Le cirque des vampires


Sans aucun doute l’un des films les plus célèbres de la période seventies de la Hammer, Le cirque des vampires débarque enfin en vidéo chez nous dans une édition digne de ce nom.

vampirecircus

Le clown est roi

Si la collection Hammer distribuée par Éléphant Films s’intéresse à la dernière période de la société de production anglaise, celle du déclin et du chant du cygne, mais aussi finalement la moins discutée, et de fait, la moins connue, Le cirque des vampires a bénéficié de son petit succès à l’époque. On ne doute d’ailleurs pas que plus d’un d’entre vous ait pu découvrir ce film il y a – déjà – plus de dix ans, lorsqu’il fut édité par Aventi dans sa collection Mad Movies, le DVD étant joint au légendaire magazine de Jean-Pierre Putters. Aujourd’hui, sa sortie dans un nouveau format permettra peut-être à une nouvelle génération de futurs cinéphages et passionnés d’horreur de découvrir cette histoire de vampires, poule aux œufs d’or de la Hammer.

Le producteur Wilbur Stark n’a jamais eu de réel intérêt pour le film d’horreur, si ce n’est celui de l’argent. Et ça tombe bien, parce que l’un de ses bons amis est Michael Carreras, fils de Sir James et producteur exécutif de la Hammer, qui ne semble pasvampirecircus particulièrement aimer ce genre non plus. L’idée d’associer le cirque et les vampires provient de Stark lui-même, mais l’inconsistance de son histoire repousse le développement de la production. Ce sera avec l’aide de George Baxt, autre ami de Stark un peu plus versé dans le film de genre, et de Judson Kinberg que le scénario du Cirque des vampires trouvera sa voie et sa version finale. L’histoire prend place à la fin du dix-neuvième siècle dans le village de Schtettel, en Europe de l’Est, où un vampire, le Comte Mitterhaus (Robert Tayman), terrorise les habitants. Les villageois, menés et aidés par le professeur Müller (Laurence Payne), réussissent à neutraliser l’ennemi, mais celui-ci, avant de mourir, jette un sort maléfique à ses bourreaux. Peu de temps après, une épidémie ravage le village, qui est alors obligé de se mettre en quarantaine. L’étrange arrivée d’un cirque va devenir l’intérêt principal des habitants de Stetl, alors que les enfants disparaissent au fur et à mesure…

Il n’est pas exagéré de dire que Le cirque des vampires est un film remarquablement symptomatique de la période seventies de la Hammer. D’abord parce qu’il n’est, paradoxalement, pas si remarquable, étant construit sur un scénario qui possède autant d’originalité que de défauts. Ensuite parce que le tournage, particulièrement difficile – le réalisateur Robert Young filmait ici son premier long métrage, difficulté supplémentaire pour un tel projet –, a dû subir d’importants retards, ce qui a eu une incidence indéniable sur le projet fini. L’habitude de la Hammer était d’enchaîner les tournages pour n’avoir qu’à se soucier d’un seul projet à la fois. Ainsi, Le cirque des vampires n’était qu’un projet parmi d’autres, qui devait se terminer de façon à ce que, la semaine suivante, la société de production puisse enchaîner avec Dracula 73 (Alan Gibson, 1972), nouvelle aventure du vampire de Bram vampirecircusStoker avec Christopher Lee et Peter Cushing. Le retard du tournage va se transformer en arrêt prématuré et le montage final se réalisera sans les scènes qui n’eurent pas le temps d’être shootées. Le casting, lui, est composé, comme beaucoup de films de cette période de la Hammer, de « nouveaux talents » (Anthony Higgins, Robin Sachs, Domini Blythe) qui font face à des acteurs plus confirmés (Laurence Payne, Thorley Walters, Adrienne Corri) ; l’importance des rôles donnés à des acteurs plus jeunes est certes plus grande, mais ceux-ci manquent cruellement d’inconsistance, ce qui pousse à s’intéresser davantage à des personnages moins importants mais mieux incarnés. Enfin, la Hammer trouve d’autres intérêts que l’épouvante à partir du début des années 1970 : parmi ceux-ci, l’érotisme et le gore sont les principaux éléments qui servent parfois de moteur à des œuvres peu réussies. Si le film de Robert Young n’est pas radin là-dessus – les amateurs de nudité et/ou d’effets gore seront ravis –, le terme « cirque » contenu dans le titre offre un nouvel intérêt dans le spectacle : celui de montrer des acrobates, dresseurs de félins et autres attractions circassiennes. Mais encore une fois, les acteurs prenant part à ces séquences – on retrouve notamment David Prowse, tout fraîchement sorti du tournage d’Orange Mécanique (Stanley Kubrick, 1971) où il rencontra sa collègue Adrienne Corri, et qui deviendra, moins d’une demi-douzaine d’années plus tard, le plus grand méchant du cinéma en enfilant le costume de Dark Vador – sont trop peu exploités, et alors que le duo formé par David Prowse et le nain fonctionne très bien en apportant de l’humour à l’œuvre, un personnage comme la femme-tigre méritait d’être plus amplement développée.

L’originalité du Cirque des vampires n’est pas négligeable, loin de là. On doit même reconnaître que Robert Young s’en est plutôt bien tiré pour un premier essai – il faut savoir qu’il a tenu à tourner avec de vrais animaux, une grande première dans l’histoire de la Hammer qui, pour des raisons de temps, de budget et de simplicité, n’avait jamais eu affaire à de vrais animaux sur un set. Malheureusement, le film pêche à de nombreux endroits, rendant ainsi responsables le scénario trop inégal, des acteurs dirigés avec peine, un tournage écourté et une production difficile. Il est aujourd’hui possible de découvrir ou redécouvrir ce film culte de la Hammer en Blu-Ray, à l’intérieur de la belle édition combo Blu-Ray/DVD distribuée par Éléphant Films – disponible depuis le 6 mai dernier –, qui profite d’une image superbement restaurée pour un master HD impeccable, deux pistes audio (anglaise et française) qui font la part belle à la superbe B.O., classique mais efficace, de David Whitaker. En bonus, comme toujours, l’intervention d’Alain Schlockoff (25 minutes) est très complète, intelligente et constructive, et est complétée par la galerie d’images et les bandes annonces.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.

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