L’homme de nulle part 3


Réalisé par un metteur en scène assez brillant dans le western et ailleurs, j’ai nommé Delmer Daves, L’homme de nulle part est édité en DVD et Blu-Ray par Sidonis Calysta.

Mae, debout les mains sur les hanches, toise Jubal assis à côté d'elle, tous les deux dans un clair-obscur très marqué avec la lumière de la lune, scène du film L'homme de nulle part.

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Tu ne commettras pas d’adultère

Glenn Ford joue aux cartes avec un camarade dans un saloon, le visage à moitié plongé dans la pénombre, scène du film L'homme de nulle part.

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Le western a comme tous les genres des réalisateurs phares, et ce à toutes ses périodes. Dans le cas de Delmer Daves, on peut établir sans sourciller que c’est un cinéaste dont les créations westerniques surviennent après la période classique, et pour qui le western moderne, ou western psychologique, ou surwestern (chacun a sa tite terminologie qui fait bien, moi je prends les trois selon qu’est-ce que je veux) a été le sentier pionnier. Bien qu’il ait réalisé également des films de guerre ou des films noirs marquants comme Les Passagers de la Nuit (1947), ses réalisations du Far West sont certainement les plus renommées, 3h10 pour Yuma (1957, remaké en 2007 par l’excellent réalisateur de Logan James Mangold) en tête, mais aussi La Flèche brisée (1950) ou La Colline des potences (1959), connus pour leurs positions anti-racistes et tous deux également édités en support numérique par Sidonis Calysta. Aujourd’hui c’est au tour de L’homme de nulle part, tourné en 1956, d’être proposé en DVD et en Blu-Ray par l’éditeur.

Jubal Trooper, fuyant on ne saura jamais quoi, est recueilli par Sherp Horgan, propriétaire aisé qui l’embauche en compagnie de ses autres ouvriers. Tout commence par se passer comme sur des roulettes, mais la femme de Sherp, Mae, se met à allumer assez violemment Jubal : bien qu’il résiste à ses avances cela suffit à susciter la jalousie d’un de ses collègues qui avait eu précédemment une aventure avec Mae, Pinky, et à lancer un engrenage de convoitise et de violence…Sur ce canevas, il faut bien avouer que le seul défaut de L’homme de nulleBlu-Ray du film L'homme de nulle part édité par Sidonis Calysta. part est, ponctuellement, une trop grande propension à un romantisme un peu trop glamour et mélodramatique, car au-delà de cela, le film fait bien partie des westerns de qualité. Réalisé par un maître du genre (le Cinemascope notamment est utilisé admirablement), le long-métrage tire sa richesse non seulement d’un jeu d’acteur très convaincant (Daves ne s’y trompera pas en faisant à nouveau appel à Glenn Ford pour 3h10 pour Yuma) mais surtout d’une construction shakespearienne et psychologique. En 1956, le psychodrame américain à la Tenessee Williams est déja passé par-là et on le sent : plus proche d’un Désaxés (1961, John Huston, écrit par Arthur Miller, autre auteur de théâtre psychologique) que des cavalcades ou flingueries d’un Massacre de Fort Apache (1948, John Ford), L’homme de nulle part nous fait suivre des protagonistes dont la psyché est le fil conducteur de l’intrigue, écrits avec humanité et justesse. A cela s’ajoute des événements et des traits (la jalousie) qui évoquent également le théâtre shakespearien et surtout une pièce comme Othello… Si Shakespeare avait été chrétien par contre, car le motif religieux est bien présent (les pèlerins nomades, le prénom du personnage principal, Jubal, qui est un personnage biblique) et que les jaloux sont punis.

En bonii, avec les galerie photos et bande annonce, les présentations de François Guérif et de Patrick Brion ne manquent pas d’éloges pour cette réalisation de Delmer Daves sur lequel ils reviennent tous deux longuement (ainsi que sur les têtes d’affiche Glenn Ford, Felicia Farr, Ernest La Horde Sauvage et Rod Steiger), pour un film qui place le western dans de hautes cimes d’écriture et de soin visuel et de construction des personnages. Sidonis nous ravit à nouveau, étoffe toujours plus une collection western qui devient une référence en la matière.


A propos de Alexandre Santos

En parallèle d'écrire des scénarios et des pièces de théâtre, Alexandre prend aussi la plume pour dire du mal (et du bien parfois) de ce que font les autres. Considérant "Cannibal Holocaust", Annie Girardot et Yasujiro Ozu comme trois des plus beaux cadeaux offerts par les Dieux du Cinéma, il a un certain mal à avoir des goûts cohérents mais suit pour ça un traitement à l'Institut Gérard Jugnot de Jouy-le-Moutiers. Spécialiste des westerns et films noirs des années 50, il peut parfois surprendre son monde en défendant un cinéma "indéfendable" et trash. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/s2uTM


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