Considéré outre-atlantique comme l’un des films cultes de la décennie 80, Cocoon (Ron Howard, 1985) ne possède pas la même aura dans nos contrées. Pour réparer cette injustice, Carlotta lui offre cet été une ré-édition en blu-ray.
Le Grand Voyage
Si Cocoon (Ron Howard, 1985) est pour beaucoup de personnes ayant grandi dans les années 80 – période bénie pour le cinéma populaire américain – un classique mémorable, cette comédie de science-fiction n’a pas autant traversé les âges et les générations que d’autres films de la même époque, tels, au hasard, E.T L’Extraterrestre (1982), Les Goonies (1985) ou Gremlins (1984). Alors qu’Hollywood est actuellement touchée par une nostalgie cyclique autour de ces années enchantées – lire notre article Hollywood doit-il arrêter de regarder dans le rétro ? – certains films dont l’aura fut moins resplendissante que les précédents cités, connaissent une seconde vie en vidéo. C’était le cas, entre autres, du génial Miracle Mile (Steve de Jarnatt, 1989) dont nous vous avions déjà parlé à l’occasion de sa re-sortie chez BlaqOut et désormais de ce Cocoon réalisé par Ron Howard en 1985, qui s’offre plus de trente ans après sa sortie, une ré-édition blu-ray chez Carlotta.
Dans les années 80 à 90, la comédie d’horreur/fantastique familiale s’est érigée comme un genre en soit – on vous invite à approfondir la question avec notre article Ce Cinéma qui n’existe plus, bien qu’il tend aujourd’hui à réapparaître – ces films étaient familiaux et populaires parce qu’ils adaptaient des genres que l’on considérait destinés uniquement aux adolescents et jeunes adultes, à une audience plus large et généralisée, de 7 à 77 ans. Le contrat tacite de ces films étaient de permettre aux parents de regarder le monde avec leurs yeux d’enfants, et aux enfants de pouvoir le voir avec le regard de leurs parents. C’est sur cette essence universelle que le cinéma des années 80 a pu transcender les âges et se transmettre de génération en génération. Le scénario de Cocoon se base sur cette philosophie intergénérationnelle puisque cette comédie romantique de science-fiction propose au jeune public de suivre les tribulations d’un groupe de septuagénaires, pensionnaires d’une maison de retraite en Floride. Parmi ces vieillards, trois d’entre-eux rompent le train-train de leur maison de repos en s’introduisant tous les jours dans la piscine d’une villa voisine laissée abandonnée. Alors qu’ils s’y baignent pour une énième fois, ils y découvrent, au fond de l’eau, d’étranges et immenses cocons. Au contact de cette eau, les trois vieux se sentent rajeunir, retrouvant leur vigueur de jeune homme – au grand plaisir de leurs dames – et voyant tous leurs tracas de santé s’envoler. Ce qu’ils ne savent pas c’est que depuis quelques jours, la villa est louée par un groupe d’étrangers. Ces derniers se sont payés les services d’un propriétaire de bateau, Jack Bonner, qui les mène chaque jour en pleine mer d’où ils extraient un à un les cocons. Tombé sous le charme de la très belle femme de la bande, ce dernier va découvrir qu’elle et ses compères étrangers n’ont rien de très humain et viennent en réalité récupérer des vestiges extraterrestres.
Bien qu’il mette des vieillards en tête d’affiche, Cocoon surfe sur les grandes thématiques et figures du cinéma de l’époque. En effet, en revisitant le mythe de la fontaine de jouvence, le scénario de Tom Benedek, transforme ces vieilles légendes d’Hollywood en alter ego des Goonies, gamins turbulents en mal d’aventures. Relecture façon troisième âge du chef-d’oeuvre Rencontres du troisième type (Steven Spielberg, 1977) le film fait un habile et très touchant lien entre le voyage vers un ailleurs – ici, comme chez Spielberg, il s’agit de partir dans le vaisseau des extraterrestres pour découvrir une autre planète et vivre une seconde vie – et la mort inéluctable qui attend ces vieilles âmes. Le grand voyage qui leur est proposé par les aliens donne lieu, dans le derniers tiers, à des séquences d’adieux et de doute particulièrement touchantes qui donnent au récit une double lecture et une profondeur inattendue. C’est aussi cela la force de ce cinéma-là que de parvenir, subtilement, à transmettre aux enfants des concepts compliqués, tel qu’ici celui de la mort, sans pathos ni brutalité. Touchant par sa malice et sa subtilité, le long-métrage gagne à être réhabilité tant l’intemporalité de son sujet et l’universalité de son message emportent tout sur son passage.
Succès d’estime à sa sortie aux Etats-Unis, le film n’a pas connu la même vie par chez nous, au contraire d’autres films réalisés a la même époque par son réalisateur Ron Howard tels que Splash (1984) ou Willow (1988). La re-sortie en blu-ray enrichie de quelques bonus (des featurettes d’époques) et éditée par Carlotta est donc l’occasion de lui redonner un peu de visibilité et d’estime. Car si Cocoon, n’est pas un chef-d’oeuvre, il demeure l’un des longs-métrages les plus emblématiques et représentatifs de l’esprit du cinéma fantastique américain de la décennie quatre-vingt.