qui n’interagissent pas avec elle directement. Dans ce rôle de la nouvelle super-héroïne Aya Cash fait des étincelles et se révèle parfaite face à un Homelander en perte de vitesse, suite aux évènements de la première saison. Les thématiques politiques sont également mieux réfléchies, et permettent un parallèle étonnant avec l’Amérique de Donald Trump. Un parallèle qui s’incarne notamment autour de l’arc narratif de Stormfront, qui soulève des foules entières avec elle, tout en commettant les pires crimes. Dans The Boys, le super-héros n’a de super que le nom. Mal (et poil) incarné de la société, s’ils peuvent trouver (parfois) une certaine rédemption, elle est toujours ici repoussée, combattue, pour ne pas dire détruite. Si on pouvait craindre que The Boys soit, à terme, touché du même virus qui contamine toutes les séries à succès qui est de ne pas prendre de risque par de peur de décevoir leur public et de perdre alors en audience, le show prouve au contraire qu’il s’agit de l’une de ses forces : ne pas se complaire dans la facilité et prendre des décisions douloureuses pour ses personnages. Dans cet esprit, l’épisode final de la deuxième saison coche toutes les cases, en fermant les problématiques soulevées mais en laissant assez de questions en suspens pour la mise en chantier d’une autre saison, tout en bouleversant totalement les acquis, rabattant les cartes. Le rendez-vous est d’ores-et-déjà pris puisqu’une troisième saison a bien été commandée avant même la fin de diffusion de la deuxième.