Game of Death


Dans la catégorie « Nouveaux talents » de la 23ème édition de cet Étrange Festival est présenté en première française le plutôt attendu Game of Death. Le duo Sébastien Landry et Laurence Morais-Lagace nous dévoile une première réalisation aux airs d’un Jumanji (Joe Jonhston, 1995) mortel à la mode rétromania, avec une bonne dose de pixels et surtout de gore.

One down !

Sept ados chauds comme la braise passent la journée au bord de la piscine entre ennui, picoles et fumettes. Après la découverte hasardeuse d’un jeu de société, ils se lancent dans une partie sans même prendre le temps de lire la moindre notice, la moindre règle. Il s’avère que le jeu, après avoir prélevé une goutte de sang aux joueurs, affiche un chiffre aléatoire avant de lancer un mystérieux compte à rebours sonore. Ce chiffre n’est autre que le nombre de victimes à décimer pour remporter la partie et stopper le jeu infernal qui élimine aléatoirement un joueur au bout d’un certain temps sans meurtre accompli. Malheureusement le reste du film est totalement prévisible, et s’ensuit un jeu de massacre sans queue ni tête avec des personnages clichés au possible. On regrettera avant tout l’absence de règles dans ce jeu mortel et ô combien séduisant sur le papier, laissant les personnages en totale roue libre. Le massacre, s’il est au début plutôt drôle et bien amené, devient répétitif et lassant, débouchant dans un hôpital spécialisé dans les soins palliatifs (quelle originalité !). Game of Death finit le cul entre deux chaises en tentant d’instaurer une ambiance à la fois fun et trop sérieuse pour son sujet. Ainsi, les ados monologuent à n’en plus pouvoir pour en arriver à la conclusion que « la mort, c’est juste le niveau bonus ».

Game of Death prend néanmoins un certain plaisir à jouer avec les références rétro et cinématographiques, et bénéficie de l’aide précieuse des Blood Brothers qui avaient déjà signé les effets spéciaux de Turbo Kid (Yoann-Karl et Anouk Whissel, François Simard, 2015). Le film multiplie les hommages au rétrogaming avec sa musique électro-pop et ses incrustations de Carmaggedon ou encore Hotline Miami pour un rendu final malheureusement trop confus et brouillon. Un melting-pot de culture des 90’s, où se mêlent des changements de format pour le moins insupportables et totalement injustifiés, que ce soit les passages à l’Iphone ou la séquence en Scope. Si l’on sent la volonté des réalisateurs de nous faire partager un univers coloré, trash et rétro, ne ressort de ce long-métrage qu’une parodie mauvais genre de Spring Breakers (Harmony Korine, 2013) à la sauce Destination Finale (James Wong, 2000), au développement paresseux et décevant pour un concept si prometteur. Rajoutez des extraits d’un documentaire sur les lamantins sans aucun intérêt, et vous obtiendrez un patchwork brouillon, fade à l’impression de déjà-vu.

Faut-il préciser qu’à l’origine, Game of Death est le fruit de la toute récente plateforme de vidéos à la demande française Blackpills qui s’est spécialisée dans les formats courts (des séries d’environ dix épisodes de dix minutes). Le film est la compilation d’une série de huit épisodes mis bout à bout, ce qui pose la question de la réelle identité de ce soi-disant long métrage, pas pensé en tant que tel lors de sa création. Le plus insupportable de ce feuilleton/long-métrage reste le développement des personnages, pourtant piliers de l’histoire, accumulant stéréotypes sur stéréotypes. Les propos de Game of Death sont on ne peut plus douteux : l’un des ados du groupe, raie sur le côté et polo blanc à la Funny Games (Michael Hanake, 1997) se lance corps et âme dans le jeu, tuant tous ceux se trouvant sur son passage sans aucun scrupule. Bien entendu, le personnage est fan de jeux vidéo, et ne voit en la tuerie qu’un jeu comme un autre où le but est de remporter la partie. Il est navrant qu’en 2017 ce genre de personnage soit toujours présent dans l’imaginaire collectif, à l’heure où le monde entier sait que jouer à Call of Duty ou Metal Gear ne transforme personne en psychopathe. Ne restent au film que ses effets gores rigolos mais pas mémorables, et le design du jeu électronique très 90’s aux bruitages inépuisables.

Game of Death n’offre pas le spectacle que laisse présager son génial générique d’ouverture, et affiche un rendu kitsch à défaut d’être rétro. Aussitôt vu aussitôt oublié, on préférera se rabattre sur son homonyme hong-kongais qui, dans un autre style, donnait tout son sens à un véritable Jeu de la mort (Bruce Lee et Robert Clouse, 1978).


A propos de Jade Vincent

Jeune sorcière attendant toujours sa lettre de Poudlard, Jade se contente pour le moment de la magie du cinéma. Fan absolue de Jurassic Park, Robin Williams et Sono Sion, elle espère pouvoir un jour apporter sa pierre à l'édifice du septième art en tant que scénariste. Les rumeurs prétendent qu'elle voue un culte non assumé aux found-footages, mais chut... Ses spécialités sont le cinéma japonais et asiatique en général.

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