Le fantôme de l’Opera aka ce pauvre monsieur Claudin est le personnage principal du roman français du même titre écrit par Gaston Leroux. La version que je vous présente ici est déjà un remake, en 1943, d’un précédent Universal Monster, qui lui datait de 1925.
Le rat de l’Opera
L’arthrose, ce fléau, touche en plein cœur, ou plutôt en pleines mains, les articulations du violoniste soliste de l’Opera Garnier, Eric Claudin qui se voit licencié sans ménagements. Ce pauvre homme, amoureux en cachette d’une chanteuse, Christine Dubois, à qui il finance anonymement des cours de chant afin qu’elle devienne une grande soliste, est ruiné et cherche à vendre ses partitions dans l’espoir de devenir un célèbre compositeur. Suite à un malentendu, il pense qu’on lui a volé sa partitions, il tue un homme et se retrouve le visage aspergé d’acide. Défiguré et traqué par la police, il se cache dans les souterrains de l’Opera. Quitte à faire littéralement parti des murs de l’établissement, il en profite pour endormir et tuer la chanteuse lyrique phare de l’Opera pour y placer sa petite protégée. Le roman de Gaston Leroux fut publié en 1910 et remporte immédiatement un grand succès. A peine quinze ans plus tard il est adapté dans une magnifique version par les studios d’Universal. Ce tournage ne fut pas sans encombre, pas moins de trois réalisateurs se succédèrent pour achever ce projet. Un résultat gothique et sombre… Lon Chaney incarne un fantôme terrifiant et mélancolique. Beaucoup plus terrifiant, romantique et mélancolique que celui incarné par Claude Rains (L’homme invisible) dans le remake du même film, vingt ans plus tard. Ce remake en technicolor d’un film muet en noir et blanc jouit des mêmes décors que son aîné. Les décors fabriqués à l’époque avaient coûtés si chers et étaient si beaux qu’ils furent sauvegardés et utilisés dans un nombres incalculables de productions Universal.
Malheureusement cette adaptation est peu fidèle au livre de Leroux. Alors que ce dernier se concentrait sur son rôle titre, le film de 1943 se tourne principalement sur les embrouilles inter-Opéra. Caprices de stars, figurants qui travaillent d’arrache-pied sans être remarqués et administration débordée. De ce fait le fantôme apparaît peu et lorsque Claude Rains apparaît, manque cruellement à la fois de laideur et de tonus. Les décors, qui certes sont les mêmes que la précédente adaptation prennent visuellement trop de place, tape-à-l’œil et beaucoup trop somptueux ils viennent à en éclipser les acteurs qui sont continuellement dessus (pratiquement tout se passe sur la scène). Le résultat des premières expérimentations Technicolor où il fallait en mettre plein la vue au spectateur probablement. Sans parler de l’omniprésence du lustre, spoiler à lui tout seul. Loin d’être un film à la sensibilité gothique, le long-métrage se place ici comme étant une comédie musicale. Numéro de chants à foison en guise d’intrigue, le spectacle est long et lourd, surtout lorsque les deux autres prétendants de Christine Dubois – incarnée par Susie Foster – sont un ersatz de Dupond et Dupont, numéros comiques lourds et exagérés qui accentuent la mollesse du fantôme derrière les murs, tant ils semblent ne pas s’en intéresser.
Du côté des bonus de cette nouvelle édition Blu-ray, Universal ne lésine de nouveau pas. Si l’on n’échappe pas à la bande annonce et aux photos que personne ne regarde, un beau documentaire, très intéressant pour les petits curieux que nous sommes, « Le fantôme de l’Opera démasqué » d’un peu moins d’une heure, revient sur les deux adaptations du polar par Universal. De la réutilisation des décors aux castings, tout est analysé et décrypté. Le film est commenté par Scott MacQueen, l’historien du cinéma que l’on retrouve dans tous les bonus de tout le monde et qui raconte toujours des trucs importants. Bonus suffisants à eux-mêmes donc, qui remplissent parfaitement leur part !
D’innombrables adaptations du roman de Gaston Leroux furent portées au cinéma – dont une par Dario Argento – à la télévision et au théâtre et en comédie musicale, l’une d’elles est d’ailleurs la nouvelle affiche du théâtre Mogador pour la rentrée 2016. Et si Benjamin Millepied quitte au bout d’une année l’administration de l’Opéra Garnier, m’est avis que ce n’est pas dû aux contraintes trop imposantes mais au fantôme qui continue de hanter les murs de l’établissement parisien.
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