The Human Centipede 2 (Full Sequence)


Suite-événement du film-événement de 2009, The Human Centipede 2 (Full Sequence) est plus tordu, plus malsain, plus timbré. Déjà scandaleux avant même que quiconque ait pu le voir, le nouveau film de Tom Six défraie la chronique depuis quelques mois à travers l’Europe. Alors, ça vaut le coup au moins ou pas?

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Tom Six est un ouf malade dans sa tête. Rappelez-vous: il y a deux ans, The Human Centipede, petit film hollandais fait avec trois florins six sous avait créé le malaise dans le petit monde du cinéma de genre européen. L’histoire du Dr. Heiter, un scientifique allemand pas tout net (sûrement un ex-nazi, ça m’étonnerait même pas) qui a eu cette idée folle un jour d’inventer… le mille pattes humain. Pas nécessairement gore, mais tout de même assez dérangeant, The Human Centipede a vite gagné un statut de film culte auprès des amateurs d’horreur, le bouche à oreille ayant été le meilleur moyen pour faire découvrir ce film, qui n’a été (légalement) visible en France que lors de sa sortie DVD… le mois dernier! La suite tant attendue (ça sera une trilogie, en fait, le dernier volet étant attendu pour 2013) se déroule en Angleterre, où le film a été produit, réalisé… et banni, le British Board of Film Classification l’ayant tout simplement interdit de sortie, sous n’importe quelle forme.

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Martin assure la sécurité dans un parking de Londres. Mais surtout, Martin est débile. Enfin, mentalement retardé serait un terme plus adéquat, ce qui ne l’empêche pas d’être débile. Et petit, gros, moche et asthmatique en plus de ça. Mais en dehors de tout ça, Martin est fan de The Human Centipede, il est même obsédé par le film, à tel point qu’il se le passe en boucle chez lui et pendant ses heures de boulot; il a également un cahier dans lequel il colle des screenshots du film, des photos des acteurs/actrices, et où il écrit soigneusement, schémas à l’appui, la recette du Dr. Heiter pour préparer un bon mille-pattes humain en évitant les grumeaux.

La différence flagrante entre les deux films provient de la volonté évidente du réalisateur de marquer un contraste entre le « faux » et le « vrai », le « faux » étant le premier film. Une vision pour le moins étrange, mais surtout assez crade de la réalité; si le premier Human Centipede était filmé de manière froide, chirurgicale, celui-ci est tourné en noir et blanc, dans une atmosphère sale, qui rappelle la série des August Underground. Tom Six privilégie les plans plus serrés, dans un désir de montrer ce qu’on ne voyait pas dans le premier. Choix à moitié judicieux, car la décision de ne rien montrer (ou presque) était la force majeure du film; ici, on entre dans un phénomène tout autre, une expérience à proprement parler, sans doute plus extrême que A Serbian Film, qui avait pourtant déjà bien fait parler de lui pour ses séquences de viol et de meurtres pour le moins réalistes.

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La fameuse « full sequence » ne se résume pas donc à plus d’anus cousus, même si, c’est vrai, il y a un peu de ça. Mais il y a un peu plus: au-delà du torture porn auquel on s’attend (et encore, on ne s’attend pas forcément à tout ce que le film contient), on entre dans la vie d’un fou, un vrai dérangé qui est suivi par un psychanalyste dont la barbe n’est pas sans rappeler Karl Marx – remarque tout à fait inutile, je vous l’accorde – qui vit avec une mère qui le hait, et qui se réveille tous les matins avec un joli cadeau liquide, brun et qui sent pas bon dans ses draps. En cela d’ailleurs, on peut scinder le film en deux parties: la première suivant Martin au quotidien, qui nous montre tous les aspects de sa piètre existence, de sa passion maladive pour The Human Centipede jusqu’à la tentative de meurtre de la part de sa mère, en passant par son voisin qui lui rend la vie un peu plus pénible chaque jour et sa morne vie au boulot, qui nous offre les seules scènes « chocs » de cette première partie, le point d’orgue étant la séquence où Martin se masturbe devant The Human Centipede… avec du papier de verre. La seconde partie, à l’inverse, est un huis clos dans lequel les douze victimes de Martin vont subir l’ultime expérience, à savoir devenir un quarante-huit pattes humain. Ce second volet n’est tout de même pas dénué de défauts: on trouvera notamment nombre d’incohérences dans l’histoire, ou de situations trop exagérées pour pouvoir être acceptées dans la « vraie vie ».

L’approche du protagoniste par l’auteur est également assez différente, notamment pour les séquences montrant les « opérations ». Si le Dr. Heiter dans le premier film était un vrai savant fou, un génie incompris, un Fitzcarraldo prêt à tout pour réaliser son rêve le plus dingue, – je compare du Herzog à un film gore, ça va plus du tout, là – Martin, lui, s’affranchit vite de ce titre de génie, pour la bonne et simple raison qu’il n’est rien d’autre qu’un rebus de la société pervers et dégoûtant, pour qui le spectateur peut avoir autant de compassion que de mépris. Aucun de ses actes n’est réfléchi, seule l’idée fixe de créer un vrai mille-pattes humain est omniprésente, et sa folie est une force qui entraîne le film.

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Cette fameuse suite, donc, est déroutante, mais efficace. Là où un Eli Roth (ou n’importe quel autre tâcheron du même acabit) s’adonnerait à 1h30 de torture porn gratuit et fatigant, Tom Six nous livre un film un peu plus réfléchi, mieux construit, avec une mise en abîme intéressante. D’autant plus que la vraie partie gore se situe à la fin du film, la première heure se focalisant surtout sur la misérable vie de Martin, avec peu de scènes chocs à la clé, mais quand même un peu. Le premier épisode de la trilogie était meilleur, mais Tom Six s’était fixé comme objectif d’écrire et de réaliser un second film très différent, qui ne laisse pas le spectateur indemne. A milles lieues de ce que l’on aurait pu s’imaginer, The Human Centipede 2 est porté par un acteur à la performance remarquable, et la clarté du premier cède la place à un noir et blanc oppressant et dérangeant. Mission accomplie.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.

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