Le club des monstres 1


Egalement sorti à l’intérieur de la collection Hammer distribuée par Éléphant Films, Le club des monstres ne fait pourtant pas partie de la filmographie de la société de production de Sir James Carreras. Toutefois, le long métrage cherche à s’imprégner de l’âme de la Hammer pour la faire perdurer, en réutilisant acteurs, artistes et techniciens. Verdict sur une œuvre devenue culte au fil du temps.

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L’agence tous risques

Les succès de la Hammer ont forcément fait des jaloux, ou plutôt des envieux : c’est ainsi que fut lancée la société Amicus Productions. Créée à Shepperton au début des années 1960 par deux producteurs américains, Milton Subotsky et Max Rosenberg, Amicus se lance très rapidement dans le cinéma d’horreur avec des films à sketches dans lesquels sont réutilisées les grandes stars de la Hammer, devant comme derrière la caméra : Peter Cushing (qui détient le record avec près de quinze films Amicus), Christopher Lee, Freddie Francis, Roy Ward Baker… Les films Amicus sont rarement de grands films, ils manquent tous cruellement d’âme et sont bien trop souvent confondus avec des productions Hammer, mais c’est ce qui permettait aussi à la société de continuer à vivre et à produire. Après le déclin de la Hammer, Amicus n’a pas survécu bien longtemps, produisant même son dernier film en 1977, deux ans avant la mort de la Hammer. Subotsky continua toutefois à produire des films d’horreur monterclubdans le style de ce qu’il faisait avec Amicus, et Le club des monstres, réalisé en 1980, est ainsi le dernier film produit intégralement par Milton Subotsky – il continuera avec quelques coproductions, la plus célèbre étant Maximum Overdrive (Stephen King, 1986), avant de décéder d’une crise cardiaque en 1991.

En utilisant deux grands noms de l’horreur anglo-saxonne – Roy Ward Baker et Vincent Price –, le film prête aisément à confusion. Pourtant, Vincent Price n’est jamais apparu à la Hammer, et Le club des monstres est tout à fait symptomatique d’une production Amicus : le long métrage – à ne pas confondre, par ailleurs, avec The Monster Squad (Fred Dekker, 1987), comédie horrifique tous publics écrite par le grand Shane Black et qui fait revivre les Universal Monsters – est une anthologie qui a pour objectif d’atteindre un large public et qui se veut plus moderne, résolument « dans l’air du temps ». Alors que le film est adapté du livre de Ronald Chetwyn-Hayes, l’auteur lui-même est un personnage du film, qui prend les traits de John Carradine et qui, au début du film, rencontre le vampire Eramus (Vincent Price) : en échange d’un peu du sang de l’auteur, Eramus l’emmènera dans un club où se retrouvent toutes les créatures surnaturelles de Londres et lui racontera trois histoires comme nouvelles sources d’inspiration. Dans la première, on rencontre une créature hybride, le Shadmock (James Laurenson), un monstre à l’apparence humaine dont le sifflement est mortel ; la seconde suit la triste vie du jeune Lintom (Warren Saire), dont le père est souvent absent, et qui découvre un jour que ses parents (Richard Johnson et Britt Ekland) sont des vampires ; dans la troisième etmonsterclub dernière histoire, Sam (Stuart Whitman), un cinéaste, part en repérages pour son nouveau film dans un minuscule village du Norfolk, qui se trouve être habité par des goules qui refusent de le laisser partir.

À travers ces trois histoires, Le club des monstres offre finalement un spectacle radicalement différent de ce que l’on a pu voir dans la totalité des films produits par la famille Carreras, prouvant ainsi que le contexte et la promo ont une influence indéfectible sur ce qui peut amener un spectateur à aller voir une telle œuvre. Oublié, le classicisme de la Hammer, oubliés, les décors somptueux et les costumes minutieusement travaillés ; mais surtout, et c’est là le plus important, oubliée, l’envie de faire peur. Ou en tout cas, si elle n’est pas oubliée, elle est absolument ratée. Le club des monstres est un film étrange qui cherche à tout prix à imiter la Hammer… après la mort de la Hammer, ce qui conduit donc à s’en détacher ponctuellement, créant ainsi une bizarrerie visuelle parfois indigeste, entre réalisation classique et écarts visuels qui n’obéissent à aucune règle, qui pouvaient alors sembler modernes mais qui ne sont plus aujourd’hui que ringards. Comme dans beaucoup d’anthologies, les segments entre eux sont assez inégaux, et malgré la présence de beaucoup de nos trognes préférées du cinéma de genre européen de l’époque (Vincent Price, Donald Pleasence, Patrick Magee, Richard Johnson, la belle Britt Ekland), les sketches s’essoufflent rapidement – sauf celui des goules, qui reste indéniablement le meilleur. Le point le plus négatif reste tout de même le fil rouge, où l’on retrouve entre chaque segment Vincent Price et John Carradine dans le Monster Club, et dont l’intérêt réside dans les échanges dialogués entre les deux monstres (sacrés), mais dans lequel l’accent est plutôt mis sur les séquences musicales, qui voient défiler différents groupes de heavy metal et de glam rock de l’époque (The Pretty Things, Night…), mais qui se trouvent être chiantes à mourir, et qui confirment bien le fait que Le club des monstres est un film écrit et réalisé sans passion, qui ne se regarde tout de même pas sans plaisir et qui a eu la chance de devenir culte, mais qui ne le méritait peut-être pas tant que ça.

Disponible lui aussi dans un combo Blu-Ray/DVD distribué par Éléphant Films, le long métrage de Roy Ward Baker profite d’une très belle restauration avec une image impeccable : les couleurs extrêmement présentes, surtout dans les séquences du club, sont très belles. Côté son, la piste DTS-HD Dual Mono du Blu-Ray nous offre le délice de profiter pleinement des voix pénétrantes et tellement cultes de Vincent Price, de Donald Pleasence et de Patrick Magee ; le régal est moindre, par contre, lorsqu’il s’agit des séquences musicales, mais les partitions des segments joue à contrebalancer parfaitement cette frustration. Dans les bonus, on retrouve bandes-annonces, galerie photos et, bien sûr, la toujours très intéressante intervention – de 33 minutes – d’Alain Schlockoff.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.


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