Twisters


Encore une nouvelle suite issue d’un succès des années 90, me diriez-vous ? Oui mais Twisters (Lee Isaac Chung, 2024) évite avec brio les travers du cinéma de divertissement de son époque. Sans réinventer la roue, cette suite a surtout comme qualité de retrouver l’esprit du film original : critique.

Une mère, un père et leur enfant adolescent, vus de dos, font face à une énorme tornade qui ravage un champ dans le film Twisters.

© Melinda Sue Gordon / Universal Pictures / Warner Bros. Pictures/ Amblin

Riders on the Storm

Twisters est avant tout le projet de Joseph Kosinski, lui qui, avant de ressusciter Top Gun avec Top Gun Maverick (2022) est allé pitcher une suite de Twister (Jan de Bont, 1996) à Universal. Son idée a été refusée par le studio dans un premier temps, Universal hésitant également avec une proposition d’Helen Hunt, protagoniste de l’original, qui souhaitait écrire et réaliser une suite où son personnage trouverait la mort tôt dans le récit pour laisser ainsi la place à une équipe de chasseurs de tornades au casting très diversifié. Or cette proposition sera également refusée. C’est finalement celle de Kosinski qui sera acceptée en 2022, mais ce dernier, trop occupé à réaliser son projet F1 (sortie en 2025) doit déléguer la réalisation à quelqu’un d’autre. L’heureux élu sera Lee Isaac Chung, réalisateur issu du cinéma indépendant et qui sort alors du succès critique de Minari (Lee Isaac Chung, 2020) récit intimiste et autobiographique lui aussi traversé par des tornades.

Les trois chasseurs de tornades du film Twisters patientent, les bras croisés, tout sourire, dans une large plaine verte, près de leur camion équipé, avec des machines sur le toit.

© Melinda Sue Gordon / Universal Pictures / Warner Bros. Pictures/ Amblin

Twisters en revanche est un récit beaucoup moins intimiste pour Chung qui ne subvertit jamais ni le genre de son film, ni son sujet. Il tient à proposer un spectacle honnête et respectueux de l’esprit du long-métrage dont il est la suite. Et ici la déférence envers le travail de Jan de Bont ne s’exprime pas via des clins d’œil appuyés ou des caméos forcés, mais par la reprise d’éléments visuels – la fameuse Dorothy – et le fait de revisiter des scènes clés. Sans véritablement proposer d’idées novatrices, toutes ces scènes sont redoutables d’efficacité, toujours élégamment filmées et disposent d’effets spéciaux irréprochables et utilisés avec intelligence. Ces derniers sont parfaitement intégrés dans le décor typique de l’Oklahoma, État que Lee Isaac Chung connaît bien puisqu’il était déjà le théâtre de sa précédente réalisation. Seul regret, l’utilisation dans le récit d’un drone qui permet d’offrir des points de vues saisissants sur les tornades, mais qui disparaît bien trop rapidement, frustrant.

L’autre grande qualité de Twisters réside dans son ton qui évite l’autodérision et ne prend pas de haut son sujet. Plutôt que de jouer au petit malin, le film embrasse l’aspect téléphoné de son intrigue et les codes qui la façonnent. Il a foi en son récit et en ses personnages retrouvant ainsi l’esprit du long-métrage original sans pour autant paraître niais ou daté. Pour incarner l’aspect cheesy d’une telle écriture, rien de mieux que Glen Powell qui incarne avec brio un cowboy chasseur de tornades au sourire ravageur et qui propose une prestation d’équilibriste qui frise le ridicule sans jamais s’y abandonner. Moins de louanges pour la talentueuse Daisy Edgar Jones dont le jeu semble parfois en décalé avec le reste de ses partenaires..

Une double tornade s'attaque à un petit bois en bordure de route dans le film Twisters.

© Melinda Sue Gordon / Universal Pictures / Warner Bros. Pictures/ Amblin

Si le rendu des effets spéciaux est impeccable, le film semble parfois trop heureux de montrer ses tornades et ne prend pas toujours le temps de les iconiser. Lee Isaac Chung cite Les dents de la mer (Steven Spielberg, 1975) parmi ses inspirations principales pour Twisters avec l’ambition de réaliser un film de monstres. Si la scène d’ouverture est traitée comme tel et reprend les codes du cinéma d’horreur, le reste du récit met surtout en valeur l’aspect spectaculaire des tornades plutôt que leur aspect horrifique. Chung utilise rarement les apparitions de tornades pour créer de la mise en scène mais les filme comme des éléments naturels de son décor : une approche plus naturaliste que horrifique qui fait ainsi écho à ses travaux précédents. On pourra aussi dénoter la frilosité du long-métrage à évoquer l’influence du dérèglement climatique sur l’apparition de tels phénomènes météorologiques, un choix d’autant plus étonnant que le film n’hésite pas à s’attaquer aux promoteurs qui profitent de ce genre de cataclysmes pour racheter des propriétés à bas prix. Une occasion manquée d’ancrer son récit dans une réalité contemporaine où la question climatique semble inséparable des récits de catastrophes naturelles. Et ça même Le jour d’après (Roland Emmerich, 2004) l’avait (déjà) compris.


A propos de Antoine Patrelle

D'abord occupé à dresser un inventaire exhaustif des adaptations de super-héros sur les écrans, Antoine préfère désormais ouvrir ses chakras à tout type d'images, pas forcément cinématographiques d'ailleurs, à condition qu'elles méritent commentaire et analyse. Toujours sans haine ni mauvaise foi.

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