Machete Kills 4


Après un premier épisode fort décevant, Robert Rodriguez avait fort à prouver aux amateurs de séries B – voir Z – auxquelles cette saga est un clin d’œil assumé. Réunissant un casting de petits foufous décomplexés, cette suite sobrement intitulée Machete Kills est-elle à la hauteur de son ambition régressive ?

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Machete don’t tweet !

Après le diptyque Boulevard de la Mort / Planet Terror, hommage largement sous-estimé à mon avis, Quentin Tarantino et Robert Rodriguez ont chacun vogué de leur côté respectif. Le premier continue à dynamiter les genres tandis que le second entretient sa double filmographie, entre bons films plus ou moins léchés, souvent fun mais néanmoins pris au sérieux – Sin City, Desperado, Une Nuit en enfer – et les récréations régressives voir enfantines, souvent peu (ou pas) inspirées – entre Spy Kids et autres Shark Boy et Lava Girl. La saga mettant en scène Machete conjugue en fait les deux pans de la filmographie foutraque de Rodriguez. Le personnage mexicain est en fait un habitué des films du réalisateur au Stetson, puisqu’il a déjà ramené sa trogne faite de terre glaise dans les films de gangsters comme Desperado (1995) comme dans les films pour gamin à la Spy Kids (2001-2003) où il est l’oncle Machete, fabricant de gadgets high-tech. Machete est peut être donc le personnage le plus représentatif du cinéma de Rodriguez, manquant cruellement de psychologie et de caractère, mais se rattrapant néanmoins en étant sacrément badass et en ayant pas mal de gueule.

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Le premier épisode, adapté d’une bande-annonce diffusée en salle avant Planet Terror (2007) décevait parce qu’il n’arrivait jamais à combler l’attente procurer par ce trailer pendant les trois années qui s’écoulèrent entre la sortie du diptyque Grindhouse et le premier volet de Machete (2010). Si l’on retrouvait l’esthétique du projet co-réalisé avec Tarantino, on perdait toutefois beaucoup du côté désinvolte de Rodriguez, et la réalisation, bien timide, ne sauvait pas un scénario peu inspiré qui n’assumait ni ses références, ni ses digressions comiques. Au final, ce Machete n’était pas tellement drôle et pas suffisamment sérieux. Le cul entre deux chaises, ne sachant pas sur quel pied danser, Rodriguez cadenassait son film dans un entre-deux-genres qui décontenança un petit peu les amateurs de son cinéma. Aussi, la sortie de cette suite, Machete Kills, surprend parce que le réalisateur semble bel et bien avoir choisi sur quelle chaise s’asseoir : celle de la comédie d’action débile, et invente pour l’occasion une galerie de personnages secondaires totalement bouffons. On a donc vite l’impression que le premier volet de Machete aurait pu rester une simple bande-annonce, et que ce second opus aurait pu être le premier à sortir en salles, tant il semble plus maîtrisé – c’est peut être un grand mot pour un tel foutoir – mais surtout plus assumé.

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Le scénario est aussi simple que celui de la plupart des films d’actions badass qui sortent directement en DVD. Accusé de l’assassinat de l’agent de la CIA, la belle Sardana, dont il était amoureux, Machete est recruté par le Président des États-Unis pour éliminer un marchand d’armes mexicain voulant envoyer une arme destructrice sur Washington. Le tueur mexicain va découvrir alors un complot menaçant la Terre entière. La gueule cassée de Dany Trejo côtoie tout au long de son aventure une ribambelle de trognes célèbres que le public s’amuse à découvrir successivement dans des contre-emplois hilarants. Michelle Rodriguez continue d’être la vendeuse de merguez-frites borgne qui organise en cachette une rébellion. Amber Heard s’amuse de sa réputation de fille la plus bonne d’Hollywood en déambulant dans les robes du concours de Miss San Antonio qui lui sert de planque. Alexa Vega, la gamine de Spy Kids, détruit son image en défilant en petite tenue affriolante en dézinguant du bad guy à coup de mitraillette. Demian Bichir, nommé aux Oscars pour A Better Life (2011), s’amuse de son image en interprétant un agent double complètement burlesque. Walt Goggins, Cuba Gooding Jr , Antonio Banderas et… Lady Gaga, sont les multiples visages d’un personnage lorgnant vers le fantastique – et quelque peu sous-exploité – nommé « Le Caméléon ». Charlie Sheen, qui s’amuse à se créditer pour la première fois sous son vrai nom mexicain de Carlos Estevez, interprète un Président des États-Unis hilarant bien que n’apparaissant finalement que trop rarement. Enfin, Mel Gibson s’amuse comme un petit fou dans son costume mal taillé de grand méchant, ersatz burné du Dr. No de James Bond, tantôt marchand d’armes high-tech, tantôt créateur de vaisseaux spatiaux, gourou et maniaque.

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Tout ce petit monde prend un malin plaisir à jouer les situations grotesques dans lesquelles le scénario les plongent tour à tour. Complètement décomplexé, Robert Rodriguez assume pleinement la bêtise de l’entreprise et quitte son habit de petit malin s’auto-citant et enchaînant les clins d’œil aux cinéma bis. Cette fois, il dérive davantage vers l’humour totalement régressif et parodique de la saga Hot Shots ! (1991-1993) dont Charlie Sheen était déjà la star. Le film se moque pêle-mêle des gangster movies à la Scarface (1983), en passant par le style Mad Max (1979) et sans oublier la science-fiction de Matrix (1999) ou les sagas intergalactiques Star Trek et Star Wars qu’il pastiche tout particulièrement sur la fin. Même Tarantino en prend pour son grade, son Reservoir Dogs (1992) étant lui même moqué. Avec Machete Kills, la saga prend peut être un virage incontrôlé qui lui fait brusquement changer de route. Alors qu’elle roulait à petite allure sur celle de l’hommage au cinéma bis, la franchise n’a plus beaucoup de kilomètres à faire pour rejoindre les Hot Shots ! et autres Scary Movie (2000-2013). Il faudra donc garder un œil sur le troisième opus, déjà titré Machete Kills Again… in space ! – on a le droit au trailer, très drôle, en avant-programme du film – qui propulsera le mexicain dans l’espace et devrait donc permettre un maximum de citations et pieds-de-nez aux différentes sagas de science-fiction. Pour le moment, Machete Kills Again… in space ! n’est qu’une blague, une fausse bande-annonce, mais ce ne serait pas la première fois que Robert Rodriguez transforme une simple blague en long-métrage. En tout cas, si le film se fait, il pourrait définitivement consacrer la saga Machete au rang des sagas parodiques cultes.


A propos de Joris Laquittant

Sorti diplômé du département Montage de la Fémis en 2017, Joris monte et réalise des films en parallèle de son activité de Rédacteur en Chef tyrannique sur Fais pas Genre (ou inversement). A noter aussi qu'il est éleveur d'un Mogwaï depuis 2021 et qu'il a été témoin du Rayon Bleu. Ses spécialités sont le cinéma de genre populaire des années 80/90 et tout spécialement la filmographie de Joe Dante, le cinéma de genre français et les films de monstres. Retrouvez la liste de ses articles sur letterboxd : https://boxd.it/sJxKY


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4 commentaires sur “Machete Kills