Le territoire des loups 1


Liam Neeson ne fait pas que des mauvais films. Liam Neeson est un grand acteur. Vous allez lire la phrase qui suit et me croire sur parole. Liam Neeson est un grand acteur. Taken était la pire merde qu’il ait faite, mais on lui pardonne, parce que c’est un grand acteur (je vous dis ça en vous faisant un mind trick à la Qui-Gon). Taken 2 – oui, oui, c’est prévu pour octobre – sera la pire merde qu’il fera, mais on lui pardonne, vous savez pourquoi maintenant. En attendant, entre deux films où il sauve le monde et combat des Transformers marins qui ne rouillent pas, il est profondément touchant dans Le Territoire des Loups de Joe Carnahan, un survival complètement atypique, qui joue la carte de l’émotion sans jamais verser dans le pathos.

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Liam vs. wild

Dire que Joe Carnahan est un réalisateur et scénariste sous-estimé est une vérité on ne peut plus réelle. Lui qui a su gagner la confiance des frères Scott après avoir écrit et réalisé le très bon Narc et le pas trop dégueulasse Mi$e à prix réalise son premier blockbuster hollywoodien avec l’adaptation ciné de L’Agence tous risques. $110 millions de budget délivrés par les frangins angliches, et le film fait un score très très moyen, ne remboursant même pas les ¾ de son budget aux USA. Dommage, parce que même s’il n’était pas si terrible, l’adaptation était plutôt sympa. Et puis Liam Neeson a la classe. La putain de classe, même. De toute façon, je vous mets au défi de me trouver un film où Liam Neeson n’a pas la classe. Même en Zeus il est cool ! Et ça tombe bien, parce qu’il a le rôle principal de The Grey (Le territoire des loups en VF) où, devinez quoi, il a la classe ! L’histoire, en quelques mots, est celle d’une poignée d’ouvriers travaillant pour une compagnie pétrolière envoyés en Alaska, et dont l’avion s’écrase en plein vol. Cinq survivants au crash vont devoir survivre en milieu hostile, froid, et peuplé par des loups qui n’ont pas l’air très très gentils. John Ottway, l’un des survivants, à l’existence torturée, pense que seule la forêt leur offrira un refuge un peu plus rassurant, même s’ils savent tous profondément qu’ils ne survivront pas à cette fatalité…

Je préfère le dire d’emblée, Le territoire des loups est THE film de Joe Carnahan. Ce mec est à ça de la perfection avec ce film. Vous comprenez, à ça! Il prouve qu’en 2012, ON PEUT renouveler des genres ou des sous-genres cinématographiques. Si ça c’est pas un scoop! Car Le territoire des loups, film qui a été vendu comme un survival – avec des loups, donc – n’en est pas un. Ou plutôt, il n’est pas un survival au sens où on l’entend, au sens où Je suis une légende est un survival, au sens où le meilleur film de Kevin Costner, The Postman, est un survival (pour ceux qui ne l’auraient pas compris, cette référence était bourrée d’ironie). Ce film-ci est plutôt un cousin éloigné de Délivrance, brutal et profond, utilisant des axes sensiblement similaires pour présenter son sujet. Le vif du sujet, ce n’est pas le combat entre cinq hommes et des loups, c’est plutôt le combat d’un seul homme contre lui-même, contre son lourd passé, qui vivra finalement ce périple comme un véritable chemin de croix.

Pour arriver à ce final puissant et absolument pessimiste, Ottway rencontrera de nombreuses épreuves qui le purifieront, comme s’il devait devenir digne de connaître l’ultime duel. Une purification qui va le pousser à accepter son départ pour l’Alaska et ce qu’il avait à fuir. Une purification qui va commencer par le crash de l’avion, très impressionnant d’ailleurs, et qui va s’étaler tout le long du film par des attaques de loups et des conflits humains. Les conflits humains, voilà l’élément le plus important du film, même si “relations” serait un terme préférable à “conflits”. En réalité, Le territoire des loups est un film sur la relation entre l’homme et la nature; plus qu’un guide de survie, c’est presque une étude psychologique de comment survivre à plusieurs en milieu hostile.

Ceux qui n’ont jamais été vraiment convaincus par Joe Carnahan doivent absolument voir ce film, qui est l’opposé total de ses autres œuvres. Un film nihiliste, torturé, à mille lieues de ce qui peut se faire actuellement dans le même genre. Un film de mecs, mais pas un film de couilles, – le personnage principal est lui-même une mauviette – qui joue surtout sur le calme avant la tempête, et qui est porté tout le long par un poème, écrit par le père d’Ottway: “Once more into the fray/Into the last good fight I’ll ever know/Live and die on this day/Live and die on this day” (“Une fois de plus dans la mêlée/Dans le dernier et plus grand combat de ma vie/Vivre et mourir en ce jour/Vivre et mourir en ce jour”). Un poème qui prend tout son sens dans la scène finale, et je ne peux que conseiller de regarder le générique de fin jusqu’au bout, même si je déteste révéler qu’il y a une scène post-générique. The Grey, en plus d’être une incroyable surprise et de nous montrer un Liam Neeson dans l’une de ses meilleures interprétations (sinon la meilleure), fait sans aucun doute partie du top 3 des meilleurs films de ce premier trimestre 2012.


A propos de Valentin Maniglia

Amoureux du bis qui tâche, du gore qui fâche, de James Bond et des comédies musicales et romantiques. Parle 8 langues mortes. A bu le sang du Christ dans la Coupe de Feu. Idoles : Nicolas Cage, Jason Statham et Michel Delpech. Ennemis jurés : Luc Besson, Christophe Honoré et Sofia Coppola.


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Commentaire sur “Le territoire des loups

  • Julgo

    Très belle analyse de ce film et du rôle de Liam Neeson dans le rôle principal. Ce film est bien peu connu au regard de sa qualité et de sa profondeur. Cette oeuvre m’a réellement bouleversé. il y a plusieurs façon de le voir et tellement de manière de le comprendre. Je pense même qu’il fait écho en chacun de nous, encore plus lors de la dernière scène, tellement sublime, lorsque le héros fait face à son destin, à l’aboutissement de son aventure, qu’il a, au départ, subi mais qu’il affronte finalement.

    Là où je ne suis pas d’accord, c’est sur les rôles et films merdiques de Liam Neeson. Taken est un bon film je trouve. La suite, beaucoup moins. Mais par exemple, tu n’as pas parlé de La Liste de Schindler ou Rob Roy. Deux de ses plus grands rôles.

    Mais merci encore pour cette analyse. J’ai pris plaisir à la lire.