Six ans après le film plutôt réussi de Christophe Gans, l’univers Silent Hill a droit à un second long-métrage. En 3D, évidemment. C’est bien connu, lorsqu’un film d’horreur a droit à un sequel en 3D, ce sera forcément une grande réussite, c’est pour ça que l’on continue à en faire, d’ailleurs : Saw 3D, Resident Evil: Afterlife, Destination Finale 4 ou encore Piranha 3DD en sont bien sûr des exemples flagrants. Celui-ci n’échappe pas à la règle, donc, et en tient une sacrée couche.
La colline saigne des yeux
Je préfère vous prévenir d’emblée : je me suis assoupi devant Silent Hill: Révélation 3D. Ça ne me ressemble absolument pas, mais je n’ai juste pas pu tenir le coup devant ÇA. Heureusement, y étant allé avec plusieurs amis, j’ai pu reconstituer les vingt minutes que j’ai perdues dans le dernier tiers du film. Pardon, je voulais dire les vingt minutes que j’ai gagnées, les soixante-quinze autres étant celles que j’ai perdues en regardant cette connerie. Je vous autorise donc à ne pas vous fier à tout ce que je raconte dans les lignes qui suivent. Mais juste pour cette fois, hein. De toute façon, je spoile sans aucun scrupule. Rien à foutre.
A la fin du premier film, nous laissions Rose et Sharon à Silent Hill, où elles étaient restées piégées. Ici, Rose réussit à contacter Christopher à travers un miroir, et lui envoie Sharon grâce à une amulette, mais cette dernière n’a plus aucun souvenir de Silent Hill. Huit ans plus tard, Christopher et Sharon ont changé d’identité, et s’appellent désormais Harry et Heather. Cette dernière est régulièrement prise de cauchemars et d’hallucinations sur la fameuse ville-fantôme. Lorsqu’Harry se fait enlever, Heather (re)découvre sa vraie identité et décide, avec l’aide de Vincent, qu’elle rencontre au lycée, de retourner à Silent Hill afin de le sauver de l’Ordre et de leur leader, Claudia.
Prévue dès la sortie de Silent Hill, premier du nom, cette suite a été proposée à Christophe Gans, qui a refusé, préférant s’atteler à de nouvelles adaptations de La Belle et la Bête et de Fantômas (et, donc, peut-être de remaker toute la filmographie de Jean Marais). L’excellent Roger Avary, qui a signé le script du film de Gans, ne rempile pas, lui non plus. Le scénario et la réalisation échouent donc (c’est le cas de le dire) à Michael J. Bassett, tâcheron britannique du cinéma et de la télé – oui, il en existe – dont le dernier film, Solomon Kane, ressemble fort à ce qu’on peut appeler « une belle merde ». Le pari n’était donc pas gagné dès le départ, et à l’arrivée, c’est pire.
L’un des principaux intérêts du premier film, celui qui, en tout cas, faisait preuve d’un travail minutieux et remarquable, était son image. Michael J. Bassett l’a bien compris, et reprend donc des éléments du décor et des créatures mis en scènes par son prédécesseur, mais en les filmant mal et en y ajoutant DE LA 3D. De la 3D dégueulasse, je veux dire, celle qui n’apporte aucune profondeur de champ, et qui n’a pour intérêt que de faire surgir quelques objets vers le spectateur, une fois de temps en temps. Le seul plan qui vaut le coup ne 3D, finalement, est celui de la cendre qui tombe lorsque le titre apparaît au début – et qui, donc, n’est pas un plan à proprement parler. Je passe rapidement sur les décors absolument laids et les nouvelles créatures qui n’ont pas tellement d’intérêt, si ce n’est que la créature en laquelle se transforme Claudia Wolf ressemble étrangement à un Cénobite.
Difficile de donner suite à un scénario de Roger Avary, lorsqu’on n’a pas un dixième de son talent. C’est pourtant le pari que relève le vaillant Michael J. Bassett, et, tel un mauvais sportif (un sportif français, donc), il se ramasse monumentalement, mais n’en fait pas cas. Le film peut se résumer comme « un film avec des idées sympa », car c’est bien tout ce qui compose Silent Hill 3D : des idées sympa, disséminées par-ci par-là tout au long des 90 minutes. Et entre les idées sympa, beaucoup de conneries qui servent de lien logique – quand c’est logique – pour le film. Après tout, pourquoi s’emmerder à construire un film dont l’histoire tient la route quand on a la 3D comme argument ultime ? Bassett a quand même inséré une idée qui, à mon sens, devrait être réutilisée plus souvent : il tue Sean Bean dès la première séquence. Enfin un film qui a les couilles de le tuer dès le début. Si tous les films avec Sean Bean inséraient cette idée dans leur scénario, ça nous éviterait de perdre du temps et de casser le suspens inutile de Black Death, Outlaw, Equilibrium, Le Seigneur des Anneaux : La Communauté de l’Anneau, The Island, GoldenEye, la saison 1 de Game of Thrones, Cash, Death Race 2, etc. Evidemment, le scénario est ultra-prévisible, on devine dès sa première apparition que Vincent, le personnage interprété par Kit Harington, a quelque chose à voir avec les méchants, mais comme il va se créer une liaison avec l’héroïne, il ira contre ses propres alliés, mais tout finira bien. Mais ce film-là ne tue pas Sean Bean, non, au contraire : Christopher préfère même rester à Silent Hill à la fin du film, pour retrouver Rose. Autrement dit, l’histoire n’a aucun intérêt puisque sa fille vient pour le libérer. Pas pour le laisser là inutilement, non non, POUR LE LIBÉRER.
Si Jodelle Ferland était excellente dans Silent Hill – et a prouvé, depuis, qu’elle était capable de faire encore mieux, dans The Secret par exemple, – le duo d’acteurs de celui-ci fait pâle figure à côté. Radha Mitchell, Deborah Kara Unger et Sean Bean reviennent, mais pour apparaître très peu, au final. Nos deux héros sont donc Adelaide Clemens, une parfaite inconnue qui ressemble à Michelle Williams, mais qui aurait mieux fait de rester inconnue, et Kit Harington, qui, avec ce film, démarre très mal une carrière au cinéma, puisqu’il est surtout connu pour être Jon Snow dans l’excellentissime Game of Thrones. Et pour être franc, on préfère vraiment quand Jon Snow et Ned Stark sont en armure, et réunis ailleurs que dans un mauvais film. Dans le casting, on retrouve également Carrie Anne Moss, qui se fait malheureusement de plus en plus rare, et Malcolm McDowell, dont la carrière ne semble plus que se résumer à des rôles de quasi-figuration dans de mauvais films.
Je ne m’étale pas plus sur le sujet, Silent Hill: Revelation 3D entre directement dans la catégorie « suites dont on aurait bien pu se passer », et dans la sous-catégorie « 3D », en ruinant complètement l’univers du premier film, qui naviguait entre celui du jeu vidéo et les angoisses de Stephen King. Finalement, Uwe Boll ne signe pas de si mauvaises adaptations que ça…
Valentin Maniglia