Moonwalkers


Le français Antoine Bardou-Jacquet nous offre un premier long-métrage délirant et psychédélique, nous plongeant dans les seventies britanniques. Reprenant le fameux mythe de la vidéo de l’alunissage du programme Apollo falsifiée par les États-Unis avec l’aide d’un certain Stanley Kubrick, Moonwalkers s’inscrit dans la lignée de ces films barrés au charme so british, mais un peu too much pour être entièrement apprécié.

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Fly me to the moon

Les années hippies, le trucage d’une fausse retransmission de l’alunissage, des personnages hauts en couleurs et timbrés… Moonwalkers avait tout pour promettre un premier long-métrage hallucinant au scénario assez particulier pour constituer un récit riche en péripéties. Antoine Bardou-Jacquet fait pourtant l’erreur d’oublier son histoire pour tomber dans l’exercice de style, s’appuyant sur la culture des seventies, où la caméra elle-même semble avoir ingurgité toutes les drogues inimaginables. Partant d’un ton plutôt sérieux, le film s’ouvre pourtant sur un générique psychédélique digne du clip des Beatles Yellow Submarine. On y découvre le personnage principal, incarné avec brio par Ron Perlman, vétéran du Vietnam hanté par les victimes à moitié décomposées, grouillantes de vers. Contacté par l’armée américaine et la CIA, ce dernier, armé d’une mallette pleine à craquer de billets, doit proposer le tournage d’un faux alunissage à l’agent de Stanley Kubrick. Lors d’un quiproquo comique, il confie l’argent à Jonny, petit escroc de bas étage interprété par Ruppert « Ron Weasley » Grint qui le roule faisant passer son ami camé Léon (Robert Sheehan) pour Kubrick. Tous trois se retrouvent à fuir la mafia londonienne et la CIA, proposant à un comité d’artistes hippies de tourner l’alunissage. Fin de cette première moitié, très prometteuse, divertissante, amusante, et originale, avant que le film ne s’enlise dans un esprit halluciné et psychédélique. Les protagonistes vivent quelques jours au sein de cette communauté à côté de la plaque et de leur époque, où s’enchaînent séquences hallucinatoires et 2personnages exubérants, souvent un peu trop. Le spectateur perd le fil du film pour assister à toutes les péripéties de nos héros au pays des hippies, où orgies et acides sont de rigueur.

Si les qualités de Moonwalkers sont indéniables, il n’en reste pas moins un film coincé entre deux genres, tâtonnant entre deux tons peinant à s’accorder. On pourrait citer comme référence des chefs-d’œuvre comme Hot Fuzz (Edgar Wright, 2007) ou Severance (Christopher Smith, 2006), alliant violence décomplexée, situation trash et comique. Le film oscille entre thriller où CIA et mafia se retrouvent pour un affrontement final sanglant mais délirant, et comédie un peu trop poussive et particulière pour s’harmoniser avec le prétendu sérieux imposé. Scénettes comiques et combats trashouilles se rencontrent, ne parvenant pas pour autant à trouver d’équilibre convenable dans l’ambiance pop et décontractée des seventies, rendant le tout confus mais non moins jouissif. Si scénaristiquement Moonwalkers présente des tares qui lui sont fatales, il reste un petit bijou visuel, alternant science-fiction, visions cauchemardesques et délires pops colorés.

L’ambiance seventies et l’univers se suffisent finalement à eux-mêmes, Antoine Bardou-Jacquet nous entraîne dans un tourbillon de références allant des Monty Python aux Pink Floyd, pour un résultat propre et graphique. L’humour est bien entendu au rendez-vous, même si les quelques gags bien pensés ne parviennent qu’à nous arracher quelques rares pouffements, parfois forcés. Le duo improbable Perlman/Grint brille à l’écran, davantage par leurs prestations 3 (1)que leurs personnages qui se révèlent creux, peu attachants, ne connaissant aucune évolution. Le film se clôt en queue de poisson, où l’on ne se souvient ni des enjeux du film, et encore moins des convictions de ses protagonistes.

Moonwalkers vient puiser ses atouts dans son univers plus que son scénario, pour peindre une odyssée spatiale farfelue où l’on ne parvient plus au final à démêler le vrai du faux. Finalement, avons-nous été réellement sur la Lune ? Le faux documentaire Opération Lune (William Karel, 2004) étudiait la fameuse question, Room 237 (Rodney Ascher, 2012) insinuait que Kubrick aurait caché des indices dans Shining (1980). Soutenu par un casting de qualité, Moonwalkers laisse finalement l’alunissage de côté pour nous plonger dans les bouffées d’herbes et autres marijuanas d’une génération cinématographiquement intemporelle, où un simple acide suffit à nous envoyer par delà les étoiles.


A propos de Jade Vincent

Jeune sorcière attendant toujours sa lettre de Poudlard, Jade se contente pour le moment de la magie du cinéma. Fan absolue de Jurassic Park, Robin Williams et Sono Sion, elle espère pouvoir un jour apporter sa pierre à l'édifice du septième art en tant que scénariste. Les rumeurs prétendent qu'elle voue un culte non assumé aux found-footages, mais chut... Ses spécialités sont le cinéma japonais et asiatique en général.

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