La fille de Jack l’Éventreur


Dernière sortie de la collection Hammer d’Éléphant Films, La fille de Jack l’Éventreur est le dernier film de Peter Sasdy pour la Hammer. Une collaboration qui aura duré le temps de trois films et qui trouve avec ce long métrage son point d’orgue.

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Je suis le spermatozoïde le plus rapide de Jack

Enfant, Anna (Angharad Rees) est témoin du meurtre de sa mère par son père, qui n’est autre que Jack l’Éventreur. Quinze ans plus tard, alors qu’elle est adolescente, elle commet elle aussi de sauvages assassinats pendant qu’elle est en état de transe. Le psychiatre John Pritchard (Eric Porter), admirateur des travaux de l’un de ses contemporains, un certain Sigmund Freud, recueille Anna chez lui afin de travailler sur son esprit, persuadé qu’il pourra la guérir. Mais Anna n’a aucun souvenir du secret (de famille) qu’elle cache au fond d’elle, et la tâche va se révéler bien plus difficile qu’il ne pouvait y paraître pour le docteur Pritchard…

Un sujet comme celui de Jack l’Éventreur aurait eu du mal à passer entre les mains de la Hammer. Mais plutôt que de réduire lehandsoftheripper projet à une adaptation des méfaits du plus célèbre des serial killers, les deux auteurs L.W. Davidson et Edward Spencer Shew revisitent le mythe en donnant au tueur de Whitechapel une fille, et en s’intéressant particulièrement à la psychologie du tueur sans en oublier toutefois ce que tout le monde attend : les meurtres. Dans cette optique, La fille de Jack l’Éventreur relève bien plus du thriller que du film d’horreur mais les nombreuses séquences gore rappellent le spectateur à l’ordre, comme pour ne pas oublier qu’il s’agit d’un film estampillé Hammer. Ainsi, l’on a droit à de belles séquences sanguinolentes qui valent largement le coup – les effets sont réalisés par le vétéran de la Hammer Roy Ashton, créateur des plus beaux et des plus mémorables maquillages du studio avec, à son actif, du Dracula, du Frankenstein, du loup-garou, etc.

En fait, c’est peut-être bien là que La fille de Jack l’Éventreur tire ses points forts : il s’agit du dernier film à posséder l’esprit de la Hammer, à une époque de pleine mutation dans le style du studio. Produit par la légendaire Aida Young, monté par Chris Barnes, filmé par Kenneth Talbot, costumes signés Rosemary Burrows, le long métrage semble être une compilation des meilleurs talents de la Hammer qui se sont associés pour faire magnifiquement briller le studio une dernière fois avant le début de la chute. La musique, composée par Christopher Gunning, consiste en quatre magnifiques thèmes classiques enivrants, tantôt doux, tantôts angoissants, qui fonctionnent à merveille et qui rappellent aisément les plus grandes heures de la Hammer. Enfin, le dernier atout majeur du film est son casting. La jeune Angharad Rees, alors âgée de 27 ans et remarquée l’année précédente dans une adaptation télévisée de Jane Eyre (Delbert Mann, 1970), explose dans ce film dans un rôle qu’elle endosse à merveille. Mais c’est surtout Eric Porter, à l’époque pilier de la Royal Shakespeare Company, qui brille dans le rôle du docteur Pritchard. Malheureusement méconnu en dehors de ses prestations théâtrales, Porter se pose comme l’un des plus grands acteurs britanniques de sa génération, et il ne fait aucun doute que la Hammer a tapé dans le mille en l’engageant pour interpréter ce psychiatre dont le talent éclate complètement dans l’angoissant et magnifique climax, situé dans la galerie de chuchotements de la Cathédrale St. Paul, reconstituée pour l’occasion en studio.

Le combo Blu-Ray/DVD, sorti le 6 mai 2014 chez Éléphant Films, permet de redécouvrir le film dans un nouveau master très réussi, bien que l’on puisse déplorer le grain désagréable qui parasite l’image lors des plans peu lumineux. Côté audio, la version originale est bien évidemment conseillée, ne serait-ce que pour la voix d’Eric Porter, et pour la place laissée à la musique, qui est bien plus belle sur la piste anglaise. En bonus, l’habituel entretien avec Alain Schlockoff qui nous parle du film, de son époque et de sa production avec ses remarquables connaissances et anecdotes, est à ne manquer sous aucun prétexte, et en accompagnement, les bandes-annonces et la galerie d’images sont de mise. Une très belle édition pour l’un des plus beaux films de la Hammer.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.

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