Réalisé par Alfredo B. Crevenna, qui a commis quelques Santo, La planète des envahisseuses fut le dernier film projeté lors de cette bien trop courte rétrospective. Nous y retrouvons une figure emblématique de la science-fiction mexicaine, la sublime Lorena Velasquez, la femme vampire du Vaisseau des monstres, qui, par ailleurs, affrontera Santo dans une des ses nombreuses aventures. Ce film fait suite à Gigantes planetarios, dont l’absence de visionnage ne gênera aucunement la compréhension de son successeur.
(You know that I love you boy) Hot like Mexico Rejoice !
Force est de constater que, dans les films de science- fiction mexicains, les femmes ont souvent le mauvais rôle, La planète des envahisseuses (Alfredo B. Crevenna, 1965) ne dérogeant pas à la règle. Vilaines tentatrices courtement vêtues qui veulent asservir l’homme, elles sont, dans trois films sur les cinq présentés, une menace : LA menace. Tour à tour kidnappeuses de mâles reproducteurs, vampires ou encore amazones. Ici elles enlèvent des spécimens humains pour voler leurs poumons afin de s’adapter à l’atmosphère terrestre et envahir notre planète, les garces. Pire encore, elles constatent que ce sont les poumons des enfants dont elles ont besoin (même des enfants asthmatiques ?) et n’hésitent pas à user de la force lumineuse de leur soleil en envoyant des rayons mortels sur les maîtresses d’écoles afin de récupérer les charmantes et innocentes têtes blondes. Mais les femmes, pauvres créatures du diable, sont malheureusement faibles, et les hommes finissent par reprendre le dessus en leur faisant du charme. Difficile de s’insurger tant le machisme est assumé. Dans La planète des envahisseuses, l’actrice principale joue le rôle de deux jumelles. L’une est la méchante, froide et impénétrable (sauf pour le scientifique humain, lui il peut) et l’autre est la gentille sœur qui se lie d’amitié avec les prisonniers et les aide à s’échapper. Si elles se tolèrent mutuellement, c’est que la légende affirme que l’une ne peut vivre sans l’autre. L’histoire de la relation des jumelles s’inspire des nombreux mythes des jumeaux civilisateurs propres aux légendes antiques.
Que reste-t-il aujourd’hui de la mémoire de ces films ? Demandez à Tim Burton, tiens ! Si il n’a jamais caché son amour des films de genre avec son film-hommage Frankenweenie (2012), il faut reconnaître qu’il n’a pas oublié non plus de regarder quelques films projetés lors de cette rétrospective et qu’il a utilisé à bon escient certaines scènes et accessoires dans son cyniquement drôle Mars Attacks ! (1996). Certes, le scénario est de Jonathan Gems, me direz-vous. On s’en fout, tout y est quand même. Une soucoupe volante, des caricatures comme lui-même sait les diriger et un pied-de-nez aux valeurs américaines avec son premier hommage aux films de genre qui est aussi un coup de pied au cul des blockbusters – mais avec un casting hollywoodien, faut pas pousser non plus. Et si je parle de Mars Attacks ! ce n’est pas seulement à cause des soucoupes volantes, dont il ne manque que la ficelle, et des scénarios rocambolesques. Non. C’est aussi à cause du chewing-gum à base d’oxygène martien, de démarches ondulantes pour séduire le petit terrien et des machines qui traduisent le langage humain et extraterrestre, entre autres. On parle souvent du film de Burton comme étant un film parodique et c’est faux, comme pour Frankenweenie, ce film est un hommage pur et dur aux films de science-fiction et de série B.
Les films de science-fiction mexicains sont fabriqués, comme vous vous en doutez, avec la plus grande économie de moyens, le principe étant de produire le maximum de films pour faire entrer dans les salles le maximum de public. C’est ainsi que les acteurs de La planète des envahisseuses ont tourné leurs scènes en pensant ne tourner qu’un seul film. Mais c’était sans compter sur le sens du pratique et de l’économie de la production, qui se servira finalement des rushes pour faire deux films au lieu d’un seul. Bon job, les mecs ! La planète des envahisseuses n’est donc pas le meilleur film proposé durant la rétrospective amiénoise, toujours est-il que ce film exploite à merveille les codes de la science-fiction, et tout particulièrement de la science-fiction mexicaine : un vaisseau, des femmes en petite tenue, des machos, des scientifiques un peu fous et des mythes réappropriés. Peut être qu’il manque une momie masquée ou des catcheurs, mais tant que les femmes viennent de Vénus et qu’il y a un voyage dans l’espace, tout va bien.