Instinct de survie 1


Nouvel aileron en vue dans l’océan du cinéma qui fais pas genre, avec la sortie en salles du nouveau film de Jaume Collet-Serra, The Shallows que l’on traduirais littéralement, « les bas-fonds » mais qui s’offre, une fois n’est pas coutumes, un titre français tout pourri : Instinct de survie.

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Dès que les vents tourneront, nous nous en allerons (de requin)

Bien inspiré par le succès du film de Tonton Spielberg, Les Dents de la Mer (1975), considéré par beaucoup comme le premier blockbuster de l’histoire du cinéma, les studios n’ont eu de cesse de produire, au fil des ans et des décennies, des tonnes d’ersatz. De tous les sous-genres, celui du film d’attaque de requins est donc aussi, sans nul doute, l’un des plus prolixes en nanardises de bas étage. Le studio The Asylum est sûrement celui qui l’a le mieux compris, exploitant le filon jusqu’à en racler la vase, allant même jusqu’à transformer les requins tueurs en tornades dans Sharknado (Anthony C. Ferrante, 2013) ou en avalanche dans Avalanche Sharks (Scott Wheeler, 2013). Rien que ça. Il faudra quand même admettre que quelques films produits dans l’optique de retrouver la frayeur initiale du film de Steven Spielberg sortent un peu du lot, bien que de qualité inégale. De l’australien The Reef (Andrew Traucki, 2010) en passant par Peur Bleue (Renny Harlin, 1999), le film allemand Dérive Mortelle (Hans Horn, 2006) et imagessûrement le meilleur d’entre tous, Open Water (Chris Kentis, 2003). S’ajoute donc désormais à cette liste, le nouveau film de Jaume Collet-Serra – l’homme derrière le film d’horreur Esther (2010) et quelques liamneesonerie comme Sans Identité (2011) et Night Run (2015) – intitulé The Shallows en version originale comprendre, Les Bas-Fonds – mais retitré en France avec beaucoup d’inspiration et une recherche assidue de l’équipe marketing : Instinct de Survie.

Incarnée par la magnifique Blake Lively – dont l’équipe marketing a par ailleurs bien compris que l’opportunité de pouvoir l’observer une heure et demie durant en bikini était l’argument de vente principal du film – Nancy est une jeune texane qui s’embarque pour un road trip au Mexique dans le but d’y trouver un spot de surf ultra secret dont sa mère, elle-même surfeuse mais aujourd’hui disparue, lui avait souvent parlé. Embarquée dans ce lieu sauvage, la jeune femme va vite déchanter quand, alors qu’elle évolue bien seule au milieu de ses vagues agitées, un grand requin blanc va la prendre en chasse. Perchée sur un minuscule rocher avec pour seule compagnie une mouette – la révélation du film, promise probablement à une nomination à l’Oscar de la Meilleure Actrice dans un Second Rôle aux côtés de Meryl Streep – et la gangrène qui commence à lui bouffer le pied des suites d’une grave entaille à la jambe causée par le méchant requin, elle va devoir faire preuve de courage et d’abnégation pour survivre et s’opposer à ce squale déchaîné.

En dehors du fait qu’il tente de réhabiliter un sous-genre du cinéma d’horreur tombé en désuétude depuis qu’il a été investi par le cinéma d’exploitation bas-de-gamme, The Shallows intéresse parce qu’il s’ajoute à la longue liste des survival movies sortis ces dernières années sur nos écrans. Difficile pour lui alors de tenir la comparaison face à des films aussi spectaculaires que Gravity (Alfonso Cuaron, 2013), The Revenant (Alejandro Gonzales Innaritu, 2016), Seul sur Mars (Ridley Scott, 2015) ou bien encore 127 Heures (Danny Boyle, 2010) auquel le film fait d’ailleurs très souvent penser. Et du point de vue du pur survival, le film, et ce même s’il est très en dessous des films précédemment cités du point de vue de la mise en scène, réserve quand même son lot de tension 309844-thumb-655x360et d’apnée et c’est bien là le principal. On regrettera toutefois que la partie la plus âpre et la plus réussie de ce survival soit ternie par la bêtise d’une première partie de film véritablement hideuse, entre séquence ridicule dans un pick-up mexicain aux dialogues dignes d’une télénovela, incrustations de sms et autres conversations facetime en maxi-géant sur l’écran – je propose que nous mettions en prison systématiquement tous les réalisateurs qui osent cette horrible faute de goût – et séquence de surf clippée d’un ridicule absolu, avec son lot de plans dont la seule utilité est de filmer le fessier et le décolleté de l’actrice. Quant au visage de celle ci, il est, lors des mouvements de surf un peu plus complexes à effectuer, incrusté numériquement de la manière la plus ratée qu’il m’ait jamais été donné de le voir… Malgré son fort potentiel de survival hardcore le film s’ensable donc finalement lui-même en se laissant envahir par ses relents de pur produit d’appel commercial revêtant par intermittence sa gueule difforme, entre clip déshabillé passant sur MTV et publicité pour une marque de bikini aux tissus auto-séchants.

 


A propos de Joris Laquittant

Sorti diplômé du département Montage de la Fémis en 2017, Joris monte et réalise des films en parallèle de son activité de Rédacteur en Chef tyrannique sur Fais pas Genre (ou inversement). A noter aussi qu'il est éleveur d'un Mogwaï depuis 2021 et qu'il a été témoin du Rayon Bleu. Ses spécialités sont le cinéma de genre populaire des années 80/90 et tout spécialement la filmographie de Joe Dante, le cinéma de genre français et les films de monstres. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/sJxKY


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